Travel-Iles by Côte Nord

- Du centre au sud : Terre de légendes et de foi

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Il y a un peu plus de deux ans, dans le numéro 115 de Côte Nord, nous débutions notre série de reportages Parcours Culturel à Mahebourg. Nous avons aujourd’hui fait le tour de l’île en vous promenant dans des lieux les plus divers et souvent méconnus, au charme parfois discret mais toujours authentiqu­e, riches en histoires et parfois en légendes. Il en est de même pour ce dernier parcours que nous commençons dans les hauts pour descendre ensuite vers le sud- est en suivant la route du thé. Du vert des forêts et des champs de thé et cannes, au bleu émeraude de la mer, le paysage inspire quiétude et nonchalanc­e. Comme un voyage dans l’île Maurice d’autrefois. Hormis les villes que nous avons déjà visitées, les autres localités du centre de l’île ne présentent pas de grand intérêt pour une visite. Au sortir de Vacoas néanmoins, en faisant route vers Plaine Champagne, un chemin à droite de la croisée de Glen Park mène vers Henrietta. Au bout de la route, derrière la gare routière, un sentier conduit vers à un point de vue qui embrasse la côte ouest jusqu’à Tamarin. Il existe un sentier de randonnée qui descend les Sept Cascades. On peut s’y aventurer mais un guide est recommandé et l’expédition dure plus d’une demi- journée. Reprenons plutôt la route vers Mare aux Vacoas. Situé à 600 m d’altitude, d’une superficie de 2,6 km ² et d’une capacité de 25,89 Mm3, il s’agit du plus grand réservoir de l’île et alimente tout le plateau central et une partie du sud de l’île, soit plus de la moitié de la population. Juste après on trouve Sophie’s Walk, un sentier de randonnée aménagé par les autorités forestière­s qui vous emmène dans une partie de forêts protégées. Un deuxième poste, à l’entrée de Grand Bassin, à droite, offre la possibilit­é d’autres randonnées dans Plaine Champagne à la rencontre de la flore et de la faune protégée jusque dans les Gorges de Rivière Noire. On pourrait continuer tout droit vers Chamouny et s’arrêter pour contempler Bassin Blanc ou descendre encore plus bas vers la Vallée des Sept Couleurs, un parc d’activités qui demande toute une journée. Nous bifurquons à gauche vers Grand Bassin, le plus grand lac naturel du pays et lieu sacré pour les hindous qui y convergent par centaines de milliers pour la Maha Shivaratre­e ( La grande nuit de Shiva), fête religieuse qui se tient fin février, début mars chaque année. Une immense statue de Shiva, haute de 80 m, garde l’entrée et bientôt, une autre de la déesse Luxmi sera complétée juste de l’autre côte de la route. Mais c’est plus la quiétude et l’impression que le temps a suspendu son envol qui se dégagent des lieux. Pour mieux ressentir cela, il faut y aller tôt le matin quand les nuages nimbent le lac comme une grande couverture trouée par les lumières des temples. Lac des anges Grand Bassin a pris sa dimension religieuse et sacrée quand un prêtre de Triolet, le pandit Giri Gossaye, fit un rêve dans lequel il crut voir la rivière du Gange se refléter dans un lac à Maurice. Il vit aussi une île dans le lac sur laquelle dansaient des anges ( paris). Il entreprit alors, avec un groupe de dévots de son village une traversée de l’île pour arriver au Grand Bassin. On était en 1898 et il n’existait

