Quelque part sur la route
«Nomadland» de Cloé Zhao ou l’envers de la médaille du rêve américain
Flanqué d’un Lion d’Or, de deux Golden Globes, depuis mercredi d’une distinction de la Producers Guild of America et sans doute de l’un ou l’autre Oscar, «Nomadland» de Chloé Zhao débarque au Luxembourg, non sans avoir assuré le 4 mars dernier le coup d’envoi du Luxembourg City Film Festival. Avec un tel pedigree, les attentes ne pouvaient qu’être élevées. en 2017 pour la journaliste. Les Linday, Swankie, Derek... que Fern rencontre ne jouent pas des nomades, ils sont des nomades et interprètent leurs propres personnages. Des témoignages qui prennent des allures de documentaire, tant les paroles, les gestes sont vrais.
Témoin de la précarité
Frances McDormand en glissant dans la peau de Fern, devient un témoin de cette précarité, de cette misère palpable. L’actrice oscarisée, elle-aussi, ne semble pas jouer, mais elle veut vivre au plus profond d’elle-même ce drame humain de cette communauté qui malgré tout partage des réelles valeurs humaines. Une tasse de café ou un ouvre-boîte offerts, des paroles et des gestes réconfortants, un esprit d’entraide loin de toutes velléités, une solidarité rompue à toutes les épreuves: Chloé Zhao n’est pas militante, ne dénonce pas au premier regard, elle observe et cherche le beau, le bon dans chaque individu.
A l’image de Fern, qui au lieu de se plaindre sur son sort, est toujours la première à se lever pour donner un coup de main à ceux qui en ont bien plus besoin qu’elle. Elle rejette aussi toute main tendue par ceux qui veulent la sortir de là, de cette sombre situation. Fern refuse le lit qui lui est offert pour se réfugier dans son van pour ne pas mettre en péril sa liberté si chèrement obtenue pour en quelque sorte rentrer dans le rang et ce malgré le prix à payer.
Au-delà des sublimes paysages traversés par Fern, «Nomadland» est une ode à la beauté de coeur, partagée par des êtres chaleureusement humains. Chloé Zhao, qui n’en est pas à son coup d’essai, a réussi son pari sans virer dans un misérabilisme gratuit.