Une Crise de la Macronie
Le numéro deux de La République en marche, Pierre Person, a quitté la direction du parti
Beckoules (Paris)
«C’est la crise la plus grave rencontrée par le parti, c'est vrai», reconnaît un jeune parlementaire de la majorité, membre de La République en marche (LREM). La dernière semaine, Pierre Person a annoncé qu’il quittait la direction du parti, estimant ce dernier «pas en mesure d’affronter la nouvelle étape du quinquennat».
Fondateur du mouvement «Les Jeunes avec Macron» dès 2015, Pierre Person est élu député de Paris suite à l’arrivée de son mentor à l’Elysée. Nommé délégué général adjoint dès 2017 de LREM, il a donc quitté le parti présidentiel avec fracas. Le bureau exécutif, sous le choc, a pourtant franchi un nouveau niveau de turbulences, avec les départs des députés respectivement de la Vienne et des Yvelines, Sacha Houlié, et Aurore Bergé. Les deux trentenaires ont fait part à leur tour de leur inquiétude face à l’incapacité du parti de défendre une ligne claire sur certains sujets et de produire de nouvelles idées. «Nous ne savons plus qui nous sommes», lâche sans ambages, l’ancienne juppéiste, Aurore Bergé. «Il faut un changement rapide et profond de méthode», abonde une parlementaire, restée, elle, au bureau exécutif. Une sorte de crise existentielle partisane à dix-huit mois de l’élection présidentielle. «Forcément, ça n’est pas sans conséquence et traduction dans le rapport aux électeurs», analyse un ancien conseiller ministériel.
Ainsi, alors que se tenaient plusieurs élections législatives partielles il y a une semaine, aucun des six candidats du parti présidentiel n’a réussi à se qualifier pour le second tour, qui avait lieu hier. «Ça n’a pas de lien direct, nous n’avions aucun espoir particulier», balaie d’un revers de main l’entourage de Stanislas Guérini, délégué général de LREM. «Ce n’est pas le sujet central. Et les Français ont autre chose à faire que d'assister à des querelles d’égos. Le Président le sait et guide le pays, dans cette période tourmentée», considère le conseiller spécial à l’Elysée, Philippe Grangeon. Une reprise en main présidentielle saluée. La dernière semaine 38 % des sondés se déclaraient satisfaits par le quinquennat d’Emmanuel Macron: six et quinze points de plus que respectivement Nicolas Sarkozy
Pierre Person était le fondateur du mouvement «Les Jeunes avec Macron».
et François Hollande, au même temps de leur mandat.
«Le plan et son axe écologique fort ont été salués, on a pris la mesure de la situation», s’enthousiasme un secrétaire d’Etat. Quant au sujet si épineux des séparatismes, l’intervention directe du chef de l’Etat est appréciée Plus anecdotique pour certains, l'annonce, cette semaine, par Emmanuel Macron, d’un allongement du congé paternité n’est pas sans plaire aux macronistes de gauche.
Sans parti, c’est quasi impossible, de pouvoir l’emporter. Pascal Perrineau, politologue
Stratégie pour les élections
Reste que l’élection présidentielle se rapproche, et «sans parti, c’est quasi impossible, avec notre système politique, de pouvoir l’emporter». En effet, dans l’histoire de la Ve République française, seul le Général de Gaulle est parvenu à se hisser au-dessus des partis, suivi mais jamais contraint. «Le contexte n’est pas le même pour Emmanuel Macron: il a quand même besoin de ses forces vives pour parler et à la gauche et à la droite. En effet, il a beau tout faire contre, l’exercice du pouvoir vous force à être identifié d’un côté ou de l’autre», observe le politologue Pascal Perrineau.
Alors LREM pourrait avoir un autre intérêt. Est-ce que la raison d’être n’est pas simplement d’«attraper à un moment» les électeurs centristes à l’instar de ce qui a été fait en 2017 (élections présidentielle et législatives) et 2019 (élections européennes)? «Et de renouveler l’exercice en 2022, en marchant dans toute la France, en ne laissant aucun espace politique aux centristes de tous bords», s’exclame l’entourage de Stanislas Guérini, concluant, souriant: «ça, on sait faire!». Paradoxalement, c’est le partant Person qui l’explique le mieux: «La raison de mon engagement dans ce mouvement, c’est la vision qu’il (Macron) porte depuis 2017. Je serai à ses côtés pour tous ses combats. Mon départ vise justement à susciter une nouvelle dynamique». A croire qu’en macronie, on part pour mieux revenir.