Une fin de vie contrariée
Belgique: Le prochain gouvernement s’engagerait à fermer les centrales nucléaires de Doel et Tihange, sous conditions
Les sept partis composant le futur gouvernement «Vivaldi» se sont remis autour de la table de négociations jeudi, avec la volonté affichée d’oublier les tensions du week-end dernier. Si tout se passe bien, la Belgique devrait avoir une nouvelle coalition à sa tête le 1er octobre. Les deux formateurs – le socialiste Paul Magnette et le libéral Alexander de Croo – se rendront chez le roi aujourd'hui pour faire rapport. Le nom du premier ministre devrait alors être connu. Et tout sera dit. Ou, plutôt, tout commencera vraiment. A lire le brouillon du programme de «Vivaldi», il y a lieu notamment de se demander comment la Belgique pourra se passer de ses centrales nucléaires à l’horizon 2025.
Les Verts (Ecolo/Groen) ont en effet arraché à leurs partenaires de coalition la promesse que la loi prévoyant la fin de l’atome en 2025 serait effectivement appliquée – avec le bémol que «l’impact éventuel sur la facture des citoyens et des entreprises sera neutralisé». Cela malgré les tensions qui ont longuement agité l’ex-gouvernement Michel autour du dossier énergétique et qui devraient se répéter sous l’impulsion de partis au pouvoir sous l’ancienne législature. Et malgré la rénovation récente de vieilles centrales pourtant atteintes par la limite d’âge. La loi de 2003 avait alors été amendée pour en encadrer la prolongation.
La pénurie d’alternatives
Toutefois, on voit mal quelle alternative pourrait permettre de remplacer à court terme la puissance cumulée de six GW fournie par les centrales nucléaires d’Engie, soit la moitié de l’électricité belge. Si des progrès ont été accomplis en matière d’énergies renouvelables via le photovoltaïque aux particuliers et la création de parcs éoliens (notamment offshore), il devrait manquer au pays 3,9 GW pour couvrir ses besoins. L’importation d’électricité ne suffira pas à combler ce manque. La construction de centrales au gaz pourrait y suppléer.
Le problème est que ces centrales polluent. Or, le nouveau gouvernement s’engagerait sous la pression des Verts à une diminution de 55 % des gaz à effet de serre d’ici 2030 et à la liaison au Green Deal européen. Autre impératif: le temps. Un premier réacteur devrait être fermé en octobre 2022, selon le calendrier fixé. D’où un plaidoyer venu de différents milieux – Engie, des patrons, des intellectuels – pour que deux réacteurs (Doel 4 et Tihange 3) soient prolongés pour dix ou vingt ans, afin de ne pas priver complètement le pays d’une électricité décarbonée.
A toutes ces contingences, il faut ajouter la guerre en préparation dans les travées de la Chambre où une empoignade permanente entre la nouvelle majorité et une opposition particulièrement féroce est annoncée. La N-VA de Bart De Wever a déjà averti qu’elle n'adaptera pas le plan climat flamand si «Vivaldi» vient à planifier la fermeture des centrales nucléaires. «Ils doivent nous prendre en compte. Si le gouvernement fédéral veut construire des centrales au gaz, il doit demander des autorisations à la Flandre», a lancé la ministre régionale de l’Energie, Zuhal Demir (NV-A), ajoutant: «Nous avons dit que la facture énergétique n’augmentera pas et je m’y tiendrai».
Cette vieille promesse nationaliste flamande devrait tenir lieu d’axe central du dossier énergétique dans les années à venir. En Belgique, la mise en place des plans «climat» passe par les Régions. Or, la N-VA est à la tête du gouvernement flamand. Elle ne fera pas de cadeau au nouvel exécutif fédéral dont elle sera absente. Les centrales ont sans doute encore de beaux jours devant elles...