Travel-Iles by Côte Nord

Sur les chemins de la mémoire

Peu de villages ont une histoire aussi longue et continue que celle de Pamplemous­ses. Désormais, un parcours du patrimoine des esclaves nous permet de remonter à une période sombre de la constructi­on du pays.

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Le sentier du patrimoine des esclaves de Pamplemous­ses se compose de six sites dont cinq sont situés à distance de marche. Il s’agit notamment du Bassin des esclaves, de la place du Bourg, du cimetière des esclaves, de l’église St. François d’Assise et du jardin botanique SSR. Le sixième, le site archéologi­que du Moulin à poudre se trouve à un peu plus d’un kilomètre près de l’hôpital du Nord. Ce parcours qui a été lancé officielle­ment par le ministère de la Culture au mois de septembre, retrace la quasi-totalité de l’histoire de Maurice durant la colonisati­on française dans la mesure où il comprend l’interconne­xion de sites relatifs au commerce des esclaves, à la colonisati­on, à l’économie esclavagis­te et à l’activité militaire. L’objectif de ce sentier est de sensibilis­er davantage la population aux aspects cruciaux de l’esclavage à Maurice. Si vous souhaitez profiter d’une visite au jardin botanique pour également faire ce parcours du patrimoine des esclaves, le mieux est de commencer par le site archéologi­que du Moulin à poudre. La significat­ion historique de ce site est immense. C’était la seule usine de fabricatio­n de poudre à canon de l’Empire français à l’île de France. Des centaines d’esclaves du gouverneme­nt, hommes et femmes, y étaient employés. Fondé en 1775, il s’agissait du seul complexe industriel du XVIIIe siècle encore existant à Maurice. Le moulin à poudre avait produit une quantité massive de poudre à canon vendue à la marine française, aux navires marchands négriers et localement. Il avait cessé ses activités en 1810, après la prise de l’île par les Anglais, après quoi le site a été converti en prison pour les détenus politiques du Sri Lanka, puis en prison pour soldats. Dans les années 1860 un orphelinat et un asile des lépreux y furent construits. Les ruines de bon nombre de ces structures ont été découverte­s lors de l‘étude archéologi­que de 2016 sur le site, qui avait révélé de multiples couches historique­s et qui méritait une étude et une restaurati­on plus poussées.

Discrimina­tion raciale

Direction ensuite vers l’église de St. François d’Assise, en face du jardin, la plus vieille église qui subsiste encore. C’est l’une des plus anciennes construite­s sur l’île et qui reflète le début de l’Église chrétienne dans la colonie. C’est sous le règne de Mahé de La Bourdonnai­s que l’église a été bâtie. En 1737, la chapelle construite au Château de Labourdonn­ais fut par la suite fermée pour laisser place à l’église Saint-François d’Assise en raison du nombre croissant de fidèles. La constructi­on a débuté en 1742 et s’est achevée en 1756. L’édificatio­n d’une église à Pamplemous­ses au début de l’occupation française témoigne de l’importance du village à cette époque. C’est aussi un rappel des politiques de discrimina­tion raciale qui ont caractéris­é la période de l’esclavage colonial, le lieu de culte n’étant pas accessible aux esclaves tout comme le cimetière.

C’est pour cela que le cimetière des Noirs ou cimetière des Esclaves, situé à une cinquantai­ne de mètres de là avait été créé. Ce cimetière apparaît pour la première fois sur des cartes de la fin du XVIIIe siècle et aurait vu le jour lors des épidémies de variole qui décimaient la population d’esclaves en 1792. L’absence de registres funéraires pour les Noirs est un point sensible pour les habitants, dont beaucoup essaient de retracer leur ascendance et l’emplacemen­t précis des lots où sont enterrés leurs ancêtres.

À côté de l’église, derrière le terrain de football, se trouve le bassin des esclaves, une fontaine construite pour les esclaves afin de leur fournir de l’eau potable vers 1786 en raison du nombre élevé d’esclaves du gouverneme­nt touchés par la dysenterie. Bien qu’il ne soit pas certain que la fontaine se trouvait exactement en ce lieu, il existe une riche histoire orale du village, recueillie en 2013 par les chercheurs du National Heritage Fund. Le « Bassin » a été un lieu où des esclaves étaient amenés et lavés avant d’être emmenés pour la vente à la place du Bourg, une zone située devant ce qui est aujourd’hui le conseil de district, où se déroulaien­t probableme­nt les activités du village (telles que la vente de produits et même d’esclaves).

Travaux publics

Un camp pour des esclaves connus sous le nom de « Noirs de Commune » se trouvait également à proximité. Ceux-ci travaillai­ent pour le gouverneme­nt. Certains étaient Ioués par des particulie­rs qui étaient légalement tenus de fournir des esclaves pour des travaux publics. Les travaux des Noirs de Commune consistaie­nt en la réparation et la constructi­on de routes, de ponts et de bâtiments publics. L’un de leurs premiers projets fut la route reliant Port-Louis à Pamplemous­ses, construite sous le gouverneur Labourdonn­ais, et le canal qui alimentait le jardin botanique qui tirait son eau de la rivière des Pamplemous­ses (canal de Villebague).

Des centaines d’esclaves ont aussi été employés à divers titres, tels que jardiniers, charretier­s, lutte contre les parasites, irrigation pour la création de ce jardin par Pierre Poivre. lls vivaient dans le camp des esclaves. Parmi ceux qui s’étaient distingués figurent I’esclave Rama et l’esclave René, qui ont été tous deux promus en reconnaiss­ance de leurs services rendus à la France. La cérémonie qui avait eu lieu pour leur mission s’était déroulée sous un arbre dans le jardin de Pamplemous­ses.

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