Luxemburger Wort

Parler autrement d’écologie

Pour faire bouger les mentalités, un cri d’espoir avec «La revanche des espèces menacées»

- Interview: Marc Thill

La planète se réchauffe et l’humanité ne fait rien. Dernier représenta­nt de son espèce, le président Dodo décide de se réfugier sur le nouveau continent de plastique, et de rassembler d’autres animaux en voie d’extinction ou supposés disparus afin de rejoindre la résistance. Ulysse Gry, dessinateu­r régulier pour «Médiapart» et coauteur avec son frère Gaspard Gry de la série «Un Monde en pièces» donne dans sa nouvelle BD la parole au «Front de Libération des Espèces Menacées». C’est un album plein d’humour, parfois un peu corrosif, mais tellement criant de vérité.

Ulysse Gry, ce sont les animaux qui prennent en main les choses, ce sont eux qui s’occupent d’une humanité qui va à sa perte. Comment vous est venu l’idée d’inverser la problémati­que?

Personne ne prend la défense des animaux, il ne reste qu’à euxmêmes de le faire, malheureus­ement. Je leur ai donné une vie, une parole pour faire cela. Mais comme beaucoup d’autres, je constate que les animaux disparaiss­ent de plus en plus et qu’on ne fait pas grand chose. Peut-être que le sujet est un peu plombant, un peu triste. C’est pourquoi je voulais aborder la disparitio­n du monde vivant sous forme d’humour, le prendre sous un autre angle et faire en sorte qu’on en parle de plus en plus.

De votre BD se dégage un rire féroce. Là aussi vous avez choisi une toute nouvelle voie dans ce débat qui n’a toujours pas abouti à une solution – sauver le monde...

De l’humour noir, oui, mais qui porte quand-même de l’espoir.

Ulysse Gry et son humour féroce.

Mon idée a été de faire quelque chose pour s’en sortir, pour donner des idées aux humains. On rigole, mais on a bien conscience de ce qui se passe. J’ai fait un contre-poids.

Vous illustrez vos images de nombreuses statistiqu­es. Par exemple vous expliquez que le monde compte actuelleme­nt 28 milliards d’animaux d’élevage, soit quatre bestiaux pour un humain, et que la durée moyenne de vie d’un jouet est de six mois, puis il est jeté. D’où avez-vous tiré tous ces chiffres?

J’ai lu les rapports qu’on peut télécharge­r sur les sites des organisati­ons, notamment celles de l’ONU. J’ai lu aussi de nombreux de Lucky Luke seront heureux également de la rencontre de Lucky Luke avec le fils d’un desperado et d’un gang familier.

Le Français Matthieu Bonhomme était déjà un grand fan de BD dans son enfance, notamment des «Schtroumpf­s». Trois fois lauréat du Festival internatio­nal de la bande dessinée d’Angoulême (Prix du meilleur album 2003 pour «L’âge de la raison»; Prix Intergénér­ations 2010 pour «Messire Guillaume»; Prix du public 2017 pour «L’homme qui a tiré sur Lucky Luke»), il est considéré aujourd’hui comme l’un des bédéistes les plus talentueux de sa génération.

Matthieu Bonhomme,

«Wanted Lucky», Editions Lucky, 68 pages, 15 euros. livres que je cite dans une bibliograp­hie, des articles de presse. Elizabeth Kolbert détaille dans son ouvrage «La sixième extinction» beaucoup de statistiqu­es.

Avez-vous été marqué par la lecture du roman «La ferme des animaux» de George Orwell?

Ulysse Gry,

«La revanche des espèces menacées»,

Editions Presque Lune,

80 pages, 16 euros.

Oui en effet, ma BD est un peu dans la même veine. Je l’ai lu ce livre, mais cela remonte à longtemps. Puis il y a aussi un peu des fables de La Fontaine, et également «Le Roman de Renard». C’est une vieille tradition littéraire de prêter langage aux animaux pour tendre un miroir à l’humanité.

Vous parlez de la Covid-19, notamment des masques qui traînent dans la nature et qui un jour feront apparaître un nouveau continent au milieu de l’océan, comme celui des plastiques, qui existe déjà...

Exactement. C’était pendant l’écriture de ma bande dessinée que la pandémie a pris son envol, et j’étais bien obligé de l’intégrer. Les masques qui sont certes importants, sont malheureus­ement aussi jetables, et on contribue à augmenter le volume des déchets.

... ce qui a donné à votre BD une actualité toute fraîche...

C’est un nouveau sujet, mais malheureus­ement il y en a toujours d’autres. Pour l’instant il y a des incendies au Canada, et les Koalas sont brûlés en Australie. D’ailleurs j’en parle de ceux-là.

D’après vous, pourquoi l’homme n’arrive-t-il pas à réagir à ses problèmes?

Il est clair que nous sommes en train de scier la branche sur laquelle nous sommes assis. L’homme se dissocie de la nature et surtout des animaux. Il ne se préoccupe aucunement de leur disparitio­n. Peut-être que c’est un sujet très triste. Présenté sous une autre forme, la mienne, peut-être que les gens se rendent mieux compte de ce qui se passe actuelleme­nt. C’est ce que j’espère en tout cas.

En lisant votre BD on deviendrai­t alors un peu moins autruche?

(rires) En effet on suit trop le modèle de l’autruche. dont le dessinateu­r dépeint l’enfer de la guerre par des images sans contours fait plus d’effet que les dessins réalistes de nombre de ses collègues artistes.

On retrouve le héros, Vincent Bosse, en 1860, sur les lieux même de l’événement. Devenu vieux il raconte son enrôlement pour fuir le service de la messe, comment il a survécu à ces batailles, et aux exactions qui ont suivi. Comment il a traversé ce monde de pillards devenu sans foi ni loi, tout en gardant les mains presque propres: «Je n’ai tué personne, moi», précise-t-il. Il pointe combien son innocence tranchait au milieu de cette boucherie.

«Le Tambour de la Moskova»,

Simon Spruyt, Le Lombard,

120 pages, 20 euros.

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Photo: privé
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