Corinne Brever prend racine
La doyenne de la sélection féminine de rugby a toujours son sport chevillé au corps à 38 ans
Il faut manier les chiffres avec précaution. Ceux qui ont accompagné la dernière sortie de la sélection féminine luxembourgeoise de rugby à 7 lors de la Conference 1 disputée le week-end dernier à Belgrade sont toutefois encourageants. Six matches, trois victoires, trois défaites, une place de demi-finaliste et un quatrième rang final. «C’est super», s’enthousiasme Corinne Brever. A 38 ans, la doyenne de la sélection n’a rien perdu de sa motivation. Son discours est pétillant et son envie de faire avancer la mêlée est bien palpable. «Il nous manque encore quelques filles mais les lignes bougent», dit-elle. «Et surtout, les jeunes ont apporté un second souffle à cette discipline. Ce n’est pas rien dans ce format à 7 où la vitesse compte énormément.»
Dans la chaleur serbe, le VII luxembourgeois s’est avancé sans complexe dans cette épreuve considérée par les filles comme leur Championnat d’Europe. Le troisième échelon regroupait 13 nations. Les résultats laissent encore deviner pas mal d’écart entre les meilleures et les moins bonnes. «L’Autriche l’a emporté haut la main mais dans la division supérieure, elle a du mal à se maintenir», explique Brever.
Le Luxembourg à sa place
Le Luxembourg, lui, n’avait jamais fermé la marche dans ce genre de poules. Pas plus qu’il n’avait flirté avec une éventuelle montée. «Notre place est là. On n’a pas les moyens d’évoluer au-dessus pour l’instant. On a disputé une très bonne première mi-temps face à la Lettonie pour la troisième place, mais il nous a manqué un petit quelque chose.» Peut-être un peu de fraîcheur, sûrement beaucoup d’automatismes entre des filles qui se côtoient parfois à XV dans le club de Walferdange, mais qui travaillent rarement les spécificités du rugby à VII.
«Le terrain est le même, mais il faut jouer dans les espaces et éviter les contacts. C’est plus rapide, plus spectaculaire et sans doute plus agréable à regarder pour les spectateurs. Il existe peu de compétitions dans la région. En France, les déplacements sont trop longs et en Allemagne, le niveau est trop bas et les matches trop espacés.» Remise au goût du jour aux Jeux
Olympiques de Rio, la discipline apparaît aussi au programme des prochains Jeux des Petits Etats d’Europe à Malte l’été prochain. Et Brever a une petite idée derrière la tête. «Si on me sélectionne, je finirais bien ma carrière en équipe nationale là-bas.»
Avec le Monténégro, Andorre, Malte et Monaco présents aussi à Belgrade, le Luxembourg a pris le pouls de potentiels adversaires. «Le niveau est sensiblement le même mais on a un léger désavantage. Toutes les filles présentes ici ne sont pas éligibles pour les Jeux. Il leur faut un passeport et pas uniquement une preuve de résidence au pays depuis cinq ans. Ça concerne quatre ou cinq filles.»
Norwich comme point de départ
Et pour que le niveau progresse encore, la base de la pyramide doit être élargie. «Pour le moment, il y a une vingtaine de filles éligibles en sélection. C’est mieux mais pas encore assez. Les programmes scolaires s’adaptent et commencent à ramener des filles vers la discipline», explique une Corinne Brever contaminée par le virus durant son cursus scolaire.
«Je suis partie à Norwich faire des études de Business Management et je voulais absolument faire un sport d’équipes.» La jeune fille d’Huldange est bien tombée dans le Norfolk. Sa passion la suivra à Dublin où elle passe un master avant qu’une conversation avec une copine de Trêve la conduise au Luxembourg. «Je ne savais pas qu’il existait une équipe. Le club de Walferdange a ouvert une section féminine et je n’ai pas hésité longtemps.» Brever y est toujours. «On jouait le haut du classement en Division 2 cette saison mais on ne pouvait pas monter car on n’a pas deux équipes.»
On en revient au problème du nombre et à la popularisation d’un sport appelé à être à nouveau sous les feux des projecteurs en 2023 avec la Coupe du monde en France. Corinne Brever aura peut-être rangé son maillot de l’équipe nationale au placard à ce moment-là, «mais tant que mes jambes me portent, je continuerai en club», ponctue celle qui a refermé cette parenthèse sportive pour retrouver la scierie familiale dans le nord du pays.
Dans quelques semaines, il sera temps d’envoyer à nouveau du petit bois en mêlée.