Vivre Côté Paris

PLUS VRAI QUE NATURE

- TEXTE Virginie Bertrand

« Travailler la peinture afin qu’elle éclose d’elle-même. » 28 ans, jeune diplômé des Beaux-Arts de Paris avec les félicitati­ons, Alexandre Lenoir fait en un an et demi les cinq ans d’études habituels. « J’ai engrangé lors de ces premières années plus qu’il ne m’en fallait, puis j’ai voulu prendre le temps de la toile, chez moi, dans mon espace vide. Une des premières, Les Cévennes, m’a demandé quatre mois. » Il fait référence à l’incarnatio­n des sujets de Fra Angelico, aux accumulati­ons de matières d’Eugène Leroy, aux traits répétitifs de Marc Couturier ou aux peintures blanches de Qiu Shihua se révélant sous une observatio­n attentive, pour mieux s’en détacher. Les toiles d’Alexandre Lenoir hypnotisen­t, apparaissa­nt réellement, irréelleme­nt, pareilles à un mirage, en trois dimensions quand on s’en écarte, révélant mille détails à leur approche. Il raconte avec générosité, simplicité, sa technique ou plutôt ses techniques : « Chaque élément est abordé différemme­nt, non dans la volonté de les représente­r mais de les incarner, de faire émerger de la toile l’eau… dans son coeur. ». Il initie des procédés qui lui sont propres, presque alchimique­s. « Je travaille dans l’obscurité, avec des masquages.

J’appose du Scotch, puis des lavis les uns sur les autres, me restreigna­nt aux couleurs primaires. Je ne dessine pas par exemple un brin d’herbe, c’est lui qui pousse dans une coulée de peinture, s’immisçant sous les bandes de Scotch… et lorsque je les retire, je découvre mon travail. Ce procédé est proche de la photograph­ie, avec cette latence dans l’image qui arrive progressiv­ement.» L’artiste peint aussi au dos de la toile pour faire ressurgir sur le devant la saleté des joints d’une piscine vide, ou encore la plaque contre un mur de pierre afin qu’elle s’en imprègne. « Ce qui m’intéresse, c’est de créer un rapport sensible avec la peinture, le personnage s’allège, laisse place à l’imaginaire, au souvenir. » Et le spectateur, car il y a une dimension spectacula­ire dans ses tableaux très grand format, devient cet homme, au centre de l’oeuvre. L’artiste transmet ce rapport intime qu’il instaure quand il peint. Magique. Alexandre Lenoir est représenté par la Almine Rech Gallery.

FONDATION SISLEYMAIS­ON SISLEY

Exposition à partir du 11 juin. 11, avenue de Friedland, 75008. Tél. 01 86 21 11 11.

QUAND LES JEUNES ARTISTES SE RÉAPPROPRI­ENT LA PEINTURE ET LA RÉINVENTEN­T, EXPÉRIMENT­ANT DIFFÉRENTS PROCESSUS DE CRÉATION, LA TOILE ALORS SORT DU CADRE. LES OEUVRES D’ALEXANDRE LENOIR RENDENT TANGIBLES LES ÉLÉMENTS : LE BRUISSEMEN­T DES FEUILLES, LE RUISSELLEM­ENT DE L’EAU, LA RÉFRACTION DU SOLEIL SUR UN MUR, LA CLARTÉ DE L’AIR.

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1. L’atelier d’Alexandre Lenoir, au centre Hangar, 2019, acrylique sur toile, 215 x 327 cm, à gauche, Jardin, 2019, acrylique sur toile, 170 x 260 cm, à droite Saint-Charles, 2019, acrylique et huile sur toile, 175x289 cm. 2. Au fond de l’atelier de l’artiste, Colisée, 2016, acrylique sur toile, 265x410 cm. 3. Palmeraie, 2015, acrylique sur toile, 204 x 312,5 cm. 4. Alexandre Lenoir devant le dos de la toile Palmeraie, acrylique et huile sur toile, 2017, 214x224 cm, derrière lui, Jardin, 2019.
2. 1. L’atelier d’Alexandre Lenoir, au centre Hangar, 2019, acrylique sur toile, 215 x 327 cm, à gauche, Jardin, 2019, acrylique sur toile, 170 x 260 cm, à droite Saint-Charles, 2019, acrylique et huile sur toile, 175x289 cm. 2. Au fond de l’atelier de l’artiste, Colisée, 2016, acrylique sur toile, 265x410 cm. 3. Palmeraie, 2015, acrylique sur toile, 204 x 312,5 cm. 4. Alexandre Lenoir devant le dos de la toile Palmeraie, acrylique et huile sur toile, 2017, 214x224 cm, derrière lui, Jardin, 2019.
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