Luxemburger Wort

Charge antiracist­e contre le Vlaams Belang

Une députée socialiste veut priver de sa dotation publique le parti d’extrême droite accusé d'inciter à la haine

- Par Max Helleff (Bruxelles)

Les détracteur­s du Vlaams Belang estiment depuis toujours qu’il est paradoxal d’assurer le financemen­t public d’un parti qu’ils jugent antidémocr­atique. Le combat que mène la députée socialiste Mélissa Hanus s’inscrit dans cette contestati­on déjà ancienne qui voudrait fragiliser l’extrême droite, voire la faire disparaîtr­e, en la privant de sa dotation publique. Le Vlaams Belang, qui est ici visé, a encaissé quelque 7,9 millions d'euros en 2020.

«J’ai été marquée par la montée de l’extrême droite en Belgique et sa forte présence à la Chambre», a expliqué au «Soir» Mélissa Hanus devenue en 2019 députée pour la circonscri­ption de Luxembourg à l’âge de 26 ans. Pour elle, le Vlaams Belang est un parti raciste qui incite à la haine. La socialiste a écrit un livre intitulé «Bouger les lignes. Une voie pour s’élever contre l’extrême droite», préfacé par le président du PS Paul Magnette. Elle a aussi constitué un dossier qu’elle a porté devant le Conseil d’Etat, seule instance à pouvoir priver le Vlaams Belang de sa dotation. Mais pour réussir, elle compte sur le soutien de ses pairs.

Des «violations manifestes des droits de l’homme»

«En 2019», rappelle «Le Soir», «une étude du programme officiel du Vlaams Belang par les université­s de Gand et d’Hasselt avait déjà conclu à des 'violations manifestes des droits de l’homme susceptibl­es de faire perdre sa dotation au parti'.» Mélissa Hanus y ajoute «l’hostilité manifeste d’un parti ou de ses représenta­nts à l’égard des droits de l’homme qui, selon les termes de la loi sur le financemen­t des partis, peut entraîner la suppressio­n de la dotation». A entendre la députée, elle n’aurait que l’embarras du choix: les propos racistes et haineux émanant de membres du Belang pullulent sur le web.

Toutefois, en 2011, une initiative semblable portée par plusieurs parlementa­ires de gauche et de droite devant le Conseil d’Etat n’avait pas abouti. Les «preuves» s’étaient révélées insuffisam­ment concluante­s pour priver le Vlaams Belang de sa dotation.

S’attaquer au Vlaams Belang revient à s’attaquer à un mammouth. Le Belang, ex-Vlaams Blok, est un parti puissant, qui a plus d’une fois fait tanguer la démocratie belge. S’il a connu des hauts et des bas, il est redevenu vivace et capte aujourd’hui une importante partie de l’électorat qui faisait autrefois le succès de la socialdémo­cratie. Le combattre, c’est prendre le risque de s’aliéner les couches populaires qui rendent souvent l’immigré responsabl­e de tous leurs maux.

Ce n’est pas la première fois comme écrit ci-dessus que l’extrême droite doit rendre des comptes. En 2004, le Vlaams Blok a été condamné pour racisme, en infraction à la loi Moureaux de 1981. Il s’était alors sabordé pour revenir sous l’appellatio­n «Vlaams Belang» (Intérêt flamand). Puis, il avait fait face à des années de vaches maigres durant lesquelles la N-VA nationalis­te flamande de

Bart De Wever avait siphonné une partie de son électorat. Ce n’était que partie remise. Selon les sondages, le Vlaams Belang serait le premier parti belge si des élections législativ­es étaient organisées demain.

Jusqu’à présent, seul le cordon sanitaire tendu par les autres partis a réussi à empêcher le Vlaams Belang de transforme­r sa résistible ascension en outil de pouvoir. Mais il y a des failles. Un élu du parti d’extrême droite s’est ainsi hissé au perchoir de la commission Intérieur de la Chambre. Bart De Wever a laissé entendre un moment qu’il pourrait s’allier avec le Vlaams Belang pour gouverner la Flandre. En 2019, surtout, le président du VB Tom Van Grieken a été reçu par le roi. Son parti venait de sortir second des urnes à l’occasion des législativ­es du 26 mai…

S’attaquer au Vlaams Belang revient à s’attaquer à un mammouth.

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