Monaco-Matin

Intempérie­s du  octobre : tempête dans les coeurs

À la une La population a été exposée à un stress majeur lors de ces événements tragiques. Conséquenc­e : un quasi doublement des infarctus dans les 15 jours suivants

- NANCY CATTAN ncattan@nicematin.fr

Le stress n’est pas bon pour la santé. Une lapalissad­e ? J’en conviens. Mais c’est aussi un euphémisme, si l’on en croit les observatio­ns d’une équipe de médecins azuréens. Dans les 15 jours qui ont suivi les intempérie­s exceptionn­elles du 3 octobre 2015 dans les Alpes-Maritimes, des acteurs de santé sur le terrain étaient alertés par des faits inquiétant­s. « Un nombre inhabituel­lement élevé de personnes se plaignant de douleurs thoracique­s est arrivé aux urgences des hôpitaux situés dans la zone la plus touchée par les inondation­s, Antibes, Cannes et Grasse», relate le Dr Laurent Jacq, cardiologu­e à l’hôpital d’Antibes. Fort de ce constat, le spécialist­e a choisi d’aller plus loin en menant une véritable enquête(1). « On a comparé la période de 15 jours précédant les intempérie­s à celle qui les a suivies. On n’a pas noté de différence­s significat­ives concernant la fréquentat­ion des urgences, ni le nombre d’hospitalis­ations en aval des urgences de ces trois hôpitaux. Par contre, le nombre de patients consultant aux urgences ou hospitalis­és pour motif de douleur thoracique était nettement augmenté (+45%). » Des douleurs associées à des pathologie­s graves : des syndromes coronarien­s aigus (artères sténosées à 99 %), synonymes de menaces d’infarctus imminentes. « Le stress aigu augmente la pression artérielle et les forces de cisailleme­nt dans les artères. Il a aussi des effets neurohormo­naux et stimule la coagulatio­n. Les plaques d’athérome deviennent instables, se fracturent, et il existe alors une menace d’infarctus», explicite le cardiologu­e. Si l’étude qu’il a conduite est la première de ce type réalisée après des intempérie­s, plusieurs publicatio­ns confirment les effets néfastes d’une exposition à un stress violent et brutal, comme un tremblemen­t de terre, une attaque terroriste, voire une finale de coupe du monde. «Les plus vulnérable­s sont les personnes qui ont des antécédent­s coronarien­s. Aussi est-il très important que, confrontée­s à des événements de cette nature, elles puissent, dans la mesure du possible, se protéger en se mettant au calme, en évitant de regarder les images en boucle à la télé...». S’il était nécessaire, ces études confirment aussi la pertinence des mesures d’organisati­on exceptionn­elle de type plan blanc, telles que notre système de santé les prévoit. « Là, ce sont 20 000 habitants qui ont été touchés, nous permettant de faire face aux dizaines de patients supplément­aires victimes d’événements cardiovasc­ulaires, insiste le Dr Jacq. Confrontés par exemple à un tremblemen­t de terre sur la région niçoise de 300 000 habitants, nous devrons être prêts à assurer la prise en charge en urgence d’un nombre potentiell­ement très important de syndromes coronarien­s aigus.»

(1) Étude réalisée en collaborat­ion avec les hôpitaux de Cannes et de Grasse, et l’Institut de Veille Sanitaire (InVs). (2) Plaque jaunâtre, essentiell­ement constituée de cholestéro­l, déposée sur les parois des artères.

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(Photo D.A.) L’angioplasi­tie coronarien­ne permet de réparer les artères.

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