Reflets de vie
«Fil Rouge», exposition de Serge Koch à la galerie Schlassgoart d’Esch/Alzette
Le titre «Fil Rouge» est quelque peu trompeur. Cherchez un fil rouge dans l’actuelle exposition de Serge Koch à Esch/Alzette peut être une sinécure. A moins que ...
L’artiste explique: «En préparant cette exposition, je cherchais une idée fédératrice, un concept général. Des amis m’ont finalement donné la réponse». Le fil rouge n’est pas à chercher au niveau purement thématique, mais au niveau de celui qui a créé la bonne centaine d’oeuvres accrochées aux cimaises de la galerie des Nonnewisen.
Les gravures et les dessins, mais avant tout les multiples photos présentent toutes une même griffe, un même regard de quelqu’un qui s’intéresse aux êtres qu’il croise plus ou moins volontairement.
«J’adore faire des portraits dans la rue. Aujourd’hui c’est nettement plus difficile, il faut demander l’accord de la personne photographiée.» Face à cette contrainte, le photographe a adapté son mode de travail. Serge Koch décide donc de se mettre en quelque sorte en embuscade derrière une vitre pour photographier des personnages de dos, qu’il rend méconnaissables. Pour ce faire, il joue avec allégresse avec le flou, les formes s’entremêlent joyeusement dans un dédale de lignes et de contours très souvent exagérés. Le résultat final est surprenant, voire déconcertant, puisqu’il requiert du spectateur un regard assidu. Les associations d’idées avec l’univers d’Hitchcock ne sont pas fortuites, selon l'artiste.
Souvent prises de nuit, ces photographies regroupées par exemple dans la série «People» – les tons orangés sont renforcés – dégagent une chaleur et une ambiance bien particulières.
Mais sont aussi autant de moments bien déterminés, d’instantanés. Ce qui fait dire à l’historienne de l’Art Nathalie Becker que l’artiste «affectionne dans ses travaux à fixer l’instant, le non pérenne, l’évolution, la transformation, la transmutation, en somme tout ce qui caractérise l’existence humaine».
Présence humaine omniprésente
Du coup, les oeuvres exposées semblent tout de même défendre une idée générale, un fil rouge. Les êtres humains sont omniprésents. Qu’ils soient montrés ou esquissés. Serge Koch joue avec les représentations, les allusions, les symboles. «Je porte mon regard sur ce qui a été créé par l’homme, ce qui existe encore ou ce qui a été détruit, mais où la présence humaine est toujours palpable».
Pour preuve les clichés de maisons abandonnées ou en déconstruction, de quelques lieux perdus, de devantures de magasins. Autant de témoignages de temps lointains et figés que Serge Koch met en scène, avec un brin d’humour mais aussi une nostalgie assumée. Le soin du détail est frappant, comme pour mieux souligner l’ambiance si particulière des ces spots, que l’artiste anonymise délibérément.
Des reflets il en est aussi question avec la série «Glassblocks». Ces photographies se concentrent sur la représentation de la réalité au travers d’une surface vitrée. Le résultat là encore est impressionnant. Devant l’objectif naissent des formes abstraites et psychédéliques.
Les villes et ses rues, ses maisons: le tissu urbain est le terrain de prédilection du photographe. L’élément purement naturel, une forêt ou un paysage, fait défaut. La nature serait-elle trop belle pour être captée par l'objectif? L'artiste Koch assume son choix là encore.
Pour ces photographies, Serge Koch entend limiter au plus l’utilisation de logiciels de retouche ou de correction. Une simplicité qui se voit encore renforcée par l’encadrement sous verre des oeuvres. Plongées dans le soleil des cimaises eschoises, le réfléchissement du monde réel s’en voit renforcé. Aussi grâce aux libertés et extravagances que l’artiste s’autorise.
Serge Koch profite de son exposition pour présenter également quelques dessins, qu’il avait exposé en 1996 au Tutesall dans le cadre d’une exposition consacrée à l’époque sur différents aspects de la sexualité. Le trait est fin, pointu, au-delà des images et symbolismes.
Au tout début du parcours de la galerie, le visiteur découvre une série de gravures. Membre depuis 1999 de l’atelier Empreinte, Serge Koch affectionne tout particulièrement la gravure, «une technique qui possède une force d’expression bien plus puissante.» Les gravures elles aussi ont pour sujet une représentation humaine toujours aussi imaginative, rendant la réalité souvent méconnaissable.
«Je ne suis pas photographe, graveur ou dessinateur, je fais de la photographie, de la gravure ou du dessin. C'est différent», explique l’artiste, curieux du monde qui l’entoure. C’est pourquoi son regard est tout aussi pluriel que les techniques, approches utilisées. Le cocktail final est non sans étonnements. A condition de se laisser emporter par ce tourbillonnement d’idées et d’images proposées.
L’exposition «Fil Rouge» de Serge Koch est ouverte au public jusqu’au 13 mars, du mardi au samedi de 14 à 18 heures. Galerie Schlassboart, pavillon du Centenaire/ArcelorMittal, boulevard Grande-Duchesse Charlotte, Eschsur-Alzette (Nonnewisen).
wwww. schlassgoart.lu