Un condensé d’histoire de l’art
Les 25 ans de la collection du Mudam
Le Musée d’Art moderne de Luxembourg fête actuellement un double anniversaire. Comme le suggère le titre de la nouvelle exposition «Les 25 ans de la Collection Mudam», le musée célèbre un quart de siècle d’acquisition d’oeuvres mais aussi les quinze ans de sa présence sur la scène culturelle du pays.
Les débuts de la collection du Mudam remontent à une époque où le musée d’art moderne n’existait pas encore. C’est durant la phase de préfiguration, que la directrice de l’époque Marie-Claude Beaud commença à constituer un fond maison d’oeuvres d’art. Un long travail de prospection et d’acquisition poursuivi ensuite par Enrico Lunghi et aujourdhui par Suzanne Cotter (lire l’interview cicontre). Désormais l’inventaire de la collection compte pas moins de 700 inscriptions. 455 artistes, toutes nationalités et générations confondues, ont l’une ou l’autre oeuvre inscrite à ce patrimoine, qui du haut de ses 25 ans, illustre à lui seul de nombreux courants de l’art contemporain et est de ce fait un condensé d’histoire de l’art des années 1960 à nos jours.
Aujourd’hui plus que jamais, le musée du Kirchberg – après l’exposition inaugurale «Eldorado» en 2006, largement constituée d’oeuvres de la collection qui suscita l’incompréhension du public et le désarroi après le démontage de «La Chapelle» de Wim Delvoye en 2018 – veut poursuivre l’ouverture de sa collection au grand public. Ces efforts sont récurrents depuis de nombreuses saisons, et en cette fin d’année, un peu particulière, une nouvelles exposition – sobrement intitulée «Les 25 ans de la Collection Mudam» – renforce cette volonté de dialogue et de rencontre avec le visiteur.
«En fait, ce que nous présentons aujourd’hui n’est qu’un début. Cette nouvelle exposition va se poursuivre jusqu’en avril 2021, l’accrochage va évoluer au fil des semaines. En mai 2021, par exemple de nouvelles oeuvres vont être exposées. Alors que pour l’instant, seules les deux galeries du sous-sol sont utilisées, le foyer sera lui-aussi peu à peu mis à contribution», explique Marie-Noëlle Farcy, responsable des dépôts au Mudam, qui est avec Lisa Baldelli aussi commissaire de l’exposition «Les 25 ans de la Collection Mudam». A titre d’exemple de l’évolution future de l’exposition, signalons la rencontre, dès ce samedi au foyer du sous-sol, de la Collection Mudam avec la Collection Pinault autour du dialogue entre une installation au sol de Cabrita (Mudam) et une sculpture suspendue de Cerith Wyn Evans (Pinault).
Les deux grandes galeries Est et Oust accueillent donc actuellement une quarantaine de créations de la collection du Mudam. «Il ne s’agit pas d’une présentation chronologique», prévient Marie-Noëlle Farcy, «mais bien d’un arrangement guidées autour de sept notions clef».
Une complémentarité nouvelle, plusieurs niveaux de lecture
Les leitmotivs retenus sont: «Constructions abstraites», «Détourner l’ordinaire», «Gestes et écritures», «Histoires», «L’Epure des formes», «L’Espace au corps» et les «Règles du jeu». A chaque chapitre son lot d’oeuvres distinctes qui, malgré leurs différences d’approches affichent une complémentarité nouvelle et souvent inattendue, affirment les deux commissaires de l’exposition.
«Ces idées ou notions clef que nous avons retenues ont toutes traversé tant l’art moderne que l’art contemporain. Elles proposent chacunes plusieurs niveaux de lecture. C’est pour cette raison que nous avons choisi la solution du regroupement thématique dans l’agencement des oeuvres», précise Marie-Noëlle Farcy, qui gère la collection depuis des années.
Le parcours et la muséographie des deux salles d’exposition, conçus en collaboration avec le Polaris Architects, s’articulent autour de modules aux formes et dimensions variables et adaptées aux oeuvres qu’ils abritent. «Cela crée des formes sculpturales et une dynamique nouvelle, toujours dans le but de souligner les résonances entre les pièces de la collection», souligne Marie-Noëlle Farcy. «Les artistes utilisent des matériaux, des médiums et des vocabulaires différents. Malgré les différences, l’ensemble est tout à fait cohérent.»
La galerie Est accueille, souvent avec un minimalisme assumé, différentes oeuvres autour de constructions abstraites et de questions d’architecture, d’environnement, d’urbanité... L’installation «Der Untermieter» de Simone Decker date de 1996, elle fut présentée à l’époque à la Galerie Beaumont de Luxembourg. Les questionnements soulevés par l’artiste n’ont pas pris un seule ride, souligne la commissaire, pour qui cette pièces permet de replacer une collection encore jeune dans un nouveau contexte historique.
La section consacrée à la représentation du corps dans l’espace est marquée entres autres par une série d’autoportaits vidéo de Mina Abramovic, qui malgré l’absence de casque d’écoute pour cause de pandémie, devient une expérience
tant physique que psychique d’une artiste engagée.
A la retenue, à l'économie des moyens de cette première salle vient s’opposer le foisonnement d’idées de la galerie Ouest. Ici, l’espace est plus chargé, moins aéré du fait de l’importance en volume et en taille de certaines créations. A l’image du panneau surdimensionné Dining Motions» de Tony Cragg.
En montant l’exposition, les deux commissaires ont pioché dans le vaste catalogue de la collection pour sélectionner des oeuvres et en rejeter d’autres. «Rapprocher certaines pièces a créé de nouvelles associations, mais aussi quelques bonnes surprises», glisse Lisa Baldelli.
Exposition «Les 25 ans de la Collection Mudam» jusqu’au 3 avril 2022. Infos sur la collections et ses artistes:
www.mudam.lu