L’humanisme chrétien et sa vitalité
Jean-Jacques Flammang SCJ publie «Notes de lecture: apports philosophiques et scientifiques récents sur la question de Dieu», une autre vue sur le transhumanisme «loin de la vision (post)moderne qui transformerait l’homme d’aujourd’hui en singe de demain»
S’il y a un domaine sur lequel la recherche et l’historiographie sont restées relativement discrètes au courant des siècles et des époques, c’est bien celui du musée. Pour autant qu’il représente aujourd’hui pour l’homme moderne un repère essentiel dans la conception de son identité évolutive d’être social et culturel, le musée de nos jours est le fruit de sa propre histoire, centenaire, même pas millénaire, et qui jusqu’à présent attendait d’être écrite. C’est désormais chose faite avec le monumental travail de Krzysztof Pomian, philosophe, historien et essayiste franco-polonais, dont le premier tome de son ouvrage «Le musée, une histoire mondiale» vient de paraître dans la prestigieuse collection Bibliothèque illustrée des Histoires chez Gallimard.
C’est un travail riche, fourni d’une iconographie exceptionnelle et nourri d’une érudition remarquable que Krzysztof Pomian soumet à l’appréciation du lecteur et dont la profusion des sources et des racines menant aux premiers débuts d’une institution «à la fois inutile et indispensable» ne manque pas de convaincre de la belle et énorme envergure du projet. Avant-dernier chaînon de l’histoire, cette fois millénaire, des collections (avant celui des enregistrements sur serveurs électroniques), l’histoire du musée se raconte en différents chapitres qui conduisent de son ancêtre initial que furent les trésors du pouvoir sacral à la collection publique sécularisée et tendanciellement égalitaire de nos jours. Né à Rome, au début du dernier tiers du XVe siècle, lorsqu’une collection d’antiques tenues pour les emblèmes de la Ville et qui appartenaient à la papauté, fut déposée par un souverain pontife au Capitole, les musées se comptent aujourd’hui par dizaines de milliers dans le monde, Krzysztof Pomian évaluant leur nombre total actuel à 85.000, avec cette conclusion inattendue: les sept huitièmes des musées qui existent aujourd’hui dans le monde ont été créés il y a moins de cinquante ans.
Très belles et nombreuses illustrations à l’appui, l’auteur revisite dans le premier tome cette histoire fascinante couvrant toutes les civilisations et régions du monde, se penchant à la fois sur la naissance des collections particulières, entre la Chine, Rome et le monde chrétien, jusqu’au rayonnement du musée en tant qu’institution italienne et sa traversée des Alpes. Une histoire faite «de dons et de marchandises, de vols et de pillages, de guerres et de diplomatie». Et dont la poursuite traitera, dans les tomes deux et trois, de l’ancrage européen des musées, entre Révolution française et les années 1850, ainsi que de sa «conquête du monde» à partir de la Révolution industrielle à nos jours. Un très bel et riche projet, inédit de surcroît, qui fut en chantier pendant environ trente ans, et qui, conduit avec autant de passion et d’érudition, se conçoit à son aboutissement comme l’ultime reflet du triomphe de l’art et de la beauté dans l’histoire universelle de l’humanité.
Krzysztof Pomian, «Le musée, une institution mondiale», Gallimard, 704 pages, nombreuses illustrations, 35 euros.