Monaco-Matin

Denis, Biot: « Je veux que notre action judiciaire serve d’exemple! »

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Comment se redresser quand on perd sa maison, la nuit du 3 au 4 octobre 2015, qu’on sauve sa fille in extremis des flots, qu’une grande partie du matériel de son entreprise est détruite, et surtout que la grand-mère, Jacqueline Colombiet, 91 ans, meurt noyée dans le même temps à la maison de retraite de Biot, Le Clos Saint-Grégoire ? C’est l’incroyable histoire de Denis et Sandrine Delaup que NiceMatin vous révélait, il y a un an. Denis n’a repris le travail qu’en septembre, sa femme est toujours arrêtée, leur grande fille reste traumatisé­e. Et la petite, Andrea, 10 ans, sauvée sous 1,50 mètre d’eau par son père, ne cesse de parler de la grand-mère disparue. La reconstruc­tion physique, psychologi­que est en marche, mais à quel prix ? Superviser l’énorme chantier de rénovation de leur belle demeure, suivre la masse de papiers administra­tifs demandée par les assurances, se rendre chez le psy. Voilà le quotidien de la famille Delaup depuis un an. « Psychologi­quement je suis détruit, mort, témoigne Denis Delaup. Depuis le décès de Jacqueline Colombiet, la grand-mère de mon épouse, je n’arrive pas à m’en remettre. La vie avec ma femme, c’est grâce à elle. Elle était cliente de mon restaurant, elle nous a mis sur le chemin tous les deux. C’est très douloureux, surtout en sachant dans quelles conditions elle est décédée, invalide, noyée au bout d’un couloir, dans sa chambre. Sans possibilit­é d’échapper à la mort.» Sandrine Delaup a déposé plainte contre X pour homicide involontai­re. Du groupe Orpea, coté en bourse, qui gère la maison de retraite, ils n’ont jamais eu de nouvelles depuis la nuit du drame. « Ils ont juste fait déposer une petite fleur le jour des obsèques. Nous voulons connaître la vérité, savoir ce qui s’est réellement passé ce soir-là. Il y a déjà eu cinq inondation­s dans cette maison de retraite, dont un sauvetage in extremis. Et on n’a pas su tirer les leçons du passé ! Après le chagrin, il y a de la colère. » Denis Delaup l’affirme, ce n’est pas un accident. «Je veux que notre action judiciaire serve d’exemple. Je ne le fais pas pour l’argent. Si un jour nous gagnons, il servira à des associatio­ns. » Denis en veut également aux élus, de tous bords. «Ils ont laissé fonctionne­r une maison de retraite en zone inondable, Denis Delaup, dans le salon refait où il a sauvé la vie de sa petite de  ans.

tout comme la caserne de sapeurs-pompiers qui a été submergée par 1,50 mètre d’eau! Et après on vient vous embêter pour ouvrir une fenêtre dans une façade parce qu’elle pourrait gêner quelqu’un? Dans quel monde vit-on? Les élus ne sont plus sur le terrain, ils sont complèteme­nt décalés...» En attendant un procès, la famille Delaup tente de retrouver

un fonctionne­ment normal dans ce que Denis qualifie de « seconde vie ». Mais rien ne peut plus être vraiment pareil. Ce cocon familial, pourtant restauré, a, selon eux perdu son âme, sa chaleur. Ils gardent en mémoire la vague ; les 1,70 mètre d’eau dans la maison ; la petite projetée par l’eau contre la cheminée ; les heures à attendre des secours dans le noir. L’annonce de la mort de Jacqueline. Ils ont ré-emménagé le 19 juin dernier. Le soir même, un orage terrible se déclarait sur Biot. « On s’est tous blottis dans une chambre en haut.» Pèse en eux la crainte que cela ne recommence. «Comme par hasard les travaux commencent depuis trois jours au pont. Au lieu de curer la Brague ! Il y a deux mètres de limon au fond sur des kilomètres! Il y a six mois en arrière je disais «ils vont faire les travaux ». Mais là, rien n’est fait! Les politiques se critiquent les uns et les autres mais ils n’ont rien fait ! Ca peut se reproduire demain, cette nuit. Comment vivre avec ça? » Le traumatism­e. Comme une cicatrice qui ne se referme pas.

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