Voix du Jura

Tout l’argent du monde, de Ridley Scott

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Le dernier opus du réalisateu­r de Blade Runner nous replonge dans une sordide affaire qui fit la Une des tabloïds en 1973. Il s’agit de l’enlèvement, à Rome, du petit-fils « préféré » de celui qui était alors l’homme le plus riche du monde : John Paul Getty I. La rançon demandée pour sa remise en liberté est de 17 millions de dollars, soit un trait de plume pour le puissant magnat du pétrole. Sauf que voilà, cet homme, dont l’avarice est légendaire, refuse de payer sous le prétexte que, s’il cède une fois, il met en péril ses autres quatorze petits enfants. Ce qui, en toute logique, n’est pas fondamenta­lement faux, il faut le reconnaîtr­e. Le gamin restera otage de ses ravisseurs pendant plus de 6 mois. Ces derniers iront jusqu’à lui trancher une oreille qu’ils enverront à un grand journal italien, afin de décider le patriarche à payer une somme qui, entre-temps s’est réduite, si l’on peut dire, à 3 millions de dollars. Un montant qu’accepte enfin de débourser John Paul Getty I pour la bonne raison que ce montant… est le maximum déductible de ses impôts ! Le film nous retrace la longue lutte de Gail, la mère de John Paul Getty III, lutte contre son beau-père, lutte contre la presse, lutte contre les ravisseurs, ces derniers ayant vendu le gamin à la mafia calabraise. Un brin romancée, cette histoire est le portrait d’un homme dont l’argent était le seul maître, un homme qui n’a jamais payé le moindre dollar d’impôts car il réinvestis­sait tous ses revenus dans l’achat d’oeuvres d’art. Ridley Scott nous raconte cette histoire avec le talent que nous lui connaisson­s, tant en termes de montage que de lumière, de direction d’acteur, de sens de l’action et du suspense. Il s’est entouré d’une poignée de comédiens épatants dont Michelle Williams (Gail), Mark Wahlberg dans le rôle trouble de Fletcher Chase, un agent de la CIA, chef de la sûreté du milliardai­re, le jeune Charlie Plummer (John Paul Getty III), le frenchie de l’étape, Romain Duris en kidnappeur au grand coeur et, enfin, le légendaire Christophe­r Plummer, remplaçant pour les raisons que l’on sait, Kevin Spacey, pour incarner ce grand-père d’un autre monde. À noter que Ridley Scott a retourné toutes les scènes comprenant Kevin Spacey…. Soulignons la magnifique BO signée Daniel Pemberton, une BO qui entraîne souvent ce film dans l’imaginaire d’un opéra shakespear­ien qu’aurait pu composer Giuseppe Verdi. Ce qui n’est pas un mince compliment, non ?

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