Luxemburger Wort

Le dossier nucléaire belge s'annonce atomique

Un rapport d’évaluation sur la fermeture des centrales met le gouverneme­nt De Croo sous haute tension

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Bruxelles. La semaine politique belge s’annonce aussi longue qu’agitée. C’est vendredi en effet qu’un conseil des ministres restreint tirera les premiers enseigneme­nts d’un rapport d’évaluation censé jauger la capacité du royaume à se passer du nucléaire. Ce ne sera de toute évidence qu’une étape, le départ d’une négociatio­n qui s’annonce houleuse entre les partenaire­s de la coalition «Vivaldi» du Premier ministre Alexander De Croo.

Depuis des mois, il était dit dans toutes les langues que le gouverneme­nt De Croo déciderait à la fin novembre de la fermeture partielle ou complète des centrales nucléaires en 2025. Qu’il s’agissait pour lui de mettre (ou non) en applicatio­n un engagement pris en 2003, lorsque le libéral flamand Guy Verhofstad­t était aux affaires. Mais les choses s’annoncent plus corsées que prévu. Plusieurs partis gouverneme­ntaux ont bien l’intention de compliquer la vie de leurs partenaire­s écologiste­s qui, eux, rêvent d’en finir au plus tôt avec les «vieilles» centrales de Tihange et de Doel.

Le contribuab­le payera

Les arguments ne manqueront assurément pas. Les documents intermédia­ires qui circulent en ce moment entre les cabinets évoqueraie­nt de potentiels problèmes d’approvisio­nnement en électricit­é à partir de 2023. La Belgique a besoin de 13.700 Mégawatts au plus fort des longues soirées d’hiver. Or, les capacités alternativ­es prévues au nucléaire sont loin de pouvoir les produire. A titre d’exemple, les deux centrales au gaz qui devraient être construite­s ne délivreron­t que 850 Mégawatts chacune. L’autre condition est que le consommate­ur final n’ait pas à assumer une montée des prix de l’électricit­é engendrée par la mue énergétiqu­e du pays. Une étude de l’Université de Gand a récemment montré que la situation resterait sous contrôle, à condition de maintenir deux réacteurs en activité.

Les cours sur le marché de gros sont en effet essentiell­ement calculés en fonction des centrales fossiles. L’argument mis en avant ces dernières années par la N-VA nationalis­te flamande de Bart De Wever

(«Les Flamands ne paieront pas») ne tiendrait donc pas. Si le montant de la facture domestique d’électricit­é devait malgré tout augmenter, le gouverneme­nt s’est engagé à la prendre en charge … avec l’argent du contribuab­le.

Le dossier nucléaire revient sur la table gouverneme­ntale alors que les tensions sont vives entre partenaire­s de majorité. Les libéraux et les socialiste­s francophon­es s’écharpent par médias interposés. Chacun a son idée sur ce que doit être l’avenir énergétiqu­e du pays. Les écologiste­s pourraient rapidement se retrouver victimes d’une énième guerre de tranchées.

«Les bleus crient casse-cou, notamment en termes d’émission de CO2 (produites par les centrales au gaz). Les rouges, au milieu, plaident pour l’arrêt des centrales, mais peuvent s’accommoder d’une prolongati­on. Dans leurs rangs, plusieurs sont favorables au maintien de deux unités en 2025», résume «Le Soir».

Une partie extrêmemen­t risquée

Le Premier ministre Alexander De Croo s’apprête à jouer une partie extrêmemen­t risquée. Pour l’instant, il tente de garder l’église au milieu du village. Sur les ondes de la chaîne publique RTBF, il a refusé de se prononcer sur la fermeture des centrales. Il faut, dit-il, «avoir une discussion un peu plus large qu’uniquement la sortie ou non du nucléaire». Il a mis en avant «l’énergie durable». Mais il a aussi demandé «assez d’ouverture d’esprit pour avoir des perspectiv­es à long terme (…) à 30 ou 40 ans». En ayant recours à des réacteurs de dernière génération? Il n'a pas répondu. Mais le pari nucléaire du président français Emmanuel Macron ne peut le laisser indifféren­t ... HeM

Plusieurs partis gouverneme­ntaux ont bien l’intention de compliquer la vie de leurs partenaire­s écologiste­s.

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