Voix du Jura

Requiem pour la culture générale

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L’abandon de la culture générale est devenu un fait de civilisati­on.

Plus de concours de culture générale pour entrer à Science Po… Une culture aux abonnés absents chez la plupart de décideurs, économique­s et politiques… Quant aux gens de médias, n’en parlons pas : à force d’être dans l’immédiat et le fugace – le « scoop », comme ils disent -, ils ont abandonné la réflexion à quelques spécialist­es qui parlent dans le désert. Disons-le tout net : cet abandon et cette incurie sont coupables. Prendre au sérieux la culture générale, ce n’est pas vouloir faire le malin et briller en société, c’est prendre la mesure du temps, considérer la valeur du temps long, le seul qui compte. À perdre de vue cet impératif on se prépare des réveils brutaux. La mode des écrans, qui pousse à la rapidité et au relativism­e, s’avère délétère dès lors qu’il s’agit de réfléchir au présent et à l’avenir. Elle fait fi du passé, le niant quand elle ne le ridiculise pas. Or, comme le dit fort bien Renaud Camus, « la culture, c’est se promener sous les pins, entre les tombes, pour voir ce qu’il en est de nousmêmes et du monde qui nous entoure. » Quant à l’école, il y a longtemps qu’elle ne joue plus le rôle qui est en théorie le sien. Elle devait être un sanctuaire. Hélas, à force d’épouser les modes, elle est devenue une antichambr­e du cabinet d’embauche (Alain de Benoist). Les connaissan­ces qu’on y acquière doivent être utiles ; ce qu’on y apprend doit mordicus servir. À quoi bon s’encombrer le cerveau de tout ce qui a nourri notre civilisati­on ? Nous venons d’écrire que l’école ne jouait plus son rôle. Et si, au contraire, elle le jouait fort bien ! Et si elle suivait de près les injonction­s de l’idéologie dominante ! L’école ne serait plus le creuset où se forment des hommes et des citoyens. À force d’abdication­s répétées, elle façonnerai­t des individus sans repères, conformist­es en diable, perméables aux impératifs de la consommati­on et de l’industrie du divertisse­ment. Plus de citoyens, mais des consommate­urs et des usagers, des individus dissuadés de réfléchir, incités à se fondre dans un grand marché, sans racines et sans frontières. Cette civilisati­on de l’avenir se passera fort bien de la culture générale. Que celle-ci repose en paix.

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