Nouvelle poussée de l’extrême droite flamande
Le Vlaams Belang renvoie les démocrates à la perspective de son accession au pouvoir
L’hebdomadaire «Knack» pose la question sans détour: «Est-il possible que le Vlaams Belang et la NVA emportent plus de sièges que les autres partis flamands réunis lors des prochaines élections? Ou pas?» Autrement dit, que l’alliance des nationalistes, durs et modérés, soit incontournable lors de la formation du prochain gouvernement fédéral en Belgique ...
Ces derniers jours, un sondage Ipsos particulièrement interpellant a relancé la question de la participation de l’extrême droite flamande au pouvoir. Relayé par plusieurs médias, il confirme la montée en puissance du Vlaams Belang. Bien qu’il reste confiné dans l’opposition, l’ex-Vlaams Blok est aujourd’hui le premier parti flamand, donc le premier parti national en raison du poids démographique de la Flandre. Avec 26,1 % des suffrages, il progresse de 7,4 points par rapport au scrutin législatif de 2019.
Traditionnellement, le Vlaams Belang de Tom Van Grieken et la N-VA de Bart De Wever puisent leurs électeurs dans un même vivier, selon un système de vases communicants qui favorise tantôt l’un, tantôt l’autre. Cette fois pourtant, la poussée du Belang ne s’effectue plus au détriment des nationalistes républicains de la N-VA, lesquels colonisent la seconde place du sondage Ipsos avec 21,8 % des intentions de vote (+ 1,8 % par rapport à un précédent sondage réalisé l’hiver dernier).
Au bout du compte, le Vlaams Belang et la N-VA cumuleraient 47,9 % des suffrages si des élections étaient organisées demain, pour 44,2 % en mai 2019. Bref, un électeur flamand sur deux est aujourd’hui tenté par le vote nationaliste, qu'il soit autonomiste ou indépendantiste, alors que paradoxalement le Premier ministre (fédéral) Alexander De Croo caracole au sommet du classement des personnalités politiques les plus populaires. Ce succès, le Vlaams Belang l’obtient au détriment de la droite traditionnelle flamande – dont le parti libéral Open VLD d’Alexander De Croo. Classiquement, la situation est inverse en Wallonie où un PS regonflé se retrouve flanqué au second rang des communistes du PTB.
Voilà pourquoi l’une des analyses les plus couramment formulées aujourd’hui consiste à dire que seule une coalition entre la N-VA de Bart De Wever et le PS de Paul Magnette permettra peut-être de sauver la Belgique fédérale au terme des législatives de 2024. D’un côté, la Flandre nationaliste, mais démocrate. De l’autre, le socialisme à la wallonne, certes embourgeoisé, mais incontournable.
Une telle alliance n’a plus rien de chimérique. L’été dernier, Paul Magnette et Bart De Wever ont presque scellé leur union en dépit des anathèmes passés. Finalement, une coalition Vivaldi réunissant la bagatelle de sept partis a emporté la mise. Mais rien ne dit qu’en 2024, la perspective de voir le Vlaams Belang briser le cordon sanitaire qui lui interdit depuis quarante ans l’accès au pouvoir ne rendra pas imparable une alliance PS/N-VA.
L'effet Jurgen Conings
Ces conjectures cachent mal l’inquiétude profonde des partis démocratiques. Le Vlaams Belang fait en effet feu de tout bois: le sondage Ipsos qui lui attribue la première marche du podium a été réalisé entre le 25 mai et le 1er juin, au moment où il était précisément accusé par certains médias d’avoir «fabriqué» un Jurgen Conings, ce militaire raciste et lourdement armé toujours introuvable. Et si, demain, le port du voile devait être admis aux guichets des administrations et des entreprises publiques bruxelloises, chacun sait que le Belang tirerait immédiatement profit de la situation dans la capitale où il est aux aguets.
Le Vlaams Belang et la N-VA cumuleraient 47,9 % des suffrages si des élections étaient organisées demain.