Intégration: lois, voies et gouvernance
Deux éléments récents en matière d’intégration m’ont interpellé.
D’une part la mise au point d’un vaccin contre le Covid-19 de la firme allemande Biontech par Ugur Sahin. L’instituteur allemand de ce chercheur d’origine turc, élevé et scolarisé en Allemagne, avait prévu pour lui ce qui correspond au Luxembourg à l’enseignement modulaire («Hauptschule»). Bien entendu cela n’arriverait pas chez nous: Si les cas semblables que je connais ne permettent certes pas d’établir une règle, il s’avère que les non-luxembourgeois atterrissent très souvent dans pareille filière. Dans le cas de Sahin des voisins de la famille l’ont poussé vers un lycée et vive le vaccin.
PISA en 2018 nous apprend que nulle part ailleurs dans l’OCDE le lien entre statut socio-économique et performances scolaires n’est aussi prononcé: «The link between socio-economic status and performance in PISA is stronger in Luxembourg than in any other PISA-participating country. Advantaged students in Luxembourg outperformed disadvantaged students in reading by 122 score points in PISA 2018 – a difference 33 points larger than the OECD average difference of 89 score points.»
Les deux éternels défis
L’école et le logement constituent les principaux défis en matière d’intégration des différentes couches sociales, les origines nationales ne nous renseignant guère, puisqu’il y va aussi bien d’expats et de cadres internationaux que des nombreux travailleurs et travailleuses au salaire social minimum et de près d’un cinquième de la population vivant en dessous du seuil de pauvreté.
Deuxième élément lié à l’actualité: Un volumineux sondage récent nous a appris ce que pense un échantillon de 1.039 résidents de tout un éventail de sujets. 1.039 résidents luxembourgeois à partir de 18 ans ayant le droit de vote pour les élections législatives, précise le site de TNS-Ilres. L’avis de l’autre moitié de la population ne valait pas la peine, en tout cas il n’intéressait pas nos deux principaux médias qui avaient commandé le sondage.
Et hop, nous voilà en plein dans les dégâts du référendum de 2015.
L’idée généreuse de soumettre aux Luxembourgeois la proposition du droit de vote des résidents me fait penser à la naissance d’un bébé. Dans ce cas, les parents politiques tout fiers, l’abandonnent immédiatement après l’accouchement. Manifestement ils ne se sentent plus responsables de son devenir, ni des dérives et tabous qui en découlent.
Quelques éléments de mauvaise conscience subsistent. C’est ainsi que l’accord de coalition du gouvernement actuel affirme dès son préambule que «L’intégration et l’inclusion socio-culturelle seront au coeur de l’action gouvernementale». On cherchera longtemps dans les 235 pages pour en trouver une seule (!) consacrée à l’intégration. Cela donne à penser que le coeur n’y est pas ou alors qu’on n’a pas d’idées. Il y a certes le catalogue des bonnes intentions du Plan d’action national intégration adopté le 13 juillet 2018 et pour lequel un appel à projets a été lancé récemment, ce dont il faut se féliciter.
Où en est le plan en question après deux ans? Le ministère de la Famille pourrait s’inspirer du KEP qui joue la transparence: Sur internet on peut suivre ce qu’il en est de la mise en oeuvre des différents points du KEP.
Quand on parle de transparence, autant aborder la gouvernance de la politique d’intégration. Pas moins de treize ministères font partie du comité interministériel, mais aucune trace des travaux de cet organe. Le programme gouvernemental stipule à la page 53 que le Comité interministériel à l’intégration procédera à l’organisation de réunions communes avec la société civile. Apparemment, après deux ans, une première réunion de ce type est prévue sous peu: tant mieux. Reste à savoir si, comme pour le comité interministériel de la coopération, les compte rendus seront publiés.
Et si les organisations de la société civile se concertaient elles aussi plutôt que de se positionner plus ou moins docilement pour conventions et subsides. Une plate-forme dédiée pourrait faire l’affaire.
Toujours en matière de transparence: La consultation lancée par le ministère de l’Intégration pour «repenser et redessiner la politique d’intégration au Luxembourg» est de bonne augure. Souhaitons que les nombreuses contributions sollicitées seront publiées pour être utiles de cette façon, non seulement au ministère, mais aussi au débat public et aux parlementaires appelés à faire un débat d’orientation à la Chambre des députés début 2021.
La situation alarmante du logement est connue, et ce depuis longtemps. Tout ou presque a été dit: Un fossé gigantesque sépare les paroles et les actes. Un détail est passé quasi inaperçu tout en ayant une incidence directe sur l’intégration, à savoir la transformation des foyers de travailleurs en foyers pour demandeurs d’asile: En déshabillant Joao pour habiller Adbulah on a éliminé les foyers pour travailleurs et laissé ce marché aux chambres de café.
