Le 80 km/h, c'est pour bientôt ?
Le projet suscite déjà des oppositions
Ce lundi, le Premier ministre, Édouard Philippe, était en déplacement en Seine-et-Marne pour suivre un contrôle routier et rencontrer des automobilistes et des blessés de la route. L’occasion pour le Premier ministre de se dire, « à titre personnel » favorable à la baisse des limitations de vitesse de 90 à 80 km/h sur les routes départementales et nationales. Une mesure qui pourrait cependant susciter de nombreuses protestations à travers le pays, les associations d’usagers étant vent debout contre la mesure.
Pour Edouard Philippe, les chiffres de la sécurité routière ne sont « pas une fatalité », alors même que le nombre de morts a bondi de 8,9 % en novembre, avec 281 tués dans le pays. « Je ne me satisfais pas d’un nombre si élevé de victimes. Le gouvernement a décidé de prendre le problème à bras-le-corps », affirmé le chef du gouvernement après avoir rendu hommage à « l’impulsion très forte » commencée aux débuts des années 2000 sous le mandat de Jacques Chirac. Et s’il n’a pas souhaité détailler le plan qui sera dévoilé en janvier, il s’est dit « favorable » à une baisse de la vitesse sur les axes sans séparation « car deux tiers des accidents se concentrent sur ces routes ». Mais, a-t-il aussi indiqué, « les décisions seront prises après délibérations. »
Lundi, en réaction à cette déclaration d’Édouard Philippe, l’association « 40 millions d’automobilistes » a rappelé qu’elle s’oppose fermement à cette mesure, qu’elle estime inefficace. Sa pétition comptait déjà plus de 400 000 signataires. Et d’expliquer : « En 2013, Manuel Valls, alors ministre de l’Intérieur, considérait que cette mesure permettrait de « sauver 450 vies ». Pour soutenir cette allégation, le ministre invoquait le « théorème de Nielsson » selon lequel une réduction de 1 % de la vitesse permettrait une réduction de 4 % de l’accidentalité. Or, ce théorème est complètement faux. Il suffit de regarder ce qu’il se passe chez nos voisins pour s’en convaincre : les Britanniques roulent à 97 km/h et ont moins d’accidents ; les Allemands à 100 km/h et dénombrent moins de tués sur les routes. Pourquoi faut-il toujours que la France se pose en exception et n’agisse en matière de sécurité routière que par la répression et la sanction ? »
Pour appuyer sa contestation, l’association se base aussi sur un sondage « Le Parisien / Aujourd’hui en France », paru en avril 2015, montrant que 74 % des Français étaient opposés aux 80 km/h sur le réseau secondaire, et s’étonne que le Gouvernement n’ait pas publié les résultats de la seule une expérimentation de la baisse vitesse, sur 3 portions de routes. « Ce silence laisse plus que perplexes quant aux résultats mesurés sur ces tronçonstests. Il y a fort à parier que rien de concluant n’est sorti de cette expérimentation et que le travail de communication qui est réalisé aujourd’hui par le Premier ministre vise à endormir l’opinion publique avant de faire passer la mesure en force d’ici quelques semaines. »
Ce projet de baisse de la vitesse était également à l’ordre du jour de la réunion des Motards en colère du Jura, vendredi dernier à Lons-le-Saunier. Et sans surprise, les motards du Jura y sont opposés. « Mais il ne faut pas croire pour autant que les motards sont des irresponsables, toujours la poignée dans le coin », explique Alain Mazzier, le coordinateur de la FFMC39. Lors de la réunion, la « dangerosité » de cette mesure pour l’ensemble des usagers et son coût, pour le changement de tous les panneaux, ont été évoqués. Les parlementaires du Jura vont être interpellés par les motards, qui invitent l’ensemble des usagers, motards et automobilistes, à signer massivement la pétition de la FFMC, « parce qu’en 2014, c’est la mobilisation des motards qui a fait reculer le gouvernement et qu’au final, ce sont les motards qui seront dans la rue pour s’opposer à cette mesure. » Craignant un passage en force de la Sécurité routière, la FFMC pense que derrière cette mesure se trouve « la rentabilité des radars », déjà mise à mal par un rapport sénatorial qui fustige l’utilisation des fonds récoltés. D’autant, ajoute Alain Mezzier, « que cela va s’accompagner de la privatisation des contrôles, avec des véhicules qui vont tourner 24 heures sur 24. » Et de conclure, « si la mesure passe, c’est sûr : les motards seront dans la rue. »