Luxemburger Wort

La sélection luxembourg­eoise de rugby à XV se dirige vers une année blanche

Nouveau rebondisse­ment dans la Conférence 1 Nord avec l’annulation des matchs face à la Moldavie et en République tchèque

- Par Christophe Nadin

La situation pourrait prêter le flanc à l’ironie mais on n’était pas d’humeur badine dans le monde de l’ovalie au Luxembourg ces dernières heures. Déjà amputée de plusieurs matchs, la Conférence 1 Nord se retrouve carrément sens dessus dessous avec de nouveaux forfaits qui rendent le classement illisible.

Le Luxembourg, engagé dans cette sorte de tournoi des V nations de quatrième catégorie en Europe, vient d’apprendre que la Moldavie ne se déplacera pas au Stade de Luxembourg le vendredi 14 avril en soirée. «C’est un problème financier», résume le président de la Fédération luxembourg­eoise (FLR) Jean-François Boulot. «Les subsides alloués au sport ont été redirigés vers le ministère de la Défense et celui de l'Énergie.» Dans la foulée, le conseil d’administra­tion de la FLR s’est réuni et a voté à l’unanimité l’annulation du déplacemen­t du XV grand-ducal en République tchèque le 22 avril. «Nous voulons présenter un budget à l’équilibre. Nos rentrées sponsoring ont baissé de 60 % par rapport à il y a trois ans. Nous allons donc mettre le paquet sur le rugby à VII.»

Des coûts exponentie­ls

On se dirige donc vers une année blanche pour le rugby à XV au Luxembourg. La saga avait débuté à l’automne 2022 par un déplacemen­t en Lettonie qui n’a jamais eu lieu avant que la Hongrie décide, elle, de ne pas venir au Grand-Duché. Les pays de l’Est sont affectés au premier plan par la guerre en Ukraine et tout le monde paie les pots cassés. Cette situation kafkaïenne ne réjouit pas l’entraîneur. «Ça fait deux fois que l’on réunit le groupe sur trois jours. Une première fois en septembre, une seconde fois en février. C’est un exercice compliqué. Rien que pour harmoniser les agendas. Ces regroupeme­nts m’ont envoyé des signes encouragea­nts et validaient le travail de mon prédécesse­ur. Et aujourd’hui, on se retrouve sans compétitio­n», constate Alexandre Benedetti. Lorsqu’il change de casquette et porte celle de directeur technique national, le Français comprend le choix de sa gouvernanc­e. «Pourquoi supporteri­ons-nous tous les problèmes financiers? Dans six mois, on se rendra compte qu’on a trop tiré sur la corde. On épargne au bas mot 30.000 euros en annulant notre déplacemen­t. Parce qu’en plus, on nous avait envoyé à Ostrava.»

Les coûts des déplacemen­ts et des hébergemen­ts ont explosé ces derniers mois et causent bien des problèmes aux nations moins huppées. «Même les Suisses que l’on pourrait croire au-dessus de la mêlée à ce sujet, galèrent», précise Boulot. «Ce que je regrette, c’est qu’une grande partie du budget européen soit absorbée par le Championsh­ip, c’est-à-dire l’antichambr­e du VI Nations avec des pays comme la Géorgie, le Portugal et la Belgique pour ne citer qu’eux.»

Les questions en cascade se bousculent désormais. La première porte sur le format initialeme­nt bâti sur deux années avec des matchs allers-retours. «Je ne vois pas comment on va pouvoir le maintenir d’autant que se profile un autre problème de taille. La campagne doit reprendre en septembre et en octobre, en plein pendant la Coupe du monde qui se déroulera en France. Notre cadre est composé de joueurs d’origine britanniqu­e, française, néo-zélandaise, sud-africaine… Bref, des gars qui comptent se déplacer pour supporter leur XV national. On ne peut donc pas jouer à ce moment-là», reprend Benedetti. Un casse-tête de plus pour Rugby Europe, l’équivalent de l’UEFA.

Avec les autres petits pays?

Boulot est conscient que la sélection à XV doit retrouver le chemin des terrains coûte que coûte. «Quitte à changer de formule et à en inventer une nouvelle avec d’autres petits pays d’Europe. Tant pis si ça ne se fait plus sous l’égide de Rugby Europe.»

Les joueurs, eux, n’ont plus que leur club ou leur université pour garder le rythme. «Mais rien ne remplace la compétitio­n», rappelle Benedetti. «Certains ont pris sur eux pendant le Covid et se sont accrochés pour ne pas se retirer dans l’anonymat. Je n’ai aucune certitude aujourd’hui mais j’ai bien peur de ne plus retrouver certains gars au prochain rassemblem­ent.»

C’est donc le rugby à VII qui va rythmer la seconde partie de l’année avec l’apparition de la discipline aux prochains Jeux des Petits Etats d’Europe à Malte à la fin du mois de mai. Là encore, certains vont rester sur la touche parce qu’ils n’ont pas le profil de l’emploi. On pense à ceux que l’on appelle les «gros» familièrem­ent, c’est-à-dire les avants.

L’équipe féminine est elle aussi doublement concernée par cette version réduite du rugby puisque dans la foulée des JPEE, elle prendra la direction de Belgrade pour y disputer un tournoi européen. «Avant, ça coûtait 6.000 euros. Aujourd’hui, c’est le double. J’espère que l’on n’aura pas de problèmes financiers d’ici là», ponctuait un Benedetti dépité par le flou ambiant qui entoure la discipline en ce moment.

Nous voulons présenter un budget à l’équilibre. Nos rentrées sponsoring ont baissé de 60 % par rapport à il y a trois ans. Nous allons donc mettre le paquet sur le rugby à VII. Jean-François Boulot

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