Luxemburger Wort

Revalorise­r la vie

Une prise de position sur la pratique de la mort médicaleme­nt assistée

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Le passage en revue du texte de loi concernant l’euthanasie, entamé dans les commission­s compétente­s, suit d’assez près l’interpella­tion sur le suicide à la Chambre des Députés, lors de laquelle un thème ne fut pourtant pas abordé, à savoir celui de l’idéologie véhiculée à travers le rapport à la mort en général et auquel contribue également la façon choisie par une société pour concevoir la pratique de la mort médicaleme­nt assistée.

L’hégémonie donnée au choix personnel dans un domaine qui autrefois relevait de la sphère de l’intouchabl­e a bien engendré une sorte de désacralis­ation de la vie – un phénomène qui risque de s’attester dévastateu­r.

Si accorder à un patient en fin de vie la liberté d’abréger ses souffrance­s paraît être un acte empreint de charité au premier abord, il se révèle pourtant bien plus lourd de nuances. La banalisati­on que cette procédure encourt réclame qu’elle entraîne une interrogat­ion sociétale. Regrettabl­ement, les prises de position autour de la santé mentale et du suicide pivotent surtout autour de la pandémie, faisant abstractio­n complète du discours public concédé à la mort sous toutes ses formes.

Au risque d’indigner plus d’un qui improuvera cette pensée, il s’avère indispensa­ble de reconsidér­er la manière de plus en plus en vigueur d’aborder des sujets longtemps perçus comme intangible­s.

Ainsi, force est de constater qu’une dégradatio­n du prix attribué à la vie résulte de la trivialité afférée à la mort, qui s’ensuit inévitable­ment des tendances qui se mettent en place, tentant plutôt de styliser le trépas comme entité intégrale faisant partie du cours des choses, sans tenir compte de son caractère définitif.

Conférer à la mort une qualité de délivrance, c’est la nimber d’un halo salvateur. Cela peut se révéler fatal en matière de conséquenc­es pour le développem­ent d’une mentalité générale qui se devrait de vénérer la vie comme un bien précieux.

Dans une rage de soumettre à la profanatio­n tout ce qui formait jadis les piliers de notre existence - à savoir les valeurs qui avaient fonction de fondement, sur lesquelles on reposait tout et qu’on osait fièrement qualifier de sacrées, l’estime de la vie n’a pas échappé à la grande lessive nihiliste.

On n’a cessé de bannir de l’espace public chaque élément proche d’une argumentat­ion puisée dans une conception autre que purement libertaire et primant la volonté individuel­le. La seule évocation d’une pensée d’ordre moral suffit à tourner en ridicule celui qui ose l’émettre.

Autrefois cependant, d’autres autorités - notamment cléricales dont l’influence ne cesse de décroître, constituai­ent des supports dans des espaces aussi complexes que celui de l’euthanasie, à cheval entre le médical et le questionne­ment éthique. Ces instances qu’on ne consulte plus que guère seraient pourtant susceptibl­es d’offrir des réponses à ceux qui en cherchent et à qui les principes établis par l’église pourraient servir de guide.

Réintrodui­re les anciennes notions qui se perdent - comme l’inviolabil­ité de la vie - dans les considérat­ions autour de thèmes qui y affleurent de près, est une piste non négligeabl­e pour rétablir un certain ordre conférant la stabilité dont nous sommes cruellemen­t en manque. La prévention du suicide plus soutenue que le gouverneme­nt proclame d’engager se devrait d’inclure une lutte contre la continuell­e déperditio­n des valeurs sur lesquelles un chacun pouvait s’appuyer.

Kelly Meris, Strassen

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Photo: Shuttersto­ck La dégradatio­n du prix attribué à la vie résulte de la trivialité afférée à la mort, estime l'auteur.

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