Revaloriser la vie
Une prise de position sur la pratique de la mort médicalement assistée
Le passage en revue du texte de loi concernant l’euthanasie, entamé dans les commissions compétentes, suit d’assez près l’interpellation sur le suicide à la Chambre des Députés, lors de laquelle un thème ne fut pourtant pas abordé, à savoir celui de l’idéologie véhiculée à travers le rapport à la mort en général et auquel contribue également la façon choisie par une société pour concevoir la pratique de la mort médicalement assistée.
L’hégémonie donnée au choix personnel dans un domaine qui autrefois relevait de la sphère de l’intouchable a bien engendré une sorte de désacralisation de la vie – un phénomène qui risque de s’attester dévastateur.
Si accorder à un patient en fin de vie la liberté d’abréger ses souffrances paraît être un acte empreint de charité au premier abord, il se révèle pourtant bien plus lourd de nuances. La banalisation que cette procédure encourt réclame qu’elle entraîne une interrogation sociétale. Regrettablement, les prises de position autour de la santé mentale et du suicide pivotent surtout autour de la pandémie, faisant abstraction complète du discours public concédé à la mort sous toutes ses formes.
Au risque d’indigner plus d’un qui improuvera cette pensée, il s’avère indispensable de reconsidérer la manière de plus en plus en vigueur d’aborder des sujets longtemps perçus comme intangibles.
Ainsi, force est de constater qu’une dégradation du prix attribué à la vie résulte de la trivialité afférée à la mort, qui s’ensuit inévitablement des tendances qui se mettent en place, tentant plutôt de styliser le trépas comme entité intégrale faisant partie du cours des choses, sans tenir compte de son caractère définitif.
Conférer à la mort une qualité de délivrance, c’est la nimber d’un halo salvateur. Cela peut se révéler fatal en matière de conséquences pour le développement d’une mentalité générale qui se devrait de vénérer la vie comme un bien précieux.
Dans une rage de soumettre à la profanation tout ce qui formait jadis les piliers de notre existence - à savoir les valeurs qui avaient fonction de fondement, sur lesquelles on reposait tout et qu’on osait fièrement qualifier de sacrées, l’estime de la vie n’a pas échappé à la grande lessive nihiliste.
On n’a cessé de bannir de l’espace public chaque élément proche d’une argumentation puisée dans une conception autre que purement libertaire et primant la volonté individuelle. La seule évocation d’une pensée d’ordre moral suffit à tourner en ridicule celui qui ose l’émettre.
Autrefois cependant, d’autres autorités - notamment cléricales dont l’influence ne cesse de décroître, constituaient des supports dans des espaces aussi complexes que celui de l’euthanasie, à cheval entre le médical et le questionnement éthique. Ces instances qu’on ne consulte plus que guère seraient pourtant susceptibles d’offrir des réponses à ceux qui en cherchent et à qui les principes établis par l’église pourraient servir de guide.
Réintroduire les anciennes notions qui se perdent - comme l’inviolabilité de la vie - dans les considérations autour de thèmes qui y affleurent de près, est une piste non négligeable pour rétablir un certain ordre conférant la stabilité dont nous sommes cruellement en manque. La prévention du suicide plus soutenue que le gouvernement proclame d’engager se devrait d’inclure une lutte contre la continuelle déperdition des valeurs sur lesquelles un chacun pouvait s’appuyer.
Kelly Meris, Strassen