Deutsche Welle (French Edition)

Argentine : Javier Milei revisite la mémoire de la dictature

-

Javier Milei parle de moins de 9.000 disparus sous la dictature

Alors qu'un procès- euve a donné lieu à des condamnati­ons pour crimes contre l'humanité, le président tente d'imposer une vision révisionni­ste de la dictature.

C'est l’épilogue d’un procès euve de la dictature. La justice argentine a condamné mardi (26.03) dix accusés à des peines de prison à perpétuité pour crimes contre l'humanité commis pendant la dictature militaire dans les années 70 et 80.

Parmi eux, des of ciers, des policiers, des médecins militaires et des politiques. Ils étaient jugés pour enlèvement­s, détentions arbitraire­s, tortures, viols, avortement­s forcés, ou encore pour des vols de bébés.

Et la n de ce procès, entamé en 2020, intervient à un moment où le travail de mémoire sur cette période sombre de l’histoire de l’Argentine fait face à la volonté du nouveau président d’extrême droite Javier Milei de réécrire l’histoire. Entre 1976 et 1983, les juntes militaires successive­s avaient entraîné l’exil de millions d’argentins et des dizaines de milliers de disparitio­ns.

Prisons secrètes

Le procès portait sur plus de 400 victimes, passées par trois "Centres clandestin­s de détention", des prisons secrètes situées autour de Buenos Aires comme il en existait des centaines sous la dictature. Des lieux destinés à déshumanis­er les détenus politiques à travers des humiliatio­ns, des viols et de conditions de vie dégradante­s. Le but était d’éliminer les voix critiques et de les faire disparaitr­e.

Dimanche dernier, plus de 80.000 personnes ont ainsi manifesté sur la place de Mai, à Buenos Aires, pour commémorer ces victimes, le 24 mars étant la date anniversai­re du coup d’Etat de 1976.

"Ils étaient vraiment 30 000" pouvait-on lire sur l’une des nombreuses pancartes. 30.000 victimes, et un chi re fourni par les ONG des droits humains qui est aujourd’hui contesté par la présidence argentine.

Théorie des deux démons

Javier Milei est arrivé au pouvoir en décembre dernier et conteste la lecture de cette période. Il préfère parler de guerre de l’Etat contre l’extrême gauche plutôt que de dictature. En Argentine, on appelle cette rhétorique la "Teoría de los dos demonios", la "théorie des deux démons". C’est une manière de justi er en partie les crimes et exactions commis à cette époque en les présentant comme une réponse aux attentats perpétrés par des groupes armés d’extrême gauche.

Déjà, pendant la campagne électorale, Javier Milei avait contesté le chi re de 30 000 disparus. Selon ses mots, "pendant les années 1970, il y a eu une guerre. Et pendant cette guerre, les forces de l’Etat ont commis des excès". Sa vice-présidente, lle de militaires, partage cette vision révisionni­ste. Victoria Villarruel avait même organisé un "hommage aux victimes du terrorisme", un événement quali é en Argentine de négationni­ste par ses détracteur­s.

Dimanche matin, la présidence a remis une couche, en publiant une vidéo de 12 minutes pour appeler à une vérité et une justice "complète", bien que les principaux auteurs des attentats d’extrême gauche de cette époque ont été jugés dans les années 1980.

 ?? Image : Agustin Marcarian/REUTERS ??
Image : Agustin Marcarian/REUTERS

Newspapers in French

Newspapers from Germany