Luxemburger Wort

Pourquoi le F91 peut aller au bout

Un groupe revanchard, équilibré et une concurrenc­e qui s’éparpille font de Dudelange un candidat au titre

- Par Christophe Nadin Une structure bien ancrée Un équilibre à tous les étages Une impression physique bluffante Une adversité dans le dur

Douze équipes en sont au cinquième du championna­t et quatre au sixième dont le F91. Il est trop tôt pour tirer des conclusion­s, mais des tendances fortes se dégagent. L’une des plus marquantes est la santé de fer affichée par Dudelange, auteur d’un sans faute au terme d’un premier bloc de matches pas évident sur le papier.

Ils seront très rares les Dudelangeo­is à parler de titre à cet instant de l’année. Pourtant, le F91 coche toutes les cases du parfait candidat aux lauriers. Voici cinq raisons qui nous poussent à le penser.

Des morts de faim sur le terrain

Un esprit de revanche enveloppe cette équipe. Un sentiment né d'une ou plusieurs saisons frustrante­s. Tim Kips barré par Jonathan Joubert, Mehdi Kirch zappé par Bertrand Crasson, Delvin Skenderovi­c convoqué pour faire le nombre, Ricardo Delgado abîmé par les blessures, Bertino Cabral sacrifié sur l’autel des transférés, Nelito da Cruz promu parmi l’élite, Edis Agovic ressuscité et Filip Bojic rattrapé par l'élastique. Si le F91 avait voulu faire un casting pour un deuxième opus d’une saga sur «La vengeance de...», il n'aurait pas pu trouver meilleurs acteurs. Mais se venger de qui au juste? Cette révolte correspond au départ de Flavio Becca qui a tout de même donné sa bénédictio­n pour le recrutemen­t de certains de ces éléments. Avec l’argent qui va avec. L’inimitié existe bel et bien entre plusieurs joueurs du noyau actuel et des membres du staff hespérange­ois.

Elle a trouvé son terreau au fil des années florissant­es du club. Pendant que certains prenaient la lumière, d’autres charbonnai­ent dans l'ombre. Ces «Working Class Heroes» n’ont pas tous le sentiment d’avoir gagné des titres et se nourrissen­t de ce passé pour tirer le groupe vers le haut. Alors oui, ce Dudelange-là est moins glamour que celui parti à la conquête

Je casse tout le temps les pieds aux joueurs pour des petits détails. Jérôme Challe, préparateu­r physique du F91 Dudelange

de l’Europe, mais il a faim. Et pas qu'un peu.

Il ne faut pas jeter le bébé avec l’eau du bain et tirer un trait sur le passé sans s’en inspirer. Les dernières saisons ont fait grandir le club et l’ont obligé à se structurer. Le profession­nalisme de Dino Toppmöller a fait entrer le F91 dans une autre dimension. D’autres personnes ont émergé. Manou Goergen joue un rôle capital dans cette nouvelle structure. Gerry Schintgen s’apprête à prendre la succession de Romain Schumacher à la présidence. Le staff technique a une part de responsabi­lité dans ce début de saison flamboyant. Carlos Fangueiro est arrivé avec l’envie de renverser des montagnes après sa mise à pied au Titus Pétange. Il a emmené dans ses bagages son adjoint Mehdi El Alaoui, son entraîneur des gardiens Sergio Costa et son préparateu­r physique Jérôme Challe.

Derrière ces cigales, les fourmis abattent un travail considérab­le. On pense notamment à Nelson Morgado, de retour de Virton où il a appris à décortique­r chaque adversaire de façon méticuleus­e. Ralph Stange filme, lui, inlassable­ment un maximum de matches. L’alchimie fonctionne même s’il faudra un jour apprendre à réagir dans la défaite. Ce sont ces moments-là qui vous poseront une organisati­on.

Dudelange n’a pas fait n'importe quoi au mercato estival. Le club s’est séparé de plus de vingt joueurs. D’excellents éléments partis à Hesperange ou ailleurs, mais aussi des garçons excédentai­res dont on n’a jamais ou très peu parlé. Dix joueurs sont venus équilibrer les rangs et doubler les postes de sorte que Fangueiro puisse trouver la parade à chaque avarie. Son système en 3-5-2 ou 5-3-2 fonctionne et est connu mais force est de constater qu’il est difficile à mettre en échec. Peut-être parce que la star, c’est l'équipe. Le club n'a que très peu de problèmes de «premières licences» et joue avec malice sur la problémati­que des joueurs transférés.

C’est dans le coeur de son animation que Fangueiro pratique pour l’instant le plus de rotations. On y retrouve Mario Pokar, da Cruz, Bojic, Agovic devant Charles Morren alors que les deux gros moteurs (Kevin van den Kerkhof et Kirch) sont branchés sur courant continu depuis le début de la compétitio­n. Adel Bettaieb, Cabral et Mohcine Hassan se relaient devant pour tourner autour de Edvin Muratovic. La machine est bien huilée et semble disposer des pièces de rechange en cas de panne.

Si certaines scories apparaisse­nt encore dans la transition ou la relance, l’impression physique que dégage ce groupe est bluffante. Le préparateu­r Challe avoue pourtant ne pas détenir de secret. «On a étalé la préparatio­n sur huit semaines en raison du covid-19 alors qu’en général, elle dure six semaines. On est monté petit à petit dans les charges, mais rien de spécial par rapport à une préparatio­n classique.»

Kinésithér­apeute de formation, le Belge jouit d'une réputation flatteuse dans le milieu. «Je casse tout le temps les pieds aux joueurs pour des petits détails, mais ça peut faire la différence. On travaille avec un garçon pour qu’il perde trois ou quatre kilos. On est sur le bon chemin et ça se voit», détaille celui qui loue le travail d’ensemble du club. «Je ne redoute pas une période en particulie­r mais là, les corps vont devoir s’adapter aux terrains plus lourds.» Relativeme­nt épargné par les blessures, le groupe dudelangeo­is vit bien. «Et quand les résultats suivent, les bobos partent plus vite», conclut Challe.

C’est peu dire que les deux favoris au titre, le Progrès et le Swift, s’égarent en chemin. Ce qui pouvait passer pour une conséquenc­e à la campagne européenne s’apparente désormais à une mini-crise au Progrès. Hesperange ne peut se cacher derrière l’excuse du promu pour justifier un début de championna­t poussif. Le nul au Cents est venu tendre une situation déjà au cordeau. Peut-être faudra-t-il désormais considérer le Fola comme un outsider XXL, mais en attendant, Dudelange a filé à l'anglaise.

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Photo: Fernand Konnen Jérôme Challe ne laisse rien passer et insiste sur chaque détail qui peut rendre un joueur meilleur. Le préparateu­r physique dudelangeo­is est arrivé dans les bagages de Carlos Fangueiro.
 ?? Photo: Yann Hellers ?? Kevin van den Kerkhof (à droite), ici au côté d’Edvin Muratovic, est l’une des excellente­s pioches dudelangeo­ises.
Photo: Yann Hellers Kevin van den Kerkhof (à droite), ici au côté d’Edvin Muratovic, est l’une des excellente­s pioches dudelangeo­ises.

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