Les partis belges vont se mettre à la diète
L'argent public sera moins abondant et mieux utilisé, affirment les formations politiques qui en dépendent
En février dernier, la Chambre avait approuvé une proposition de loi réduisant de 1,11% la dotation versée en 2022 aux partis politiques. Le geste se voulait exemplaire. Les partis allaient se serrer (un peu) la ceinture en renonçant à une petite partie des quelque 35 millions d'euros qui leur sont attribués. Le régime défini par une loi de 1989 serait ainsi retouché. La démocratie belge, volontiers ramenée par ses critiques à une particratie, en sortirait grandie.
Depuis, la crise est passée par là. Les finances publiques de la Belgique se sont à nouveau détériorées, comme vient de le rappeler la Commission européenne. Après débat, ce n'est plus 1,11% qui pourrait être retranché de la dotation fédérale des partis, mais 5,3%.
Cette mesure en suit une autre qui a fait beaucoup parler d'elle en octobre dernier: les membres du gouvernement De Croo ont accepté de voir leur salaire diminué de 8%. Dans la foulée, la coalition fédérale a encouragé les autres parlementaires du pays – régionaux et communautaires – à en faire de même. Et elle a incité la Chambre à geler les dotations des partis, avec à la clé une économie de quelque quatre millions d'euros pour les années 2023-2024. Elle précisait: «Il est également confirmé que la réforme du système de financement des partis sera poursuivie, comme l'a décidé la Chambre, notamment au travers d'un renforcement de la transparence des revenus et des dépenses et du contrôle de ceux-ci».
Éviter la corruption
Sous la pression des extrêmes – les communistes du PTB et le Vlaams Belang (extrême droite flamande) mais aussi des Verts, ce travail a repris. Un texte est prêt qui pourrait être soumis à débat dès la semaine prochaine.
Les critiques du financement des partis le jugent trop généreux en regard de ce qui se pratique dans d'autres pays. Mais les formations au pouvoir ont un autre avis: elles estiment que l'argent public qui leur est distribué les met à l'abri de la tentation d'aller chercher des fonds dans le privé, et donc d'avoir à renvoyer l'ascenseur à leurs «mécènes» dans un manque absolu de transparence. Sans parler du risque de corruption. Les affaires Dassault et Agusta, qui avaient révélé dans les années 80 des pratiques obscures dans le chef des socialistes francophones et flamands, sont encore dans toutes les têtes. C'est pourquoi plusieurs partis estiment qu'un financement public à 100% reste la meilleure solution.
Une réduction de la dotation de 5,3% apparaît donc aujourd'hui comme un moindre mal. Elle obligera les partis à se mettre un peu à la diète, sans nuire à leur fonctionnement et sans les contraindre à licencier.
En sus, la réduction de l'enveloppe pourrait s'accompagner d'une série de directives visant à son bon usage. Faut-il laisser les partis investir dans l'immobilier et s'enrichir ainsi à terme? La dotation peut-elle financer des campagnes publicitaires sur les réseaux sociaux? Les socialistes francophones et les chrétiens-démocrates flamands s'opposent tout particulièrement à de tels investissements.
Les partis gouvernementaux soutiennent avec plus ou moins d'enthousiasme la réduction de leur dotation. Les débats étant publics, une opposition trop franche reviendrait à faire le jeu du populisme ambiant et à prendre des coups. La discussion porte davantage sur l'ampleur de la diminution, les Verts avançant qu'elle pourrait atteindre jusqu'à 12% pour éviter que «le différentiel avec la rémunération de la population devienne trop grand», explique un député écologiste dans les colonnes du Soir. Mais ils sont seuls à vouloir aller aussi loin.
Les critiques du financement des partis le jugent trop généreux en regard de ce qui se pratique dans d'autres pays.