Dériveurs à foils, où apprendre à voler ?
UNE CONCENTRATION DE TOUS LES INSTANTS
En voilier, windsurf, kitesurf, la navigation sur foil(s) devient plus accessible. A condition de justifier d’un bon niveau technique sur les supports « classiques », de bénéficier d’un cadre sécurisé et d’un matériel adapté. Tour d’horizon des offres disponibles en France. LE REVE DE S’AFFRANCHIR
du principe d’Archimède est déjà ancien. Dans la foulée du match des foilers géants opposant
Oracle et Alinghi en 2010, la 34e America’s Cup, en 2013, a mis sur le devant de la scène d’hallucinants catamarans à foils, les AC72. Ces régates à 40 noeuds ont fasciné les amateurs de voile. De quoi susciter des vocations ? Sans doute, car si les machines de la Coupe sont réservées à une élite de marins surentraînés, les pratiquants de bon niveau ne veulent pas rester simples spectateurs de la révolution foil. Nous sommes nombreux à émettre le souhait de découvrir les supports volants, pour ressentir cette sensation spéciale et unique de vitesse mélangée à un sentiment de légèreté, quand la coque ou le flotteur sort de l’eau et que l’appendice émet un léger sifflement. « On ne peut pas montrer l’élite de la voile s’éclater sur des bateaux volants et dire aux gens : “non ce n’est pas pour vous”. On ne peut pas aller contre le développement, contre l’envie des gens d’atteindre un rêve qui est de voler sur l’eau. C’est un mouvement impossible à stopper » assure Eric Flageul, formateur et entraîneur à l’ENVSN (Ecole nationale de voile et des sports nautiques), spécialisé dans la pratique du foil. Conscients du potentiel d’un nouveau marché, des constructeurs s’engouffrent dans le créneau et veulent s’adresser à de nombreux amateurs (éclairés), en proposant des produits qui se veulent plus accessibles financièrement et techniquement. Mais si cette démocratisation est régulièrement évoquée, on est en droit de se poser quelques questions : les nouveaux foilers sont-ils aussi accessibles que le prétendent les marques ? Quels sont les prérequis pour se lancer ? Comment découvrir et progresser sans se faire peur ? Nous l’avons constaté en testant différents supports : le niveau d’entrée pour accéder au vol n’est pas délirant, à condition de remplir certains critères, à commencer bien sûr par un solide niveau technique sur les supports archimédiens et une bonne forme physique. Les engins volants nécessitent par ailleurs une concentration de tous les instants, surtout au début. Il faut rester aux aguets, ce qui est usant nerveusement. « Si on n’a pas un niveau de pratique minimum, on fait face à plusieurs risques : la blessure, la frustration de ne pas réussir à voler, la casse de matériel » prévient Olivier Sanz, directeur adjoint de la base des Glénans de Concarneau, qui a récemment ouvert un stage Sensations. Naviguer sur foil nécessite par ailleurs un équipement spécifique. En plus du gilet et de la combinaison intégrale (la plus épaisse possible), casque et chaussons sont de rigueur, le principe étant de laisser le moins de peau apparente pour limiter les risques de coupure par les appendices. Et bien sûr, il est essentiel d’apprendre dans des conditions de vent et de mer adaptées, les plans d’eau plats étant naturellement un plus pour progresser sereinement. Les pratiquants attirés par le foil sont souvent aguerris en voile et habitués à naviguer de manière autonome. Ils ont donc tendance à essayer de se lancer seuls dans l’apprentissage du vol. Mais ce n’est pas forcément la meilleure stratégie car ces nouvelles activités doivent être abordées avec humilité. Pour débuter sans heurts, il est impératif d’établir un cadre propice à la progression et à la sécurité, le plus gros risque étant de vouloir brûler les étapes. On ne saurait trop conseiller d’être encadré par des professionnels, et donc de passer par des écoles de voile. La pratique sur foil se répand sur nos plans d’eau et donne un coup de jeune aux activités nautiques. Les écoles de voile ne veulent pas manquer ce virage et cette révolution des usages. Mais elles doivent pour cela travailler sur des techniques d’encadrement spécifiques avec notamment des groupes resserrés, pour un coaching plus individualisé et un suivi plus poussé. Le chemin est encore long pour que les écoles de voile deviennent des écoles de vol, notamment en raison de l’aspect financier : naviguer sur ces nouveaux engins coûte cher, ce qui constitue pour beaucoup un vrai frein aujourd’hui... Mais les choses bougent petit à petit et certaines structures font un pari sur l’avenir en proposant des stages sur foilers.