Luxemburger Wort

Nouveau départ pour le procès des attentats bruxellois

Les box de haute sécurité ont été démontés pour être remplacés par une structure davantage conforme au droit des accusés

- Par Max Helleff (Bruxelles)

C'est aujourd'hui que (re)commence le procès des attentats de Bruxelles, avec six semaines de retard sur le calendrier. Six semaines qui ont vu éclater une polémique aussi amère qu'évitable autour des box des accusés et qui se terminent avec l'intention de mener à bien les débats que tout le pays attend.

À la mi-octobre, le procès des attentats du 22 mars 2016 avait été suspendu par la présidente de la cour d'assises de Bruxelles. Les box des accusés, des «cages» conçues pour répondre à des impératifs de haute sécurité, violaient le droit à un procès équitable. Ils empêchaien­t la communicat­ion entre les avocats et leurs clients. Ils nuisaient à la participat­ion de ces derniers aux débats. Ils devaient donc être démontés. Ce qui fut fait, avant d'en construire de nouveaux. Dont coût 500.000 euros.

32 personnes innocentes tuées à l'aveugle

Les box nouvelle mouture sont davantage convention­nels. Les accusés s'y côtoient, sans séparation­s entre eux, comme ce fut le cas lors du procès des attentats parisiens. Estce trop beau pour ceux qui ont tué ou aidé à tuer à l'aveugle 32 personnes lors des attentats-suicides de Maelbeek et de Brussels Airport? La défense rappelle que la présomptio­n d'innocence vaut jusqu'au jugement. Quant aux parties civiles, selon un de leurs avocats, «elles ont conscience qu'il faut que tout le monde soit respecté dans ce procès pour que celui-ci se déroule au mieux».

Quoi qu'il en soit, le procès va pouvoir commencer par la constituti­on du jury. Il pourrait durer jusqu'à dix mois. Il aura à coeur – et la presse a mis la pression en ce sens – de se montrer à la hauteur des débats qui ont été menés jusqu'à l'été autour des attentats parisiens du 13 novembre 2015. Le profession­nalisme de la cour d'assises de Paris a été fortement souligné de ce côté de la frontière.

Il y a toutefois une différence de taille. À Paris, ce sont des magistrats profession­nels qui ont jugé. À Bruxelles, ce rôle est dévolu à un jury populaire, avec tout ce que cela implique de bon sens, de reflet de la société, mais aussi de méconnaiss­ance du droit et d'émotion. Ce pourrait être un obstacle majeur au bon déroulemen­t des débats. Mais tout cela reste bien sûr à démontrer.

Donner la parole aux victimes des attentats

Quant aux questions auxquelles doit répondre ce procès, elles n'ont pas varié. Pourquoi les kamikazes (les frères El Bakraoui et Najim Laachraoui) ont-ils décidé de frapper Bruxelles, alors que certains éléments de l'enquête laissent penser qu'ils voulaient à l'origine tuer de nouveau en France. Pourquoi Mohamed Abrini, l'«homme au chapeau», a-t-il fui la salle des départs de Zaventem juste avant l'explosion des bombes? Quel fut le rôle éventuel de Salah Abdeslam, seul survivant des attentats de Paris, arrêté quatre jours seulement avant les tueries bruxellois­es? Et celui des «petites mains» nommées Osama Krayem, Sofien Ayari, Ali El Haddad Asufi, Hervé Bayinga Muhirwa, Bilal El Makhoukhi, Smaïl et Ibrahim Farisi.

Oussama Atar, présumé mort, sera quant à lui jugé par défaut et défendu par un avocat comme l'exige le droit belge. Pour rappel, Atar a été condamné par contumace lors du procès des attentats de Paris à la perpétuité incompress­ible, en tant que chef de la cellule terroriste. Salah Abdeslam a été condamné à une peine de prison à perpétuité assortie d'une période de sécurité incompress­ible; idem pour Mohamed Abrini avec une période de sécurité de 22 ans.

Ce procès sera aussi l'occasion de donner la parole aux victimes des attentats – 960 personnes se sont pourvues parties civiles. Et il permettra peut-être à la Belgique de comprendre mieux ce qui a pu conduire aux événements du 22 mars 2016. Les années qui se sont écoulées depuis la tragédie n'ont pas effacé l'incompréhe­nsion.

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Photo: AFP Le box des accusés du procès des attentats de Bruxelles viole l'article 6 de la convention des droits de l'homme.

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