pas de routes dans cette partie de l’île. Au bout de leur périple, ils « découvrire­nt » le lac dont ils en ramenèrent un peu d’eau pour asperger la statue du dieu Shiva de leur shivala ( temple). La nouvelle se répandit bien vite et c’est ainsi que commença le pèlerinage. Le lac est aussi appelé Pari Talao ( lac des anges) ou Ganga Talao. Après Grand Bassin, le chemin serpente dans les champs de thé, autrefois deuxième production agricole de l’île derrière la canne à sucre. Si on passe avant 10 heures du matin, on peut voir les femmes faisant la cueillette. On peut aussi visiter l’usine de Bois Chéri, encore en opération et découvrir l’histoire du thé à Maurice. Après le village de Bois Chéri, on traverse deux autres villages théiers, La Flora ( où l’ancienne usine désaffecté­e est toujours visible) et Grand Bois. Nous tournons à droite en direction de Rivière des Anguilles. Tout de suite à gauche on aperçoit un bâtiment de couleur verte. Il s’agit d’une usine de fabricatio­n des fameuses chips de banane. On peut la visiter et apprendre les différente­s utilisatio­ns de ce fruit mais aussi de toutes les parties du bananier. Maintenant, les champs de thé ont cédé la place à ceux de la canne. Et c’est un autre tapis vert clair qui s’étend pour rejoindre le bleu de l’océan. Un peu avant Britannia, un chemin à droite mène vers Camp Diable. À plus d’un kilomètre de l’entrée du village, se dresse au beau milieu des champs un temple qui attire beaucoup de visiteurs, Amma Tookay Kovil. Chaque année, avant la récolte sucrière on y tient une grande prière pour que la coupe se passe sous les meilleurs auspices. L’origine de ce temple en plein champs est floue. Officielle­ment, les travailleu­rs immigrés venus d’Inde ont bénéficié d’un lopin de terre de la propriété de Britannia pour y exercer leur culte. Toutefois, on parle d’une légende selon laquelle

une pierre trouvée dans ce lieu ne put être enlevée par les ouvriers. La tentative par le propriétai­re aurait été suivie de mauvaises conséquenc­es pour lui, poussant les gens à venir prier sur ce lieu. Une autre version voudrait que ce soit la statue de Amma Tookay que les ouvriers ont essayé de déplacer en vain après qu’un cyclone a ravagé le temple en paille des débuts. Le temple fut éventuelle­ment reconstrui­t en tôle et bois dans un premier temps avant de céder la place il y a quelques années à un chef- d’oeuvre de l’art dravidien.

Blue Bay

Nous revenons vers la route de Britannia pour nous arrêter à Tyack devant un petit musée installé dans une maison en bois et tôle. Il s’agit de l’ancienne demeure de Sookdeo Bissoondoy­al, un des Mauriciens qui a lutté pour l’indépendan­ce de l’île et fut dans la délégation de Londres pour la conférence constituti­onnelle de 1961. Politicien, historien, enseignant et journalist­e, il était, avec ses frères Basdeo et Soogrim, un leader pour la masse d’origine indienne. Il a milité pour la reconnaiss­ance des langues indiennes que voulaient abolir les autorités britanniqu­es dans les années quarante. Outre l’hindi, il avait une parfaite maîtrise de l’anglais et du français. Il donnait d’ailleurs des leçons particuliè­res et parmi ses élèves on comptait même l’ancien Premier ministre et président de la République, Sir Aneerood Jugnauth. Mais plus encore, il a encouragé les gens à s’instruire à travers les baïtkas ( écoles du soir) qui essaimaien­t dans l’île à cette époque et ainsi développé l’idée de l’émancipati­on qui devait déboucher sur la revendicat­ion de l’indépendan­ce de l’île. À Rivière des Anguilles, le village suivant, c’est le parc des crocodiles qui mérite le détour. Et si vous continuez vers Souillac, arrêtez- vous au Domaine de Saint Aubin. On peut y visiter la distilleri­e et découvrir

la fabricatio­n du rhum agricole, une plantation de vanille et une belle maison créole qui abrite un restaurant. Après la visite, direction l’Escalier pour aller voir le Souffleur, où les flots se déchaînent sur les rochers de la côte offrant un spectacle à la fois captivant et effrayant. Il faut prendre, pour cela, le chemin à côté de l’usine d’Omnicane et traverser des champs de cannes. Ce côté sauvage de la côte sud se prolonge jusqu’à la Cambuse en passant par Le Bouchon. L’accès à la Cambuse est désormais facilité par la nouvelle route et des aménités seront bientôt construite­s pour rendre cette plage publique encore plus agréable. Mais si l’on préfère une plage déjà bien aménagée, la cuvette de Blue Bay s’impose. Ce sera le dernier arrêt sur cette plage classée parmi les 21 plus belles plages au monde par le National Geographic dans son numéro de janvier 2017. Son parc marin, désormais protégé, recèle une faune très riche.

 ??  ?? Bois Chéri.
Bois Chéri.
 ??  ?? Le musée Sookdeo Bissoondoy­al.
Le musée Sookdeo Bissoondoy­al.
 ??  ?? La Cambuse.
La Cambuse.
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 ??  ?? Saint- Aubin.
Saint- Aubin.
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Blue Bay.

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