Voile Magazine

Comparatif

Accumulate­urs : Une batterie de tests

- Texte : Paul Gury. Photos : Pierrick Contin.

LA PROBLEMATI­QUE

des batteries est encore bien souvent reléguée au second plan par une majorité de plaisancie­rs : non prioritair­e, compliqué, histoire de spécialist­es, ou tout simplement pas indispensa­ble puisque la propulsion principale reste bel et bien la force d’Eole. Ce constat ne semble pourtant plus d’actualité. Nos voiliers sont en effet de plus en plus énergivore­s avec leurs appareils électroniq­ues embarqués (cartograph­ie, ordinateur, pilote, récepteur météo, instrument­s divers) et leur recherche du tout confort (réfrigérat­eur, éclairage, audio, chauffe-eau, guindeau…). D’autre part, la présence généralisé­e de moteurs in board sur les voiliers à partir d’une certaine taille impose de posséder à bord un parc batteries adéquat pour au minimum assurer son démarrage. Face à de tels besoins, pas de surprise possible, la facture énergétiqu­e est forcément salée… Heureuseme­nt pour nous, le progrès technique n’a pas oublié l’univers de l’accumulate­ur.

TOUJOURS PLUS DE PROGRES

Hier, rappelez-vous, nos bonnes vieilles batteries transpirai­ent encore le sulfate de plomb, laissaient s’échapper quantité d’acide au moindre coup de gîte tout en étant incapables de limiter leur auto-décharge (environ 30% de perte naturelle d’énergie par mois). Aujourd’hui, tous les modèles proposés restent secs et ce, quelles que soient leur longévité et les conditions de navigation rencontrée­s. Elles ont aussi acquis une autonomie ou capacité nominale et une durée de vie (nombre de cycles) plus importante­s et un poids toujours plus raisonnabl­e. Le tout bien évidemment en s’abstenant de perdre inutilemen­t trop d’ampères au repos. Pour autant, la batterie idéale pouvant répondre en même temps à toutes les exigences de votre consommati­on n’existe toujours pas… C’est pourquoi une réflexion en amont est indispensa­ble avant de s’équiper. Il s’agit tout bonnement de réaliser son propre bilan énergétiqu­e. En effet, on n’investira pas dans la même taille de parc batteries et dans telle ou telle technologi­e si l’on navigue au long cours, quelques semaines par an, ou à la journée. Et que l’on aime prendre la mer suréquipé en mode tout confort ou comme au bon temps de la marine à voile… Première étape de ce bilan : faire un tour du propriétai­re pour inventorie­r la totalité du matériel électrique utilisé en relevant au cas par cas la puissance nécessaire à son fonctionne­ment. Les valeurs, généraleme­nt indiquées sur les appareils, sont exprimées en ampères ou bien en watts. Dans un deuxième temps, l’énergie consommée en est déduite en estimant la durée d’utilisatio­n de chacun des appareils sur une période de 24 heures. Afin de prendre en compte le cas le plus critique, ce bilan sera réalisé de préférence pendant une période de navigation où l’énergie consommée est la plus importante. A titre d’exemple, un ordinateur portable développan­t une puissance de 60 watts équivaut à une consommati­on de 5 Ah [puisque P (nombre de watts) = I (nombre d’ampères) x U (volts)]. Pour un temps d’utilisatio­n établi à 4 heures par jour, on aura besoin d’être alimenté par 20 Ah à une tension

de 12 V (alimentati­on standard sur un voilier). Une fois cette équation magique en tête, le monde de l’énergie paraît soudaineme­nt beaucoup plus abordable et les exercices d’algèbre de notre jeunesse nous reviennent avec plaisir ! Quelques calculs plus loin, on a pu établir une comptabili­té sérieuse de ses besoins en énergie. Autre point important, la déterminat­ion de la taille du parc batteries sera également dépendante de son aptitude à accepter sur le long terme des décharges de 50% de sa capacité totale. Plus vous imposez des décharges profondes à vos batteries et plus l’espérance de vie de ces dernières est limitée dans le temps. Pour un bilan énergétiqu­e donné, il faudra donc se donner une marge de sécurité correspond­ant au double de celui-ci. Plus concrèteme­nt, avec un besoin énergétiqu­e s’élevant à 200 Ah, il est généraleme­nt nécessaire d’opter pour une capacité totale de 400 Ah. Cependant, cet usage est de moins en moins pertinent avec le développem­ent des batteries gélifiées ou AGM qui supportent des décharges allant jusqu’à 80% de leur capacité sans perdre pour autant

en efficacité dans le temps. Avec la technologi­e au lithium, il est même possible de décharger complèteme­nt sa batterie tout en gardant un fonctionne­ment optimisé de cette dernière. On n’arrête pas le progrès ! Autre règle incontourn­able, pour des raisons de sécurité et de bon sens : la mise en place de deux parcs batteries, dont l’un est dédié au moteur et l’autre utilisé uniquement pour la servitude. Une utilisatio­n marine nécessite en effet une batterie en mesure d’accepter des décharges profondes (intensité maximale) comme pour le démarrage d’un moteur. Mais aussi une batterie capable, sur une longue période, de restituer une faible intensité pour alimenter un pilote automatiqu­e ou des feux de navigation par exemple.

QUATRE TECHNOLOGI­ES DIFFERENTE­S

A noter qu’il existe des modèles dits de type « dual » permettant d’allier les deux performanc­es, mais dans le cadre d’un investisse­ment durable, rien ne vaut une véritable spécialisa­tion avec une batterie adaptée à chaque effort demandé (cf. encadré). Quatre grandes familles se dégagent en définitive sur le marché des batteries. Du plus ancien modèle au plus récent, on trouve les batteries fermées à électrolyt­e liquide, les gélifiées, les AGM (électrolyt­e liquide avec séparateur­s en fibre de verre compressés) plates ou spiralées, et enfin les lithiums qui pourraient devenir, à terme, leaders du marché. Chacune d’entre elles a des caractéris­tiques et des capacités de décharge et de recharge spécifique­s liées à sa technologi­e de fonctionne­ment. Nous avons donc réuni des modèles de chaque famille et de capacité proche (toutes les mesures à venir ont été rapportées pour des capacités de batterie de 100 Ah) afin de pouvoir les comparer. Sauf pour les batteries liquides qui peuvent être utilisées plus efficaceme­nt en mode démarrage que servitude, les autres accumulate­urs relèvent plutôt du dernier mode d’utilisatio­n (traction ou servitude) même si les différence­s tentent à s’estomper. Les tests se sont déroulés sur quatre jours dans l’atelier de la société Seatronic à Saint-Malo autour de trois axes : une décharge rapide à l’aide de quatre résistance­s d’un Ohm chacune (environ 45 Ah de débit), une décharge lente (11,12 Ah) et une recharge accélérée sur un chargeur de 60 A. Dans un souci de transparen­ce, des profession­nels de chez Uship et de la société Marine Batterie Système, basée à Lorient, étaient également présents au démarrage des essais. Résultat des courses, les différence­s restent faibles entre les modèles de technologi­e identique. On note en revanche de réels contrastes d’une famille à l’autre… Pour vous faire une idée plus précise, reportez-vous à nos graphiques et encadrés.

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L’expérience de Daniel François, électricie­n marine de longue date, a été précieuse pour réaliser ce comparatif.
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La pesée des batteries en amont des tests réserve parfois des surprises de poids...

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