La fin des empires
Comme les civilisations, les empires savent qu’ils sont mortels. Afin de bien montrer le caractère parfois éphémère de ces constructions apparemment puissantes, Patrick Gueniffey et Thierry Lentz se sont entourés des meilleurs spécialistes qui, chacun dans leur domaine de prédilection, racontent la fin de ces édifices colossaux. Les empires finissent des manières les plus diverses, parfois victimes de règles de succession inadaptées (empire mongol), ou proie d’un adversaire jaloux et dominateur (empire byzantin), usé par la vieillesse (empires chinois) et ainsi de suite. Le temps nécessaire à la disparition d’un empire est lui aussi très variable, de la « longue agonie pour l’Empire byzantin » à la « lente maladie de langueur pour le Saint Empire germanique ». Agrémentées de cartes très pédagogiques, les vingt contributions figurant dans ce copieux volume donnent idée de l’éternel recommencement que semble être l’idée impériale. Après un empire, un autre empire, et ainsi de suite. Si certaines conquêtes furent circonstancielles, sans but autre que d’accroître son propre territoire, d’autres tâchèrent de concrétiser le vieux rêve d’une humanité unie dans un monde sans frontières, une humanité enfin en paix et réconciliée avec ellemême. Soumise à des contradictions incontrôlables, l’idée impériale a été incapable de survivre à la diversité et aux particularismes. Les hommes tiennent rarement à avoir un seul gouvernement, un même Etat, avec les mêmes lois et des moeurs identiques. C’est ainsi que, pour reprendre le célèbre mot de Paul Valéry, les empires, tout comme les civilisations, se savent mortels. Et aujourd’hui ? « Quant aux rêves d’empires, écrivent P. Gueniffey et T. Lentz dans la préface, ils se sont évanouis, si longue eût été leur durée, tout comme le songe de la paix universelle qu’ils ont, plus que tout autre régime, incarné. »
Sous la dir. de Patrice Gueniffey et Thierry Lentz, La fin des empires, Perrin, 2016, 474 pages, 22 €