VOGUE France

5 questions à : Marion Motin

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Les gestes de pantin désarticul­é de Stromae, c’est elle. Les soubresaut­s électrique­s de Christine & the Queens, encore elle. Danseuse autodidact­e de hip-hop hier, chorégraph­e aujourd’hui, Marion Motin a fait le tour du monde en dansant derrière Madonna lors du MDNA tour. À 35 ans, elle signe son premier solo, Massacre. De quoi parle Massacre ? J’ai une relation paradoxale avec la danse. J’en ai besoin, j’adore danser et, en même temps, je la vis aussi comme une malédictio­n à cause des états dans lequel cela me met. C’est une passion, j’y pense tout le temps. Je suis toujours dans la projection d’un projet, une sorte de fenêtre abstraite de mon esprit. J’ai alors l’impression de ne plus être dans la vraie vie mais dans une vie parallèle intérieure. Après chaque projet, j’ai envie d’arrêter. Le spectacle parle de ça: l’envie régulière d’arrêter la danse puis celle d’y revenir. L’inspiratio­n, la joie puis le doute et la déprime. Un cycle qui ne s’arrête jamais ! Vous avez réellement déjà arrêté? Oui, vers 30 ans. Je danse depuis que je suis toute petite mais à un moment, je ne faisais qu’exécuter des séries de mouvements qui ne voulaient plus rien dire pour moi. Je m’étais enfermée dans le hip-hop. Il fallait que j’en sorte. Je suis repartie en assumant un mouvement plus instinctif et pulsionnel. Pourtant vous êtes venue à la danse par le hip-hop… Bien sûr ! J’ai commencé au début des années 90 après quelques années de danse classique qui ne m’avaient pas plu. Il n’y avait pas de lâcher prise, pas de folie… Or, j’avais envie de danser comme on dévale des prés à fond la caisse ! Ce qui me plaisait dans le hip-hop, c’était la diversité des corps et la mixité, à tout point de vue. On s’entraînait dans la rue, n’importe où et n’importe quand. Et puis cela correspond­ait à la musique que j’écoutais, Michael Jackson, du funk, du rap… J’avais envie de m’éclater et danser «fort» là-dessus avec folie et liberté ! Ce que j’ai perdu par la suite quand le hip-hop s’est codifié. Vos rencontres avec Stromae et Christine & the Queens ont tout changé ? Quand j’ai rencontré Stromae, j’avais envie de travailler avec lui, mais me contenter d’une chorégraph­ie derrière un chanteur ne m’intéressai­t pas. J’avais envie d’autre chose. Lui aussi voulait laisser parler son corps, se libérer. On s’est juste dit, «allez viens, on danse comme on a envie de danser !». Il y avait du sens derrière tout cela. C’est lui, vraiment, ce n’est pas un produit fabriqué. Pareil pour Christine. Cela a été une chance de collaborer avec de tels artistes. Après ces succès, j’ai refusé beaucoup de projets. Je ne peux pas travailler pour des chanteurs qui se font «marketer» par d’autres. D’autant que cela marche dans les deux sens. J’ai besoin moi aussi d’être nourrie par l’univers fort d’un artiste. Mais alors dans Massacre, un solo, vous rencontrez qui ? Je me suis posé la question et figurez-vous que j’ai fait un rêve pendant les répétition­s dans lequel j’expliquais à une amie, «je pars à ma rencontre…» Cela peut paraître autocentré mais finalement, cette question est assez universell­e, non ? (cl)

Massacre, de Marion Motin, du 16 au 19 mai à La Villette. lavillette.com

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