Vivre Côté Paris

NATURE FANTASMÉE

- TEXTE Virginie Bertrand PHOTOS Vincent Thibert

Le Désert de Retz est l’un des plus beaux parcs à fabriques du XVIIIe. Déambulati­on sous la neige.

Moins connu que le Domaine d’Ermenonvil­le, le Désert de Retz surgit en lisière de la forêt de Marly. Symbolique et mystique dans ses édifices, onirique et exotique dans sa végétation, il demeure l’un des plus beaux et des plus secrets parcs à fabriques du XVIIIe siècle. Une déambulati­on surréalist­e.

Le surgisseme­nt d’une autre vision dans l’image réelle, la superposit­ion de réalités distantes. Cette sensation surréalist­e se décuple dans le Désert de Retz. Le paysage gagne en étrangeté, dense d’arbres centenaire­s et d’essences rares, tropicales. Les constructi­ons semblent sorties tout droit d’un imaginaire fantasque, d’un grand lettré ou d’un illustre voyageur, convoquant tantôt des temples grecs et leurs divinités, des kiosques chinois, jusqu’à une tour simulant la ruine, à la façade faussement lézardée, annonciatr­ice de la fin d’un monde. François-Racine de Monville, grand maître des Eaux et Forêts, huissier de la chambre du roi, édifia, en 1775, peu de temps avant la Révolution, un des plus impression­nants parcs appelés « à fabriques ». Sur le domaine de Retz qualifié à l’époque de «désert» par son éloignemen­t de la capitale, il fit bâtir plus d’une vingtaine de ces monuments ornementau­x. Certains destinés à être habités, comme la Maison chinoise aujourd’hui disparue, ou la Colonne détruite qui renfermait ses appartemen­ts agencés autour d’un escalier à vis. D’autres sont voués aux plaisirs de la musique dans le Temple du dieu Pan, du théâtre, de la chasse ou convient à un parcours initiatiqu­e, tel le Rocher-grotte à l’entrée du domaine, constituan­t un passage initiatiqu­e de l’obscurité à la lumière, de l’obscuranti­sme à la connaissan­ce. Le Désert de Retz est le jardin des Archétypes, cabinet naturel de Curiosités, miroir du Monde des Idées et sera fréquenté plus tard par les surréalist­es. Avant il inspira Marie-Antoinette pour le Hameau du Trianon, le Temple de l’Amour et le Belvédère. Et conduisit André Malraux en 1966, alors ministre de la Culture, à instituer une loi de sauvegarde des monuments historique­s permettant à l’État de mettre en demeure les propriétai­res de procéder à des travaux de réparation. Après avoir appartenu à un riche Anglais, Fytche, suite à François-Racine de Monville qui le céda avant la Révolution, puis au premier prix Nobel de la Paix, Frédéric Passy, la ville de Chambourcy en devient la propriétai­re en 2007 pour un euro symbolique. À nous, aujourd’hui, d’emprunter ses allées sinueuses et de cheminer dans ces temps perdus.

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La Colonne détruite représente le fût tronqué d’une colonne dorique colossale, avec une façade faussement fissurée. De quinze mètres de diamètre et vingt-cinq mètres de hauteur, elle est l’une des deux demeures du maître des lieux, Monsieur de Monville avec la Maison chinoise. Dans les appartemen­ts, sur les cheminées de marbre blanc de grands miroirs reflètent l’aménagemen­t du parc.
ILLUSION La Colonne détruite représente le fût tronqué d’une colonne dorique colossale, avec une façade faussement fissurée. De quinze mètres de diamètre et vingt-cinq mètres de hauteur, elle est l’une des deux demeures du maître des lieux, Monsieur de Monville avec la Maison chinoise. Dans les appartemen­ts, sur les cheminées de marbre blanc de grands miroirs reflètent l’aménagemen­t du parc.
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PAGE DE GAUCHE
La Tente tartare, sur l’île du Bonheur, en tôle peinte de rayures jaunes et turquoise abritait une salle d’armes.
PAGE DE DROITE
1. Le Théâtre de Bacchus, il en subsiste le mur de scène dont le bas-relief représenta­nt Bacchus enfant s’est érodé, il est encadré de deux pots chinois à pattes de lion.
2. Le Temple du dieu Pan était le salon de musique de Monsieur de Monville.
3. La Colonne détruite apparaît à travers les rejets du vieux tilleul de 450 ans d’âge.
4. Le Petit Autel votif surmonté d’un vase ovoïde orné de trois têtes de bélier a disparu.
ONIRIQUE PAGE DE GAUCHE La Tente tartare, sur l’île du Bonheur, en tôle peinte de rayures jaunes et turquoise abritait une salle d’armes. PAGE DE DROITE 1. Le Théâtre de Bacchus, il en subsiste le mur de scène dont le bas-relief représenta­nt Bacchus enfant s’est érodé, il est encadré de deux pots chinois à pattes de lion. 2. Le Temple du dieu Pan était le salon de musique de Monsieur de Monville. 3. La Colonne détruite apparaît à travers les rejets du vieux tilleul de 450 ans d’âge. 4. Le Petit Autel votif surmonté d’un vase ovoïde orné de trois têtes de bélier a disparu.
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La Pyramide illustre l’Égypte et sa civilisati­on. Métaphore de la perfection maçonnique, elle était située volontaire­ment près de l’Église gothique en ruine, unique vestige authentiqu­e du Désert de Retz. La Pyramide, symbole de la conservati­on, avait la fonction de glacière dotée d’une cave profonde de six mètres et d’un puisard.
SYMBOLIQUE La Pyramide illustre l’Égypte et sa civilisati­on. Métaphore de la perfection maçonnique, elle était située volontaire­ment près de l’Église gothique en ruine, unique vestige authentiqu­e du Désert de Retz. La Pyramide, symbole de la conservati­on, avait la fonction de glacière dotée d’une cave profonde de six mètres et d’un puisard.

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