Le groove jusqu’au bout des doigts
Le musicien Sacha Hanlet est en résidence à la Kulturfabrik et peaufine un projet de longue haleine
Quand il n’est pas sur scène avec son groupe Mutiny on the Bounty (MOTB), il s’enferme dans son studio, derrière ses claviers et des ordinateurs pour composer de nouvelles musiques. Ces derniers temps et pour quelques mois encore, il ne sera pourtant pas rare de croiser Sacha Hanlet à la Kulturfabrik. Le centre culturel eschois lui a offert depuis la mi-mars une résidence d’artiste qui va déboucher sur le nouveau projet «Them Lights».
Sacha Hanlet vit et travaille sur les hauteurs de Rumelange. Une fois passé le rez-de-chaussée réservé à la vie de famille – que l’on imagine nombreuse – l’on accède rapidement à la cave, que le bientôt quadragénaire Sacha Hanlet a en partie transformé en studio de travail. Plusieurs claviers, une batterie, des percussions, des micros et des ordinateurs sont à portée de main. La lumière est tamisée, les murs en partie recouverts de panneaux acoustiques. Des souvenirs de scène, quelques vinyles sont déposés ici et là. Un album de Michael Jackson sort du lot. Que vient faire le roi de la pop dans cet antre du fervent défenseur de mathrock? La réponse fuse: «Enfant, j’ai découvert la vidéo ’Thriller’. J’ai été fasciné par l’incroyable groove de Michael Jackson». Une fascination qui dure aujourd’hui encore et qui se retrouve, par exemple, sur le titre très dansant «Mkl Jksn» de... Mutiny on the Bounty. «Notre song reprend la ligne de basse du tube de Michael Jackson», glisse un Sacha Hanlet plus que jamais épris de liberté tant dans le contenu que dans la forme dans son travail. MOTB est souvent estampillé math-rock. «Je préfère parler de musique sauvage et planante. Les gens ont souvent besoin de catégories. Moi, je ne sais pas très bien ce que veut dire mathrock. Je m’intéresse davantage à tout ce qui touche l’inspiration, l’énergie, donc aussi le groove», fait valoir le musicien, qui joint le geste à la parole: le rythme au bout des doigts, il ne peut se préparer une tasse de café sans tapoter sur la première surface qui lui tombe sous la main.
Une première fois en solitaire
Le groupe MTOB existe depuis 17 ans, rappelle le batteur. Ce qui ne l’a pas empêché de vouloir, une fois n’est pas coutume, voler en solitaire. «C’est la première fois que je travaille en solo sur une idée». Pour son projet «Them Lights», l’objet de sa résidence à la Kulturfabrik, Sacha Hanlet s’occupe de toutes les étapes: composition, interprétation, enregistrement et production. Il chante, joue de tous les instruments et dirige ses ordinateurs. «Je n’ai jamais fait de solfège, ni appris à jouer d’un instrument, je suis autodidacte, je ne suis pas virtuose.» Seul, au final le mixage et le mastering seront outsourcés.
Pour Sacha Hanlet, l’inspiration ne jaillit pas d'un tour de magie. «Il faut travailler, travailler et encore travailler. Et surtout aller de
Le musicien est actif sur tous les fronts. l’avant, foncer. Des fois, on a des résultats. Mais je fais aussi des erreurs, ce n’est pas grave, car ces ’lucky mistakes’ peuvent elles-aussi aboutir à des choses intéressantes. Les surprises existent, même si cela ne sert à rien de provoquer des fautes. Certaines choses restent incontrôlables.»
Pour «Them Lights», Sacha Hanlet s’intéresse aux musiques électroniques. «C’est sombre, groovy, mais aussi très urbain, avec un mélange de r&b, hip hop et rap». Actuellement cinq singles sont prêtes, un EP est en préparation. Et un show live.
Et c’est sur cet aspect du projet que Sacha Hanlet peut compter sur l’aide de son hôte, la Kulturfabrik. «Un tel concert ne se prépare pas en un seul jour. Pouvoir travailler des journées entières dans la grande salle de la Kufa avec l’aide des techniciens, être encadré, conseillé et pouvoir prendre le temps d’expérimenter et rechercher est une chance énorme qui s’offre à moi», se réjouit le musicien. De la théorie à Rumelange à la pratique à Esch, il n’y a souvent qu’un petit pas, que Sacha Hanlet franchit allègrement.
Connaître les ficelles du métier
La résidence d’artiste à la Kulturfabrik s’achèvera le 14 mars 2024. «C’est vrai que cela peut paraître long. En réalité, le temps passe finalement très vite.»
Avec «Them Lights» et sa résidence, Sacha Hanlet découvre un nouveau volet de son job de musicien. De l’étape du songwriting au concert ou encore de l’export du produit le chemin est souvent très long et semé d’embûches. «C’est une grande nouveauté, j’ai dû apprendre la partie technique, maîtriser les outils. Pour exister, il faut connaître tous les domaines, toutes les ficelles du métier», explique le musicien et producteur, qui dans son studio de Rumelange partage avec d’autres musiciens son expérience.
Membre du collectif «Schallot», Sacha Hanlet, qui oeuvre aussi en tant que stage et event manager, entend ainsi défendre et promouvoir les intérêts de la scène locale. De plus, le musicien fait partie de l’équipe pluridisciplinaire de l’association «Hip Hop Based Education Luxembourg», qui comme son nom l’indique initie les plus jeunes à la culture hip hop. Sacha Hanlet, alias Falcon, partage à cette occasion sa passions pour l’art urbain avec Nicool, Maz et une poignées d’artistes toutes disciplines confondues.
La camionnette noire de Sacha Hanlet garée dans la descente de garage du pavillon est prête à recharger le matériel de scène. La prochaine sortie est déjà programmée avec le CovidCheck-concert de Mutiny on the Bounty le vendredi 16 juillet à 20 heures à la... Kulturfabrik, là où le groupe a répété pendant des années (infos: www.kulturfabrik.lu). Pour Sacha Hanlet ce sera en quelque sorte un retour au bercail dans un lieu qui ne le quitte plus d’une semelle et qu’il affectionne tout particulièrement.
Les «lucky mistakes» peuvent aboutir à des choses intéressantes. Certaines choses restent tout simplement incontrôlables. Sacha Hanlet