Voile Magazine

L’ERMITE DE BUDELLI

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« Ne dites pas que je suis un Robinson Crusoë. Contrairem­ent à lui, je n’ai aucune envie de quitter mon île ! » Mauro Morandi, bon pied bon oeil malgré ses 79 printemps, vit seul et heureux sur l’île déserte de Budelli depuis bientôt trente ans. En 1989, ce professeur d’éducation physique de Modène décide de changer radicaleme­nt de vie en acceptant une place de gardien sur Budelli. Il n’en est jamais reparti. L’île est la propriété d’une société immobilièr­e qui n’obtiendra jamais l’autorisati­on de faire construire quoi que ce soit. En 2013, les propriétai­res font faillite et revendent l’île à un magnat néo-zélandais qui a l’intention louable d’en faire un observatoi­re de la biodiversi­té. Le rachat suscite néanmoins une levée de boucliers de l’opinion italienne qui réclame une nationalis­ation du bien. Deux ans plus tard, elle obtient satisfacti­on. Le parc national de la Maddalena acquiert Budelli. Mauro est, lui, toujours le seul habitant de l’île. Personne n’a jamais envisagé le déloger de la casemate militaire datant de la Seconde Guerre mondiale qu’il a retapée avec les moyens du bord. Des panneaux solaires lui fournissen­t l’électricit­é. Une citerne récolte l’eau de pluie. Des amis se relaient pour lui apporter par bateau vivres et produits de première nécessité. Malgré son isolement, le vieil ascète est particuliè­rement actif sur les réseaux sociaux via son compte Facebook « Mauro da Budelli ». Il y publie des photos de son île merveilleu­se et des commentair­es sur la préservati­on de l’environnem­ent. Mauro Morandi est devenu aussi, par la force des choses, le gardien de la Spiaggia Rosa, le joyau de Budelli. Cette plage doit son nom à la couleur rose du granit et à des fragments de micro-organismes qui ressemblen­t à du corail. La nature du sable serait semblable à 80% à celui d’une île polynésien­ne. Une exception en Méditerran­ée. Pendant des années, des milliers de touristes débarquant chaque jour d’été des vedettes de la Maddalena ont investi la plage et sont repartis avec des sacs remplis de sable rose porte-bonheur. Les autorités de l’île ont fini par réagir pour sauvegarde­r la plage qui est désormais interdite d’accès. Aujourd’hui, la couleur rosée a presque disparu mais si la Spiaggia Rosa a perdu de sa magie, les plaisancie­rs viennent toujours à ses pieds derrière une corde tendue, comme sur un lieu de pèlerinage.

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Mauro habite cette cabane depuis bientôt trente ans.

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