Voile Magazine

La tête dans les étoiles

- François-Xavier de Crécy

Sacrée saison de course au large. Un Vendée homérique, qui voit les leaders revenir aux Sables quasiment au contact, façon Figaro, un Thomas Coville héroïque qui a atomisé le record du tour du monde en solitaire et enfin atteint, par la même occasion, son Graal personnel au terme d’une chevauchée fantastiqu­e… Et ce n’est pas fini, Francis Joyon et sa dream team du Grand Sud pourraient bien faire sauter la banque sur le Trophée Jules Verne. Histoire de s’emparer d’un nouveau record majeur alors qu’il vient tout juste d’en céder un ! Mais à l’heure où nous écrivons ces lignes, c’est bien l’exploit de Thomas Coville qui marque encore les esprits, au point d’occulter – pour un temps – l’incroyable bataille navale qui se joue sur la remontée de l’Atlantique entre Alex Thomson et Armel Le Cléac’h. Parce que bien plus qu’un tour du monde express, c’est l’apothéose d’une carrière dont les accidents auront conduit Thomas à une remise en question profonde, douloureus­e, assumée, pour finalement déboucher en pleine lumière, sous un improbable soleil brestois. Qu’elles sont loin, les larmes de Roscoff, où il avait réfugié son trimaran blessé peu après le départ de la Route du Rhum 2014. Et qu’elles sont belles, ces images de Brest qui disent l’accompliss­ement du sportif et le panache du marin. La plénitude. Un Thomas radieux devenu source d’optimisme et d’inspiratio­n pour un public en quête de héros positifs ; et n’est-ce pas la vocation ultime de tout coureur, de tout sportif ? A nous d’en saisir le meilleur, quel que soit l’horizon de nos rêves, de ne pas renoncer à tel objectif de croisière plus ou moins lointain ou difficile du fait de la santé du bateau, de l’âge du capitaine ou inversemen­t, d’aller enfin au bout de ce projet Fastnet dont on parle depuis longtemps avec les copains, ou de se lancer enfin dans la restaurati­on du croiseur paternel qui pourrit gentiment dans le jardin. Chacun trouvera son défi, sa marotte, l’idée est toujours la même. Ne pas lâcher l’affaire, garder un pied en mer et la tête dans les étoiles. Elles brillent aussi sur nous, ces étoiles qui scintillai­ent dans le regard de Thomas Coville. Il a serré les dents dans l’océan Indien. Il n’a pas heurté d’Ofni dans l’Atlantique Nord… Il y a donc une justice. Il y a un dieu pour les marins déterminés. Et il y a même parfois un soleil doré, le 26 décembre, sur le goulet et la rade de Brest.

 ??  ??

Newspapers in French

Newspapers from France