MARIAGES ICONOCLASTES
Allergique à l’ennui comme au conformisme, la propriétaire voulait un lieu où installer son univers. L’architecte Federico Masotto a imaginé pour elle un espace qui lui ressemble.
Allergique à l’ennui comme au conformisme, la propriétaire de cet appartement voulait un lieu où installer son univers. Au terme d’un dialogue nourri, l’architecte Federico Masotto a imaginé pour elle un endroit qui lui ressemble en réunissant deux espaces superposés, où les teintes fortes rythment l’espace et où l’imaginaire peut s’exprimer librement. Visite d’un décor à haute couleur ajoutée!
MÉLANGES INSPIRÉS
Les vastes baies vitrées scandent l’open space où la cuisine s’ouvre comme une parenthèse de couleur. Les fenêtres, faites sur mesure, composées de pans de verre géométriques, s’inspirent des toiles de Mondrian. Dessous, une console d’Éric Schmitt, pièce unique baptisée « Laurence », en hommage à la propriétaire. Collectionneuse dans l’âme, Laurence a parsemé l’appartement d’objets récoltés au fil de plusieurs décennies de chine aux Puces de Saint-Ouen. Lustre en verre noir de Nathalie Ziegler Pasqua. Table et chaises multicolores, années 1950, chinées.
RÉVOLUTION DE SALON
Dans la pièce de séjour, Federico a créé une cheminée soulignée d’une dalle de terrazzo. Les murs ont été couverts d’un enduit minéral coquille d’oeuf, en harmonie avec la grande toile de l’artiste marseillais Gérard Traquandi. Atypique et inattendu, le salon met en scène la passion de Laurence pour l’imprimé panthère. Tapis, Le Garage, Christian Sapet. Poufs « Rasta » de Paulo Haubert, Arcade, canapé en cuir et petit cheval d’arçons chinés, fauteuils, Damien Tison. Sur la cheminée, une sculpture de Gérard Traquandi.
Ce n’était pas gagné d’avance. Lorsqu’il fut question de réaménager ce bel espace de la rue du Cherche-Midi, l’architecte Federico Masotto n’était pas sûr de faire coïncider son souci de rigueur et de cohérence avec l’univers fantasque et audacieux de la propriétaire. Et pourtant la rencontre eut lieu. «Nous nous sommes stimulés mutuellement et à force d’échanges, nous avons trouvé ensemble des combinaisons inédites, raconte Federico. Dans ce chantier complexe, la volonté de libérer l’espace et de jouir des volumes en rythmant les différentes fonctions a été prédominante». Le challenge consiste à réunir en un seul lieu de vie deux espaces, logés au fond d’une cour intérieure, dans ce quartier très animé du Paris germanopratin. Colonne vertébrale invisible, un escalier est créé pour connecter les deux plateaux du duplex. Au rez-de-chaussée, un ancien atelier jouissant d’une belle double hauteur, la partie jour déroule une cuisine, aux façades en bois laquées vert, qui accueille une étagère en pierre d’Éric Schmitt et un salon en open space dont la cheminée a permis de créer un meuble bibliothèque, tandis qu’à l’étage, un appartement de structure classique héberge les chambres et les salles de bain dont les vitraux Art déco d’origine en mosaïque de verres ont été restaurés. Pour gagner de la place, Federico intègre les rangements dans les surfaces murales et dissimule les parties techniques dans un cube de bois en contreplaqué situé dans l’entrée, abritant un salon télévision dans sa partie supérieure. Résultat: de jolies enfilades, une circulation fluide et une lumière redistribuée par la succession des trois grandes baies vitrées. Pour se protéger des regards venus de la cour intérieure, la façade est végétalisée et des pans de verre imprimé sont insérés dans les doubles vitrages. Il ne reste plus qu’à insuffler à cet écrin l’énergie de la couleur, en puisant dans la palette créée par Serge Bensimon pour Ressource. Laurence peut désormais y mettre en scène son esprit libre et bohème, ses collections, ses oeuvres d’art et ses télescopages d’imprimés audacieux… comme un antidote au gris ambiant et en clin d’oeil à ses origines marseillaises.
L’ART COMME FIL ROUGE PAGE DE GAUCHE
Partout présentes, les oeuvres rappellent la passion de la propriétaire pour l’art contemporain. Devant l’antichambre, une toile du peintre Gérard Traquandi. Dans l’entrée, l’architecte Federico Masotto a créé un cube de contreplaqué cachant le local technique. Il a logé le salon télé au sommet de cette boîte liserée de bleu canard.
PAGE DE DROITE
Federico Masotto devant une oeuvre de Gérard Traquandi.