Le carnet de grève d'Anne-Sophie Pelletier
Le vendredi 28 juillet, les grévistes des Opalines de Foucherans signaient un accord. Leur porte-parole prépare un livre retraçant 117 jours de grève, de rencontres, de doutes et de lutte.
Anne-Sophie Pelletier, aide médico-psychologique, et ancienne porte-parole des grévistes des Opalines a entamé un récit au jour le jour d’un combat de prés de quatre mois pour lever le voile sur les conditions de prise en charge des résidents dans les EHPAD. « J’ai commencé alors que la grève était encore en cours, j’ai écrit le début, puis la fin, avant de reprendre le récit », explique-t-elle. L’ancienne gréviste s’appuie sur ses souvenirs et les nombreux articles de presse qu’elle a conservés. Le manuscrit, qui compte pour l’instant 140 pages, s’arrête au 15 juin. « Je vais essayer de le terminer rapidement, deux éditeurs pourraient être intéressés », précise-t-elle. Le titre du premier chapitre donne le ton : Utopique et naïve.
« Il a fallu digérer tout ce qui s’était passé, tout s’est arrêté d’un coup, ça a été très brutal ». Anne-Sophie Pelletier, porte-parole du mouvement social, n’a pu se résoudre à reprendre le travail. « Je retournerai faire mon métier aux Opalines, je n’abandonnerai pas le navire. Pour s’occuper correctement des résidents, il faut que le soignant aille bien ». L’aide médico-psychologique est en arrêt de travail :
« J’ai eu l’impression d’être comme une candidate de téléréalité qui sort de sa bulle et revient dans le monde réel. J’ai pris des coups, je vois régulièrement un professionnel pour parler ». Le sas de décompression d’un mois prévu lors de la sortie de grève n’aura pas suffi. Et même si les quelques jours dans un centre de vacances à Mouthe cet été, avec une partie de ses collègues, lui ont fait du bien, la blessure n’a pas encore cicatrisé. « Vous vivez ensemble pendant 117 jours, et après plus rien, on se retrouve seule du jour au lendemain, c’est compliqué ». L’ex porte-parole n’a plus beaucoup de contacts avec ses collègues mais elle reçoit encore de nombreux soutiens : « Des anonymes, des journalistes ou encore des élus prennent des nouvelles. Ça fait du bien. » « Je mangeais, je vivais et je dormais grève. En rentrant du piquet, je passais encore des heures à démarcher des journalistes. À la fin j’étais à bout mais je suis fière de ce que l’on a accompli », se remémore Anne-Sophie Pelletier. Elle retient aussi la solidarité et la gentillesse d’anonymes venus simplement discuter, prendre un café ou soutenir financièrement le mouvement. « Les voisins des Opalines par exemple nous ont spontanément proposé leur garage pour gérer la logistique tous les jours. Ce sont des choses qui marquent ». Les souvenirs, les anecdotes qu’elle couche sur son clavier, se comptent par dizaines. « On a participé toutes ensemble à la messe des rameaux et le curé a dit un mot pour nous », se souvient-elle.
Anne-Sophie Pelettier avait déclaré, très émue, lors de la signature des accords de fin de grève : « Ce n’est pas la fin d’un mouvement mais le début d’une autre histoire ». Une formule qui pourrait rapidement trouver un sens nouveau puisque l’ex-gréviste envisagerait de se présenter aux élections européennes en 2019.