Le ras-le-bol s'accentue
Les Belges vivent de plus en plus mal les mesures sanitaires imposées par le gouvernement De Croo
Le déconfinement et les voyages: tels sont les deux mots les plus cités aujourd’hui par les médias belges. Chaque jour apporte son lot d’informations et, plus souvent encore, de supputations quant au moment où le gouvernement d' Alexander De Croo acceptera de relâcher la pression sanitaire qui s’exerce sur le pays et ses habitants.
Au cours de la semaine écoulée, les avis de plusieurs scientifiques se sont croisés dans une certaine nervosité. Dans «La Libre Belgique», l’épidémiologiste Yves Coppieters (ULB) estime que des assouplissements pourraient être envisagés dès le mois de mars. «Il faudra rouvrir au sein d'un secteur les sous-catégories où peuvent être correctement appliqués les protocoles», dit-il. Mais du côté officiel, c’est «no pasarán». Dans «Het Laatste Nieuws» cette fois, le porte-parole interfédéral Steven Van Gucht estime au contraire qu'un relâchement des règles avant Pâques constituerait un véritable danger. «Je ne serais pas étonné que d'ici la semaine prochaine, les chiffres repartent à la hausse pour ensuite
La campagne de vaccination en Belgique ne s'est pas déroulée comme prévue, barrant la possibilité d’un déconfinement rapide. baisser à nouveau la semaine qui suit». Et comme le week-end s’annonce beau pour la saison, il prévient: «Chaque fois que vous laissez une marge au virus, des choses que vous voulez éviter se produisent: c'est là le problème. C'est la même chose pour les voyages.»
Précisément, les voyages font eux aussi l’objet de toutes les conjectures. Les sites d’infos cartonnent avec des sujets comme la privation «injuste» de sports d’hiver et l’impatience des Belges à retrouver leur seconde résidence à l’étranger. Jeudi, le commissaire européen à la Justice, Didier Reynders, a tordu le bras au gouvernement De Croo en l’appelant à remplacer dès mars l’interdiction de voyager pour des raisons non essentielles par des mesures plus ciblées.
La vaccination connaît des couacs Et pourtant, les chiffres sont bons, font valoir les autorités. Le nombre journalier d’infections, d’admissions à l’hôpital et de décès est à la baisse. Mais la vaccination a connu plusieurs couacs successifs, barrant la possibilité d’un déconfinement rapide. Le centre de vaccination du Heysel (Bruxelles), le plus grand du pays, n’a pu fonctionner lors de son ouverture en raison d'un bug informatique qui a empêché l'envoi des convocations à la population. La Belgique peine ici à résorber le retard accumulé par rapport à d’autres pays.
Autre écueil: même en nette amélioration au plan quantitatif, les contaminations et les admissions à l’hôpital des malades du covid restent au-delà du seuil fixé par les autorités pour déconfiner. D’où la montée en puissance d’une énième polémique qui voit s’affronter partisans et adversaires des normes fixées par le gouvernement. Une chose est sûre: le rasle-bol va croissant. Le «flicage» des réfractaires aux mesures covid passe de plus en plus mal. Des adolescents de 14 ans ont fini au cachot pour avoir organisé une «lockdown party». La demande adressée par le gouvernement aux médecins généralistes de transmettre les dossiers de leurs patients à risque de moins de 65 ans aux centres de vaccination met en colère ceux qui brandissent la protection de la vie privée. Jeudi, deux étudiants ont été blessés lors d’un contrôle sanitaire effectué par la police à Louvain-la-Neuve.
«Voilà autant de coups de boutoir dans le mur du confinement qui risque donc l’effondrement avant que les digues du vaccin soient érigées», écrit «Le Soir». «C’est même pire, le public a l’impression à ce stade, avec un taux de vaccination belge de 3,4 % de la population après un mois, que même les fondations de ces digues promises sont branlantes.»