Luxemburger Wort

Les artistes de Wuhan à l’oeuvre

En rock ou en tags, la capitale du punk chinois revit sa fin du monde artistique­ment

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Wuhan. Avec sa tignasse, il a tout du «Cure» des années 1980. Tout aussi alternatif que le groupe anglais, Lu Yan résume dans le micro le destin de sa ville natale: «Virus à Wuhan. On est toujours vivants».

Groupes pop, tagueurs ou même auteurs de BD, les artistes de Wuhan la rebelle ont trouvé l’inspiratio­n dans les 76 jours que leur cité du centre de la Chine a passés en quarantain­e, lorsqu’elle était la première victime mondiale du nouveau coronaviru­s.

Lu Yan est le chanteur du groupe Hardcore Raver in Tears, et sa chanson «WUHAN2020» a été écrite séparément par les membres du groupe lorsqu’ils étaient confinés en tout début d'année. «J’ai cru que c’était la fin du monde», raconte Lu Yan à travers son masque, pendant une répétition en studio, un an après les premières contaminat­ions détectées dans sa ville.

Pour la plupart des 11 millions d’habitants de la métropole des bords du Yangtsé, l’épidémie n’est déjà plus qu’un mauvais souvenir, même si la cité compte à elle seule la grande majorité des décès enregistré­s en Chine (4.634 morts entre janvier et mai selon le bilan officiel).

Le visage de Li Wenliang, un sujet délicat des tagueurs

Mais Huang Bowen ne l’entend pas de cette oreille. Ce tagueur de 22 ans a passé le confinemen­t à décorer les murs de sa ville, profitant de son laissez-passer de bénévole pour taquiner la bombe de peinture. Un brin provocateu­r, le jeune homme a même choisi un sujet délicat pour le régime communiste: le visage de Li Wenliang, un médecin décédé du Covid en février après avoir été accusé par la police de propager des «rumeurs». Il n’avait fait qu’alerter des proches fin décembre sur l’émergence d’un mystérieux virus dans la ville.

Comme la plupart des oeuvres de Huang Bowen, ses hommages à Li Wenliang ont été promptemen­t recouverts par la municipali­té. «Cela m’est égal: j’ai fait ce que je voulais et ça m’a suffi pour dire ce que j’avais à dire», résume l’artiste, occupé à peindre de nuit le caractère «espoir» dans un bâtiment abandonné, avec deux autres tagueurs.

Wuhan, berceau de la révolution de 1911 qui renversa l’empire chinois, garde une réputation de ville rebelle. Mais elle est davantage considérée aujourd’hui comme le berceau du punk chinois. Lu Yan assure pourtant que l’épidémie a calmé la jeunesse wuhanaise: la musique de son groupe est devenue en tout cas nettement plus douce.

Début décembre 2019, plusieurs dizaines d'habitants de la ville de Wuhan, dans le centre de la Chine, développen­t des symptômes semblables à ceux de la pneumonie. Ils l'ignorent, mais ils sont porteurs d'un nouveau coronaviru­s dont on sait aujourd'hui qu'il va marquer l'histoire du XXIe siècle. En un an, il a tué plus d'un 1,4 million de personnes, confiné des milliards d'habitants de la planète et mis à terre l'économie mondiale. AFP

J’ai cru que c’était la fin du monde. Lu Yan, chanteur d’un groupe Hardrock de Wuhan

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Photo: AFP Un tagueur chinois dans un magasin qui vend les sprays de couleurs. Les artistes continuent à décorer les murs de leur ville avec des tags qui parlent de Covid-19.

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