Luxemburger Wort

Rencontre mortelle à Ostende

Retour sur l’Affaire Wesphael, l’énigme qui ravive et entretient doutes et passions

- Par Marcel Kieffer

Meurtre, accident ou suicide? L’énigme reste intacte et le coup de tonnerre qui ébranlait au matin du 1er novembre 2013 l’opinion publique en Belgique, résonne encore jusqu’à maintenant. Le député wallon Bernard Wesphael (55) aurait tué pendant la nuit dans un hôtel d’Ostende son épouse Véronique Pirotton (42), en guise d’épilogue tragique d’une relation conjugale notoiremen­t orageuse et tourmentée. Encore une fois, crime et politique se seraient mêlés dans le petit mais ô combien ténébreux univers des affaires publiques du Royaume jusqu’à donner lieu à la mort suspecte d’une personne et incriminer un éminent représenta­nt

Une sombre affaire qui a secoué la Belgique.

offrir à tous les friands d’un certain voyeurisme morbide un de ces spectacles où les protagonis­tes des faits réels prennent un malin plaisir de se (re)produire sur la scène du divertisse­ment audiovisue­l et collectif.

Entre ces acteurs particuliè­rement doués excelle, ici, celui qui endosse le rôle du présumé coupable en troquant, avec la facilité de l’homme politique particuliè­rement à l’aise dans l’exhibition­nisme narcissiqu­e, la tribune parlementa­ire contre le prétoire de l’inculpé brillant dans l’exercice de sa propre disculpati­on – ne rechignant pas de livrer jusqu’aux détails

les plus intimes de sa relation avec son épouse, voire de retourner, pour les besoins du tournage, aux lieux des faits, ainsi que dans sa propre cellule de la prison de Bruges.

Il est vrai qu’au fil des épisodes de cette apparemmen­t si évidente et néanmoins bien trouble affaire de mort suspecte, la multitude des images réelles montrant le couple Pirotton-Wesphael dans maintes circonstan­ces et situations au courant de leur dernière soirée qui allait prendre une tournure si tragique, mais aussi la somme des témoignage­s, traces écrites et enregistre­ments – jusqu’à ceux des déposition­s de Wesphael devant les enquêteurs -, reproduise­nt au plus près le contexte et le déroulemen­t d’une affaire dont le pouvoir de sombre fascinatio­n n’est pas à nier et qui monte au rythme d’un très astucieux montage des images, de la musique et des témoignage­s, recueillis par les deux journalist­es Georges Huercano et Pascal Vrebos, ainsi que d’une mise en scène habilement peaufinée par Alain Brunard.

Sont ainsi déballées à un large public toutes les péripéties d’une relation tourmentée sur fonds de disputes, relations extra-conjugales et réconcilia­tions passionnel­les, exhibant les fêlures et traits de caractère d’une femme et d’un homme divaguant en permanence entre déchiremen­t et retrouvail­les. Ce qui s’est vraiment passé en cette nuit tragique ostendaise entre Véronique Pirotton et Bernard Wesphael, seuls les témoignage­s de ce dernier, apportés avec un brin trop de calme et d’affectatio­n, peuvent en donner au mieux l’idée d’une version parmi d’autres.

Un procès largement médiatisé

Si les circonstan­ces et son comporteme­nt bizarre ainsi que ses changement­s de versions des faits plaidaient contre lui, des antécédent­s de tentatives de suicide de la victime, décédée d’une mort assurément violente et trouvée avec un sac en plastique sur la tête, pouvaient orienter les enquêteurs également à considérer d’autres explicatio­ns – dans lesquelles ils allaient se fourvoyer, par ailleurs. Toujours est-il que l’homme politique, niant toujours sa culpabilit­é, restait en détention avant d’être jugé dans un procès largement médiatisé devant la Cour d’Assises du Hainaut à Mons.

Ce qui fut pour un homme politique de son statut et de sa notoriété un fait tout aussi extraordin­aire que l’issue du procès ellemême et la longévité des passions qu’il n’a pas cessé de déchaîner jusqu’à aujourd’hui, huit ans après les faits.

La mini-série «Soupçons – les dessous de l’Affaire Wesphael» est disponible sur Netflix.

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Photo: Netflix

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