POLéMIQUE. Y a-t-il trop de lynx dans le Jura ?
Deux sujets assez peu consensuels inquiètent les éleveurs du Jura : le loup et le lynx. Un lynx bien présent dans le Jura. Peut-être trop aux yeux des éleveurs, qui se plaignent d’attaques de troupeaux…
C’est un dossier sensible car l’animal doit avoir autant de défenseurs que d’opposants dans le Jura. Mais le fait est que le lynx agace les éleveurs, qui font état d’attaques de troupeaux et demandent sa régulation.
Le sujet s’est invité lors de la session de la chambre d’agriculture, lundi 27 novembre. Nicolas Saive, le président des Jeunes agriculteurs a ainsi évoqué plusieurs attaques constatées à Nogna et Etival. « A Nogna, c’est un jeune veau qui a été attaqué par deux lynx et il y a beaucoup de petites attaques occasionnelles, dont on parle peu, car elles sont difficiles à recenser. » A Etival, le troupeau de 42 têtes d’un éleveur de moutons aurait subi 19 attaques d’une femelle lynx et ses trois petits. Ce qui inquiète les éleveurs, qui craignent qu’elle « soit en train de les former ». Et pour les agriculteurs, qui soulignent que « l’éleveur en question est particulièrement calme vu la situation », « on parle beaucoup du loup, mais peu du lynx, parce que c’est une icône dans le département. » D’ailleurs, à leurs yeux, « si sept lynx ont été retrouvés morts en 2017, c’est parce qu’ils sont nombreux dans le Jura… » D’où une demande exprimée auprès du Préfet pour en réguler l’espèce.
Une demande qui aura certainement du mal à être entendue par les services de l’État, la France étant signataire d’une convention internationale de protection de l’animal. De plus, estime Gilles Moyne, du centre Athénas, « cela relève du phantasme ! » Et de développer : « depuis 20 ans, la population de lynx n’augmente pas, on estime qu’il y aurait entre 100 et 120 individus cantonnés dans le massif du Jura et c’est tout. Ils ne sont donc pas surnuméraires. D’ailleurs les lynx ont un territoire donné, ils ne s’empilent pas, ils sont obligés de s’étaler. »
Pour lui, l’attaque du veau à Nogna « ne peut pas être attribuée au lynx » : « l’animal a été mangé par des charognards, un lynx a été observé dans les parages, mais rien ne permet de lui attribuer l’attaque. Ce serait d’ailleurs une première qu’un lynx s’attaque à un veau ! » La situation est différente en ce qui concerne les ovins d’Etival : « il y a effectivement un problème dans cette exploitation avec cette zone située en prébois ou les moyens de dissuasion peuvent fonctionner plus ou moins bien. » Il n’a pas d’inquiétude non plus quant au « mauvais exemple » qui serait donné par la mère à ses petits en s’attaquant aux moutons : « on l’a constaté avec l’affaire de la femelle tuée d’une balle sur Mirebel. Ensuite, les jeunes n’ont plus fait parler d’eux. » En conclusion, Gilles Moyne voit dans le débat qui s’est déroulé à la Chambre d’agriculture une « prise de position syndicale » plutôt que la mise à jour d’un réel problème. « Mais dans tous les cas, on ne peut pas dire que le nombre de lynx percutés par les voitures laisse présager d’une population en forte hausse. »
Quant aux chasseurs, ils restent prudents sur le dossier. « Nous travaillons avec de nombreux partenaires scientifiques sur un projet Prédateurs Proies Lynx sur le Jura l’Ain et la Haute-Savoie », explique Stéphane Lamberger, le directeur de la Fédération Départementale des Chasseurs du Jura. « Pour l’heure, nous sommes plutôt à l’initiative et à la coordination d’un projet très technique. » Et d’annoncer qu’un article sur le sujet sera publié dans le prochain numéro du chasseur Jurassien (décembre). À suivre, donc.