CONVERSATIONS
entre artistes, étudiants et professionnels
Le Musée d'Histoire Naturelle de Port-Louis, fermé pendant deux ans pour rénovation, a accueilli deux mois après sa réouverture, CONVERSATIONS, une exposition conçue en étroite collaboration avec des acteurs culturels et institutionnels de Maurice et de La Réunion.
Organisée par l’Institut Français de Maurice, CONVERSATIONS est née de la volonté de créer une rencontre entre des oeuvres réalisées par les grands noms de l’art du XXe siècle, sélectionnées dans la collection du FRAC Réunion et celles d’artistes contemporains de l’océan Indien. L’exposition qui a d’abord été présentée à La Réunion à la Maison Bédier, s’est ouverte à Maurice le 28 septembre dernier jusqu’au 30 novembre 2019. À travers cette initiative, l’Institut français de Maurice poursuit ici ses objectifs de partage, de dialogue entre les cultures et de diffusion de la création contemporaine. CONVERSATIONS se veut résolument plurielle, populaire, exigeante mais très ouverte. Elle s’inscrit dans un objectif de coopération culturelle, de dialogue entre l’art et le public.
Ce qui peut expliquer le choix du Musée d’Histoire Naturelle de Port-Louis pour ce projet. Construit entre 1880 et 1884 au centre de la capitale, il est le plus ancien des musées de Maurice et parmi les plus anciens en Afrique australe. Le musée est un centre de documentation comptant une grande collection de livres, en partie offerte par Sir Virgil Naz, F. Lienard de Lamivoye et Julien Desjardins ; il est aussi un centre d’éducation des différents types de faune et flore endémiques de Maurice et des oiseaux de l’archipel
des Mascareignes.
L’exposition s’est tenue au premier étage du bâtiment, permettant au public de découvrir un lieu méconnu. « Dans sa nouvelle édition, l’exposition rassemble - aux côtés des grands maîtres du surréalisme - six artistes des îles soeurs et quatorze oeuvres puisées au coeur de leurs ateliers.
Elle contribue à mettre en valeur la remarquable diversité créatrice de la scène indianocéanique et participe à mieux faire connaître les plasticiens qui vivent et travaillent dans cette partie du monde », explique Cathy Cancade, commissaire d’exposition. « Quand les artistes de notre siècle côtoient les pères fondateurs de la pensée surréaliste et de l’abstraction, un dialogue décalé et poétique s’engage ravivant l’esprit révolutionnaire de cette avant-garde. La discussion se construit tout au long d’un parcours presque labyrinthique. »
Jeu graphique
« C’est dans un jeu graphique que les oeuvres s’entrecroisent et se livrent peu à peu au regard du visiteur. Se dévoilent graduellement les ponts et les liens qui unissent et séparent - à presque un siècle de distance - ces mondes et ces artistes... »
On y découvre la peinture intuitive et expérimentale de Cristof Dènmont côtoyant de près l’univers calligraphique et onirique du maître catalan Joan Miró. À quelques pas de là, les sublimes et énigmatiques Matrices en porcelaine d’Abel Techer entrent en dialogue avec la grande toile colorée et graphique de Simon Back. Ces deux oeuvres s’associent par constructions analogiques, esthétique et poétique à la magnifique lithographie Trois OEufs de l’Américain Alexander Calder.
On trouve aussi l’oeuvre d’Oliver Maingard dans une approche minimaliste. Aussi Banatu III et Stickman 1 et 2 font merveilleusement écho aux figures hybrides et symboliques du Cubain Wifredo Lam et de Clotilde
Provansal. La vision poétique et mythologique de Malcolm de Chazal entre en résonance avec Spaciousness and claustrophobia signée Salim Currimjee où le sujet devient objet.
« C’est dans un jeu graphique que les oeuvres s’entrecroisent et se livrent peu à peu au regard du visiteur. Se dévoilent graduellement les ponts et les liens qui unissent et séparent - à presque un siècle de distance - ces mondes et ces artistes. Cette traversée en pointillé mêle peinture et gravure, dessin, volume et photographie, et nous entraîne au coeur d’une épopée fantasmagorique. Se jouant de superpositions esthétiques et de juxtapositions sémantiques, cette proposition polymorphe convie le regardeur à une approche de l’histoire de l’art à travers deux époques et plusieurs continents », nous dit Cathy Cancade.
Une exposition exceptionnelle et une occasion de voir des artistes comme Joan Miró dont l’oeuvre est indissociablement liée aux moments qu’il traverse, à son intimité, aux lieux où il crée : son enfance, Paris et les surréalistes, la guerre d’Espagne, la Seconde Guerre mondiale, la paix retrouvée… et de retrouver Malcolm de Chazal, envoûté par son île qu’il narre à travers ses paysages, la beauté et la simplicité d’une nature foisonnante. Mais aussi de rencontrer les contemporains comme Salim Currimjee, « un visiteur du monde, qui déambule dans un univers où l’espace est l’écho de notre perception sensible et physique » ou Simon Back dont le travail évoque la relation que l’homme tisse avec son territoire et les conséquences qui en découlent.