Le jour du dépassement et l’indexation des salaires
Les coûts augmentent pour tous, mais la situation des gens évolue en proportion de ce qu’ils gagnent
Le Conseil supérieur pour un développement durable observe qu’il faudrait 7,99 planètes si la consommation de tous les habitants était pareille à celle des Luxembourgeois, et selon Natur & Ëmwelt, le 14 février sera l’«overshoot day» pour le Luxembourg. Et tous de crier au scandale avant de passer à l'ordre du jour et de s'inquiéter du pouvoir d’achat des Luxembourgeois et de l’indexation de leurs salaires, pensions etc. Qu’est-ce à dire?
Imaginons le niveau de la mer qui augmente et la possibilité d’élever le niveau du sol pour sauver les gens de la noyade. Plus vous serez exposés au danger, c’est-à-dire à proximité du littoral, moins vous gagnerez en altitude, alors que ceux qui ne risqueront rien, par exemple les montagnards, s’élèveraient d’autant plus qu’ils se trouveront en hauteur, voilà ce qui paraîtrait biscornu et absurde. Et pourtant, l’inflation des prix et l’indexation des salaires au Luxembourg fonctionnent selon une dynamique semblable et tout aussi déconcertante. Les coûts augmentent pareillement pour tous, mais la situation des gens évolue en proportion de l’ampleur de ce qu’ils gagnent, façon de garantir à beaucoup de Luxembourgeois de pouvoir s’acheter sept croissants et encore une brioche pour leur petitdéjeuner et à d’autres, les mal lotis, de ne gagner à peine de quoi rebondir, disons de pouvoir éviter que leur croûte de pain s’en aille en miettes.
Enfin, cette indexation fait monter les prix des produits qui circulent sur le marché luxembourgeois et que notre place commerciale offre à l’échelle mondiale, surtout les produits financiers, de façon à faire descendre les gens d’un échelon dans ces pays où il n’y a pas d’indexation des salaires ou des pensions d’ailleurs inexistantes, façon d’abaisser le terrain chez qui a déjà les pieds dans l’eau ou l’eau jusqu’au cou. L’indexation des salaires, n’est-ce pas une façon de justifier l’augmentation de nos prix afin de couvrir nos frais salariaux coûtant chers à qui dépend de nos services, une inflation artificielle au profit de notre situation économique nationale, façon de se faire soigner d’une crise sanitaire encore mal digérée tout en se faisant payer un lifting au nom d’une justice sociale intramuros selon le slogan «tous pour l’argent et l’argent pour les mieux payés»?
Alors comment faire pour survivre en ces temps de crise? D’accord pour une augmentation des minima sociaux et pour des aides raisonnables évitant à des gens de tomber sous le seuil de pauvreté, d’accord pour des efforts collectifs de solidarité. Mais l’indexation des salaires au Luxembourg au sein de l’Union européenne ainsi qu’au nom de l’équité sociale ou d’un commerce équitable, voilà de quoi s’étonner.
Marc Gilniat, Eppeldorf