La situation dramatique d’une famille évoquée dans le «Luxemburger Wort» du 16 novembre est une autre illustration de la pénurie de logement qui frappe les familles à bas revenu, familles étrangères et luxembourgeoises.
Dans notre Grand-Duché les inégalités se creusent. Le dernier rapport du Statec «Travail et cohésion sociale» note que le coefficient Gini s’est encore détérioré en période de confinement. Ne nous disputons pas pour savoir si le seuil de pauvreté comprend 15 ou 20 % de la population. Trop c’est trop.
La nécessité du lead politique
Avant de conclure, je voudrais me référer à Walter Benn Michaels et son petit livret «La diversité contre l’égalité»
L’école et le logement constituent les principaux défis en matière d’intégration.
paru chez Raisons d’agir. «Il est évident que la diversité ne réduit pas les inégalités économiques. Si vous prenez les 10 % de gens les plus riches (ceux qui ont en fait tiré le plus de bénéfices de l’explosion néolibérale des inégalités) et que vous vous assurez qu’une proportion correcte d’entre eux sont noirs, musulmans, femmes ou gays, vous n’avez pas généré plus d’égalité sociale. Vous avez juste créé une société dans laquelle ceux qui tirent avantage des inégalités ne sont pas tous de la même couleur ou du même sexe.»
On ne peut s’empêcher de penser que les moyens pour promouvoir la diversité au Luxembourg permettent aussi et surtout d'escamoter le débat sur le creusement des inégalités économiques.
Mesurer la politique d’intégration dans les textes de loi, c’est le rôle des chercheurs. L’index Mipex a noté une légère amélioration du score du Luxembourg, due notamment à l’assouplissement de la naturalisation et à l’introduction de la nationalité comme critère de discrimination. L’intégration est, d’après la loi du 16 décembre 2008, une tâche que l'Etat, les communes et la société civile accomplissent en commun. Si les lois ont une incidence certaine, les politiques ayant une implication sur le terrain sont essentielles. Une démarche commune des différents acteurs a besoin d’un lead, une politique d’intégration a besoin d’un lead politique.
L'auteur a été président de l’ASTI (1979-2009)
2020 ass en aussergewéinlecht Joer. De Corona-Virus hälteis zanter Méint am Otem, un en normaalt Liewen ass den Ament net ze denken. Vill Betriber musse struewelen an d'Economie dréint däitlech méi lues. Den Immobiliësecteur weist sech an der Kris awer zimmlech resistent. Op alle Fall sinn d'Wunnengspräisser och déi lescht eelef Méint weider geklomm. Am zweeten Trimester – also matten am Lockdown – sinn d'Logementspräisser ëm 13,3 Prozent an d'Luucht gaangen. Um Enn vum Joer wäerten esou vill Immobilië verkaf a kaf gi sinn, wéi nach ni virdrun.
„Same procedure as every year“, kéint een also soen. Well d'Hausse vun de Logementspräisser ass net nei. De Wunnengsmaart ass spéitstens zanter de 70er Joren e politeschen Dauerbrenner. E fréiere Premierminister hat dësen Dossier jo schonn zur Chefsaach erkläert, ouni all ze grousse Succès. De Jean-Claude Juncker huet deemools op der Chambertribün vun engem „grousse perséinlechen Echec“geschwat: „Ech muss éierlech zouginn, datt ech mat enger gewëssener Gène iwwert de Logement schwätzen. Zanter 1991 hunn ech als Staatsa Finanzminister alles gemaach, fir d’Wunnen zu Lëtzebuerg fir jiddereen hei am Land erschwénglech ze maachen. Ech si bei dem Versuch gescheitert.“
Mir schwätzen hei vun 2 719 Hektar Land, op deem direkt kéint gebaut ginn: Dat ass d’Fläch vun ëmmerhin 3 600 Fussballsterrainen.
Mä firwat deet d'Politik sech esou schwéier, fir d'Deierecht am Logement an de Grëff ze kréien? D'Ursaach vum Problem ass evident: Et wëlle méi Mënschen zu Lëtzebuerg liewen, wéi mir Wunnraum hunn. Mir hunn et also mam Prinzip vun der Offer a vun der Demande ze dinn.
Méi wéi ee Pëselstéck
D'Léisung schéngt op den éischte Bléck einfach ze sinn: Loosst eis einfach méi Haiser a méi Wunnenge bauen, fir datt d'Offer an d'Luucht an d'Präisser erof ginn. An der Theorie ass d’Léisung vum Problem also relativ einfach, mee an der Praxis ass dat net esou. De Logementsproblem ass ze komplex, fir en an engem Zoch ze léisen. Mir brauchen hei eng ganz Rei Pëselstécker, déi da mussen zesummegesat ginn.