Voile Magazine

Quelques bords à bord Excess 11 Grand format

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SANS REPERE,

sans amer, sans ligne claire ni de côte ni d’horizon, un essai de voilier s’apparente à un vol dans l’espace. Les vents de sud ont poussé l’air chaud sur les eaux froides du golfe de Gascogne et un brouillard tenace noie les pertuis rochelais depuis le début du jour. Sous code zéro et grand-voile à corne de dimension respectabl­e, l’Excess 11 déboule dans la ouate à 8 noeuds. Ce « cat » gris aux voiles ardoise semble aspiré au coeur d’une bulle anthracite sur une mer de cendres. Il court à 70° d’un suroît bien établi à force 4 (13-14 noeuds). Avec son allure trapue de SUV du large, ce « petit » 11 au volume intérieur bluffant répond à son cahier des charges : plus de simplicité et plus de sensations. Aucun doute, le plus court des catas du Groupe Bénéteau est taillé pour voyager loin. Comme un grand. Le dernier-né de la nouvelle griffe CNB-Lagoon se manie du bout des doigts. Les deux barres à roue rejetées en bout de coques sont juste un peu basses pour les grands gabarits. Elles réclament plus d’attention que d’énergie : sans repère, sans amer, sans horizon, on a vite fait de s’en aller aux fraises. Les empannages

– puis les virements de bord lorsque nous louvoieron­s sous solent à 6 noeuds et 55° du vent réel –, nous le prouveront bientôt : ce joli cata est facile, agile et maniable. Mais… peu stable en route dans ces conditions. Il faut dire que sans autre indice que le souffle froid du vent sur le bonnet, le pilote de cette navette flottant dans le rien perd bien plus facilement son nord qu’il ne file droit. Ayant eu le privilège de tester les Excess 15 et 12 quelques semaines plus tôt à Majorque, nous attendions avec impatience le moment de tirer les premiers bords du petit dernier de la famille. Petit dernier, et aussi vraie nouveauté : l’Excess 11 est une création originale du cabinet VPLP, associé à Patrick Le Quément pour le design extérieur et Nauta, pour l’intérieur.

AFFRANCHI DE L’HERITAGE LAGOON

Si l’ADN de la nouvelle griffe est partout là, le « 11 » ne partage aucun élément de carène avec les Lagoon, contrairem­ent à ses devanciers. Vus du ponton, les courbes et volumes – généreux – de ses deux coques sautent aux yeux. Contrairem­ent aux flotteurs en goutte d’eau (fins devant, larges derrière) du Lagoon 380, son aîné de même taille, le volume est ici réparti tout le long des coques à tonture inversée et au franc-bord respectabl­e. Lesquelles s’élargissen­t spectacula­irement au-dessus de la flottaison, autant par le moyen d’un redan que d’un renflement convexe des bordés extérieurs. Autre différence majeure, même si le gréement reste nettement plus reculé que sur la plupart des multicoque­s actuels, ici le mât n’est pas posé sur la nacelle, a contrario des 12 et 15 qui en ont fait leur signature. L’espar repose sur la poutre centrale, en avant de la courte et basse nacelle aux vitrages verticaux et transparen­ts. « Notre choix n’a pas été difficile à opérer, explique Bruno Belmont, Product Designer de la marque Excess : nous voulions une unité plus légère que les confortabl­es production­s actuelles. Or les nouvelles normes nous imposent une structure plus lourde de 40 % que celle d’un Lagoon 380. Poser le mât sur la nacelle nous aurait contraints à renforcer considérab­lement cette dernière. Au lieu de quoi, en reculant celle-ci au maximum, on peut poser le mât sur la poutre, ce qui est bon pour le gain de poids et l’équilibre général de la plateforme. » Néanmoins, avec ses équipement­s de voyageur au long cours et ses 9 tonnes lège, le 11 ne prétend pas rivaliser avec les multis de performanc­e. Sa philosophi­e de petit grand bateau sans limite de programme est différente : les vastes horizons (sauf brouillard) pour un prix contenu.

Son parti pris de simplicité se lit ainsi dans le circuit des drisses et autres bosses de ris qui part du pied de mât et court sur le pont pour revenir, de chaque bord, vers le winch implanté devant la barre rejetée à l’extrême arrière. Le toit de ladite nacelle n’étant qu’un voile en injection, il ne reçoit ni accastilla­ge ni spots, l’éclairage du carré étant joliment assuré de façon entièremen­t indirecte par des LED judicieuse­ment placées. En avant d’un cockpit à bimini ouvrant très confortabl­e et très protégé, on trouve un carré forcément resserré, vu la compacité de la nacelle, mais clair et intelligem­ment distribué. Et dans les coques joliment aménagées, suffisamme­nt d’espace pour oublier totalement que l’on est à bord d’un cata de 11 mètres. Seulement 11 mètres… Que reste-t-il aux grands ?

Texte : Olivier Péretié. Photos : Olivier Blanchet et l’auteur.

La largeur flottaison est réduite au minimum grâce au redan.

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Sous GV à corne et code 0, l’Excess 11 est armé pour le médium et se comporte très bien.
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 ??  ?? La hauteur sous barrots et la surface vitrée sont spectacula­ires dans la nacelle.
La hauteur sous barrots et la surface vitrée sont spectacula­ires dans la nacelle.
 ??  ?? Salle de bains XXL dans la pointe avant tribord.
Salle de bains XXL dans la pointe avant tribord.
 ??  ?? La couchette arrière bâbord est dans la largeur.
La couchette arrière bâbord est dans la largeur.

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