Seuil des 20.000 morts franchi
La Belgique a franchi dimanche le seuil des 20.000 morts attribués au coronavirus. L’Institut de santé publique Sciensano a dénombré exactement 20.038 personnes décédées à la suite d’une infection au Sars-Cov2. Lundi matin, ce chiffre était de 20.078 (+40).
20.000 morts, cela n’a rien d’anodin. Et pourtant aucun quotidien ne consacrait sa une lundi à cette information qui, il y a moins de dix mois, aurait fait figure de cauchemar.
Comme ce fut fait pour le dix millième mort, les quotidiens du groupe «Sudpresse» sont toutefois retournés voir les soignants. «Ce qui est le plus horrible derrière ce chiffre», a confié un infirmier, «c’est de savoir que ces hommes et ces femmes sont morts seuls. Ils n’ont pu dire adieu à leur famille, n’ont eu que des paroles d’inconnus comme dernier réconfort et n’ont eu comme dernière image que des professionnels de la santé cachés par du matériel de protection. En tant que soignant, c’est le plus dur à vivre». Ce témoignage se termine par une supplique: «On ne veut pas connaître une troisième vague et ne pas atteindre rapidement les 30.000 décès.»
Dans les premiers mois de la pandémie, la Belgique a payé le prix fort de son impréparation. Sous-financé et sous-équipé, son système de santé s’est montré largement défaillant. Il faut rappeler aussi que les autorités ont longtemps intégré dans les statistiques les décès survenus en maisons de repos, sans autres détails. A une époque où les seniories étaient claquemurées, des milliers de corps sont passés du lit à la tombe sans qu’une autopsie ne soit réalisée. Il fallait éviter d’augmenter le risque de contagion. Il en résulte que, contrairement à d’autres pays, le bilan de la pandémie n’est probablement pas sous-évalué. En Flandre, un décès sur deux a été enregistré parmi les pensionnaires des maisons de retraite.
Enfin, la déclaration des cas de mort par covid est ici obligatoire, contrairement à d’autres pays, comme les Pays-Bas.
Ceci explique en partie pourquoi le taux de mortalité par 100.000 habitants est longtemps resté le plus élevé à l’échelon international, avec 174,08 décès en moyenne. Le plat pays est toutefois descendu au deuxième rang, derrière Saint-Martin (57 décès pour 33.419 habitants).
«La Belgique, de par sa petite taille et sa forte densité de population, présente plusieurs caractéristiques propices à la forte circulation du virus», rappelle Yves Coppieters (ULB). Pour cet infectiologue, le vaccin devrait cependant atténuer le bilan macabre: Dix décès en moins par 100.000 vaccinations, à condition de couvrir les personnes à risque et les plus de 85 ans.
«Surmortalité significative»
Les scientifiques s’accordent à dire qu’il est plus correct d’étudier la surmortalité plutôt que les chiffres globaux de la pandémie. A ce titre, la Belgique n’est plus dans la phase de «surmortalité significative» qui désigne un taux nettement supérieur à la moyenne des cinq dernières années. C’est vrai au plan national. Mais si l’on observe les Régions séparément, on s’aperçoit que la Flandre a encore compté quatre jours de surmortalité en décembre dernier, contrairement à Bruxelles et à la Wallonie.
Pour les politiques comme pour les scientifiques, l’urgence est toutefois ailleurs. Le nombre d’infections est reparti à la hausse ces derniers jours. La traque au variant venu du Royaume-Uni est lancée. Mais l’on sait déjà que 40% des Belges revenus de zone rouge n’ont pas respecté la quarantaine obligatoire.
Ce qui est le plus horrible derrière ce chiffre c’est de savoir que ces hommes et ces femmes sont morts seuls. Un infirmier