Découvrez les insolites du centre René Rémond
Crocodile, statuettes en or venues de Colombie ou encore mosaïque de Carthage, les acquisitions insolites sont nombreuses.
Le Centre de Conservation et d’Étude René-Rémond, perdu aux confins de la zone industrielle lédonienne, au 133 rue René-Maire, cache bien des secrets dans ses sous-sols. Des trésors cachés que, de concert, leurs gardiennes avouent être frustrées de ne pouvoir partager. Sylvie Deschamps ; responsable des collections d’histoire naturelle, Dorothée Gillmann ; responsable des collections Beaux-arts, et Sylvie Jurietti ; responsable des collections d’archéologie, veillent chacune sur des centaines de pièces, acquises pour le plus grand nombre au XIXe siècle. « C’est à cette époque que le musée de la ville se développe et que les gens voyages beaucoup à travers un monde encore méconnu. Chacun ramène alors de son voyage un souvenir qu’il lègue au musée, pour le prestige de ce dernier. » Le musée, qui accepte à cette époque tout, et parfois n’importe quoi, se retrouve alors avec une collection foisonnante, mais quelque peu hétéroclite, d’objets variés venant des quatre coins du monde.
Ara d’Amérique et crocodile de Madagascar
Parmi ces acquisitions nombreuses, qui pour la plupart dorment dans les sous-sols du centre René-Rémond dans l’attente de pouvoir être un jour exposées au grand public, la responsable des collections d’histoire naturelle présente, avec un plaisir non dissimulé, ses deux « mascottes », à savoir un ara d’Amérique du sud et un crocodile de Madagascar, tous deux naturalisées au XIXe siècles, et récemment restaurées. « Pour le moment, nous n’avons aucune idée de leur provenance respective. Nous allons devoir éplucher nos archives, et comme Sherlock Holmes, remonter la piste de leurs origines », explique Sylvie Deschamps. Tortue marine fossilisée de 40 kg vieille de plus de 180 millions d’années, herbiers rares, coquilles de crustacés et autres insectes, attendent donc pour certains, d’être restaurés, puis étudiés, avant de pouvoir être exposés, « d’ici quelques années peut-être », espère la responsable des collections d’histoire naturelle.
Un désir nettement partagé par sa collègue Sylvie Jurietti, responsable des collections d’archéologie ; « cela fait plus de 10 ans que nous n’avons pas présenté notre collection archéologique. » Une collection pourtant bien vivante qui continue à évoluer et à être étudiée. « Au début des années 2010, nous avons reçu de la part de copropriétaires de Saint-Claude, un pavage en os de boeuf, d’environs 1 m2, daté entre le XVIIe et le XIXe siècle, que nous venons tout juste de faire restaurer. Cette pièce, insolite, est parfaitement intéressante, car typiquement locale. Nous allons donc désormais pouvoir l’étudier. » Entre autres pièces insolites que possède le fond archéologique, comme cette épée et ses harnachements pour chevaux datant de 900 avant JC, retrouvés dans une nécropole dans les années 70, certaines ne se révèlent que bien des années après leur entrée au centre. C’est le cas, entre autres, d’un simple petit tesson de céramique retrouvé dans les années 60 à Montmorot. « À l’arrière de ce morceau de céramique datant de 600 avant JC, une écriture est marquée. Mais ce n’est que dans les années 2000 qu’un chercheur spécialisé dans les écritures a reconnu cette écriture en tant que telle, expliquant que sa présence était exceptionnelle pour une époque où l’écriture, normalement, n’existait pas encore dans nos contrées. »
Statuettes en or de Colombie
Du côté des collections Beaux-arts, la notion d’insolite, voir d’exceptionnelle, est plus variante, bien que malgré tout présente. « L’insolite évolue en fonction de la perception que l’on a des artistes et des recherches que l’on fait sur les objets », précise Dorothée Gillmann, responsable dudit fond. Ainsi, l’étude constante des oeuvres et des objets d’art permet d’en définir l’attrait scientifique ; comme lorsqu’en août dernier, une chercheuse Colombienne venue tout droit de Bogota, est arrivée au Centre de Conservation et d’Étude René-Rémond pour étudier des petites figurines en or datant du XVIe siècle, issue de son pays, et conservées à Lons-le-Saunier.
Entre autres oeuvres insolites, ou du moins originales, ce sont celles du fond Perraud, dont Dorothée Gillmann semble le plus fière, et plus particulièrement, les cahiers de dessins préparatoires que l’artiste a légué au musée à sa mort. « C’est le genre d’objet qu’on ne montre jamais, car bien trop sensible à l’exposition, mais qui mériterait pourtant d’être connu, car ils possèdent un réel intérêt artistique. L’idéal serait par exemple de pouvoir les numériser afin que le public puisse se les approprier. »
Autant de secrets que le centre ne demande donc qu’à partager avec le grand public, mais qui, faute de place et de moyens, continueront de dormir en son sein durant encore plusieurs années.