France/Luxembourg: des analogies?
L’Assemblée nationale a récemment accouché dans la douleur d’une loi importante portant sur l’immigration. Beaucoup de députés de la majorité présidentielle ont ouvertement reconnu être persuadés que certains articles de la loi étaient inconstitutionnels, mais que, pour des raisons politiques, ils l’ont quandmême votées. D’autres menacent: si jamais le Conseil constitutionnel devait avoir l’audace de «retoquer» la loi, il n’y aurait qu’à supprimer ce Conseil, y compris le Conseil d’Etat, la Convention des droits de l’Homme et à modifier la Constitution. On verra.
Chez nous fait rage une polémique autour des dispositions légales et règlementaires concernant la mendicité en général et à Luxembourg-Ville en particulier. La boîte de Pandore est ainsi ouverte.
N’avions-nous pas d’autres chats à fouetter par ce temps hivernal(en France on ne discute plus que de savoir s’il fallait faire entrer la sulfureuse Rachida Dati au sein du gouvernement, comme si la France ne connaissait pas d’autres problèmes)?
Où se situe l’analogie? Les initiateurs de la règlementation, ministères et commune concernée, ne cessent de nous répéter que l’interdiction de mendier générale ne s’appliquerait qu’à la mendicité agressive et à celle organisée non définies, et ceci en dépit de la formulation en termes généraux du règlement communal que la police , espère-t-on, appliquera avec doigté. Question: depuis quand dans un Etat de droit la police décide de l’application ou non de dispositions légales? Certains qualifieront cela d’ahurissant. Appliquons le principe qui dit que là où la loi ne distingue pas, nous ne distinguons pas non plus (ubi lex non distinguit, nec nos debemus distinguere).
On est alors en droit de se demander: les responsables politiques devaient connaître les obstacles juridiques(et l’erreur commise par nos députés qui jadis ont supprimé l’article afférent du Code pénal). Pourquoi alors persister? Avec sans doute une arrière-pensée. Pour leurs électeurs qui sont en bonne partie favorables à la mesure allons le plus loin possible et malheur à ceux qui nous en empêcheront, en première ligne les juridictions, parquets et les tribunaux, qui, comme la Cour constitutionnelle en France, en supporteront la responsabilité. Ah oui, le droit ne serait pas une science exacte et dès lors malléable à volonté. Il s’impose néanmoins aux responsables politiques et aux juges, et, au demeurant, les lois doivent être conçues avec rigueur et clarté.
Alors: patere legem quem fecisti, disaient les Romains, soumets- toi, même-toi, à la loi que tu a faite.
Et finalement une remarque: notre Code pénal actuel souvent modifié date de 1879 et non pas de 1808. Une future police municipale ne serait pas en mesure de lutter efficacement contre le crime organisé fût-il celui de de la mendicité.