Voile Magazine

Vif, mignon et malin!

- Texte : F.-X. de Crécy. Photos : P. Contin.

LORS DE NOTRE ESSAI, c’était la première navigation dans les eaux françaises de ce petit croiseur néoclassiq­ue à coque polyester construit depuis maintenant trois ans par le chantier Cornish Crabbers. Quatre Shrimper 21 ont été importés depuis par Saint-Briac Nautic, portant la série à une diffusion prometteus­e de 82 unités. Un bon début pour le chantier de Cornouaill­es qui ne devait pas se rater en lançant le Shrimper 21, or la barre était haute ! Le Shrimper historique, ou Shrimper 19, dessiné par le même Don Gray et lancé par le même chantier en 1979 et diffusé à plus de 1 200 unités, est en effet l’objet d’une dévotion toute particuliè­re outre-Manche. Une sorte de Muscadet britanniqu­e… Le Shrimper 21, son héritier naturel, devait donc prendre le meilleur de la modernité sans laisser en chemin ni le charme inhérent à ces formidable­s canots néotraditi­onnels ni leurs indéniable­s qualités nautiques. Côté charme, aucun doute à avoir : l’adorable silhouette du nouveau Shrimper, soulignée par le liston et l’habillage d’hiloire en bois massif et prolongée par le bout-dehors et le safran rapporté en bois verni, parle d’elle-même. Tout comme le gréement houari militaire en spruce, qui fait toujours son petit effet ! Nous avons hâte de l’utiliser pour vérifier que le Shrimper n’a rien perdu de sa vivacité. Mais avant d’envoyer la toile, il nous faut lancer l’inénarrabl­e monocylind­re Yanmar placé sous un panneau en fond de cockpit. Yanmar dont le régime lent peut évoquer soit le départ du fileyeur à l’aube, soit le ralenti d’une Harley-Davidson : c’est selon. N’empêche que c’est un sacré confort de ne pas avoir à démarrer un vulgaire hors-bord ! L’envoi de la grand-voile avec son pic ne pose aucune difficulté, l’espar en spruce est léger et la manoeuvre fluide. A l’abattée, l’accélérati­on est immédiate.

UN GREEMENT PUISSANT AU PORTANT

Notre Shrimper se révèle vif et amusant à mener sous son gréement houari dont la puissance fait merveille à cette allure. Pleinement satisfaits, nous tirons quelques bords de près, pour voir comment se comporte notre Shrimper. Toujours aussi vif, il salue largement les rafales qui nous semblent soudain plus fraîches. Il faut souvent réguler à la grand-voile – le chariot placé sur le tableau arrière est là pour ça –, comme toujours avec ces gréements houari au centre de voilure très reculé. On peut aussi jouer du pic pour faire dégueuler le haut de la grand-voile… C’est tout un art du gréement à l’ancienne, avec ces voiles plates dont il faut sans cesse travailler le volume. A partir de 12 noeuds de vent, il faut placer l’équipage au vent pour bien naviguer au près… La pièce de bois qui élargit le dessus de l’hiloire de cockpit est faite pour ça, et la barre est équipée d’un stick. A partir de 17 noeuds, il faut réduire la grand-voile. Mais notez que le cockpit bien proportion­né reste confortabl­e à la gîte : on se cale facilement du pied sur le banc opposé. Il est en outre remarquabl­ement protégé par la haute hiloire sur laquelle s’adossent barreur et équipiers, et qui circonscri­t la totalité de la zone de manoeuvre. Toutes les manoeuvres reviennent en effet à ce spacieux cockpit et on aura rarement l’occasion de gagner la plage avant en navigation ; raison pour laquelle on se passe très bien de filières – mais les lignes de vie sont bien là. Le Shrimper 21 est échouable à plat après avoir relevé la dérive, évidemment, mais aussi le bas de safran qui pivote comme celui d’un Ovni. Il est également très simple à démâter sans même démonter la bôme, puisque le vît-de-mulet est solidaire de la jumelle de pied de mât. Il suffit de donner du mou à la sous-barbe, et le mât peut basculer en arrière tandis que le bout-dehors se soulève au-dessus de la baille à mouillage ouverte. Génial ! L’autre bonne surprise, c’est l’intérieur très spacieux et remarquabl­ement fini. VHF fixe à tribord, côté tableau électrique, petit carré cossu autour du puits de dérive – les couchettes cercueil formant banquette –, tout y est. Même le réchaud intégré, deux feux s’il vous plaît, et les toilettes (chimiques) placées sous la couchette avant. Ce petit côté cosy n’est pas pour nous déplaire et le Shrimper 21 s’affiche comme un vrai croiseur de poche. Un dernier conseil si vous êtes intéressé : surveillez de près le cours de la livre sterling. Le taux de change peut faire une différence considérab­le mais quand la livre baisse durablemen­t, le chantier réajuste ses prix à la hausse pour ne pas en subir l’impact sur ses propres achats (une hausse semble d’ailleurs imminente). A bon entendeur…

Livet en massif, espars en spruce verni... mais coque en polyester.

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Ce gréement houari est dit militaire parce que son pic est souvent au garde-à-vous !
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 ??  ?? Une fois assis, on a toute la hauteur sous barrots nécessaire dans le carré.
Une fois assis, on a toute la hauteur sous barrots nécessaire dans le carré.
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Les couchettes cercueil d’un gabarit généreux se glissent sous le cockpit.
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Le triangle avant offre une belle surface matelassée pour deux enfants.

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