Université d’Anticor : comment changer la vie politique
Clientélisme, corruption... Hier à Nice, auteur, responsable associatif, universitaire ont livré un diagnostic sans concession de la politique et esquissé des pistes pour faire bouger les lignes
Un amphi plein à craquer. Hier à Nice, l’Université de l’association Anticor a fait le plein. C’est Pierre Tafani qui a ouvert la table-ronde «Politique: que changer pour tout changer?». Ce spécialiste du clientélisme a décrypté ce «rouage du système politique moderne.»
L’impact du clientélisme
«C’est une complicité entre un patron un élu qui cherche un surcroît de puissance et un client qui veut obtenir des biens et services : un logement, un emploi, une faveur... Une enquête réalisée à Lille aux élections législatives de 2002 a révélé que 25 à 36% des électeurs reconnaissaient avoir bénéficié d’un service d’un élu» . Il a donné quelques exemples d’impact du clientélisme sur les scrutins. « En 2002, Chirac a creusé l’écart avec ses adversaires dans ses zones d’implantation clientélaires, Corrèze, Réunion, Nouvelle-Calédonie, Corse...» Et Pierre Tafani de poursuivre: « le PS tient la ville de Lille depuis 1880 sans interruption alors que la base sociale de la commune a changé. Les personnels des différentes institutions (conseil départemental, régional mais aussi l’hôpital) permettent d’obtenir le suffrage suffisant».
S’inspirer du modèle scandinave
Yohann Aucante , auteur du livre «Les démocraties scandinaves», a invité à s’inspirer des pays d’Europe du Nord. Suède, Danemark, Norvège qui trustent Les intervenants: Pierre Tafani, spécialiste du clientélisme en France (en haut à gauche). Philippe Pascot a lancé une pétition en ligne afin de rendre obligatoire le casier judiciaire vierge pour être élu (en haut à droite). Yohann Aucante, docteur en politique comparée de l’IEP de Paris et auteur de « Les démocraties scandinaves » (en bas à gauche). Yvan Richard, représentant de l’association « Les jours heureux ».
les premières places du classement de Transparency International. «La France est 26e ex-aequo avec le Qatar» , a posé l’universitaire avant de mettre en lumière les caractéristiques de ces pays. «Ce sont des démocraties parlementaires ou prévaut le scrutin proportionnel de liste, avec une possibilité pour les électeurs de sélectionner les candidats qu’ils préfèrent. La personnalisation du pouvoir est ainsi
atténuée. La vie politique est plus ennuyeuse, mais plus éthique.» En Suède, la «carrière politique» est moins intéressante d’un point de vue pécuniaire. «Il y a 2,5 fois moins d’élus par électeur qu’en France.» Et le cumul des mandats moindre. «Ils ont supprimé le Sénat, et n’ont pas d’école type Sciences Po et l’ENA. Il y une plus grande variété de profils.» Quid de la corruption? «Elle existe, mais le seuil
de tolérance est différent.» Et Yohann Aucante de citer l’exemple de Mona Sahlin, ancienne première secrétaire du parti social démocrate. Elle avait démissionné parce que la presse avait révélé qu’elle avait utilisé la carte bancaire du parti pour acheter des couches et des toblerone. « Cet été les présidents de l’équivalent de la cour des comptes ont démissionné, après de révélations dans la presse de favoritisme pour l’embauche
du personnel et de délit d’initié. Grâce à la loi sur la liberté d’expression et de transmission des données et documents publics, il a fallu six mois aux journalistes pour établir l’implication des juges. Il va désormais y avoir une enquête».
Un collectif citoyen
L’action, c’est la voie choisie par l’association «Les jours heureux». «Ce collectif citoyen a réuni 100 auteurs, des personnalités de la société civile, autour d’une question, c’est quoi la société du bien-vivre? Education, santé, urbanisme... 31 textes seront donnés aux citoyens en novembre pour arriver, en mars, à un projet «co-construit», a expliqué Yvan Richard. «On ne change pas le monde en allant à une élection présidentielle mais en se réappropriant le pouvoir dans la vie locale».