COUP DE GENIUS
Quand Moncler abandonne les collections saisonnières pour laisser à une pléiade de personnalités de la mode le loisir de créer leur capsule de doudounes de luxe, ça donne quoi ? Moncler Genius. Et c’est bien vu.
Quand Moncler abandonne les collections saisonnières pour laisser à une pléiade de personnalités de la mode le loisir de créer leur capsule de doudounes de luxe, ça donne quoi ? Moncler Genius. Et c’est bien vu.
«jusqu’ici, les réactions sont excellentes et je crois que tout le monde a perçu l’énergie qui entoure le concept. Ce démarrage confirme que nous sommes sur la bonne voie, pour ce qui est de construire le futur de la marque», nous écrit mi-juillet Remo Ruffini, le président manifestement réjoui de Moncler, un mois après l’arrivée en boutique de la première salve de son projet Moncler Genius. Derrière ce nom sibyllin, rien de moins qu’une nouvelle stratégie pour la marque. Résumons l’idée : pour sortir du modèle classique consistant à confier à un unique directeur artistique la réalisation de deux collections par an, Remo Ruffini a proposé à toute une famille de designers de livrer leur propre vision de la doudoune maison au gré de capsules dévoilées à un rythme mensuel à partir de juin. Moncler Genius est un hub de créateurs, en somme – une «république de l’imagination», comme on dit au sein de la marque. Noter que ce changement de méthode n’est pas dû à une quelconque déception financière : les résultats de Moncler (cette griffe d’origine française fondée en 1952 à Monestier-de-Clermont, comme ses deux syllabes l’indiquent, dont le businessman italien orchestre le succès depuis son rachat en 2003) n’ont jamais été aussi bons qu’en 2017. La décision est plutôt motivée par la conviction que le système des saisons est un peu dépassé, et que dans un monde où les défilés sont visibles à la seconde même sur Instagram sans que les collections soient immédiatement disponibles, mieux vaut peut-être dialoguer différemment (et plus fréquemment) avec les consommateurs. Moncler propose donc autre chose. Et cette autre chose présente un effet collatéral non négligeable, puisque multiplier les collections, les signatures et les styles, c’est aussi la promesse potentielle d’élargir son public. Moncler par Craig Green.
Présenté en ouverture de la fashion week de Milan en février dernier, le concept a été inauguré par Hiroshi Fujiwara, pape du streetwear japonais, à la tête du label Fragment. Ont suivi son compatriote Kei Ninomiya (dont la marque Noir est dans le giron de Comme des Garçons), qui a eu l’heureuse idée de traiter le matelassage de la doudoune comme un tricot, puis Craig Green, cet espoir de la mode masculine dont les capitonnages XL nous ont presque évoqué des abris de survie. Septembre est dédié à la créatrice irlandaise Simone Rocha (romantisme inattendu de la doudoune, volantée ou fleurie, proportionnée comme une robe victorienne, possiblement en ivoire ou rose bonbon), ainsi qu’à Moncler 1952, des modèles classiques de la marque revisités à coups de couleurs pop. À venir : Pierpaolo Piccioli (directeur artistique de Valentino, mais intervenant cette fois-ci à titre personnel), auteur d’une série de pièces aux volumes géométriques d’esprit couture, et Francesco Ragazzi (l’homme qui célèbre les skateurs californiens à travers sa marque Palm Angels), dont la revisite de l’univers Moncler capitalise joyeusement sur le logo et les slogans. Fin de cette première édition avec une collection Moncler Grenoble (la gamme technique de la marque), faite d’un mix & match de matières et de motifs n’ayant a priori pas grandchose à voir avec les sports d’hiver : imprimés fleuris ou cachemire, tartan, velours côtelé… Noter qu’à Paris, l’ensemble de Moncler Genius, ainsi que des créations exclusives de Simone Rocha et Kei Ninomyia seront à shopper au Printemps Haussmann à partir du 6 septembre et pour une durée de six semaines. Le propre de Moncler Genius étant le mouvement perpétuel, gageons que le schéma ne cessera de muter et que le nombre de designers et de collections évoluera continuellement avec une réactivité et une adaptabilité décoiffantes. «Stay tuned», confirme de fait Remo Ruffini, laissant présager de futurs traits de génie.