Soixante migrants résideront à l’hôpital de Pierrefeu dans le Var
La nouvelle bruissait depuis quelques jours. Elle a été confirmée par le maire Patrick Martinelli jeudi soir, en préambule du conseil municipal. La séance avait ellemême été retardée car le maire venait de recevoir confirmation de la volonté de l’État de créer un centre d’accueil et d’orientation (CAO) dans l’enceinte de l’hôpital psychiatrique Henri-Guérin. Soixante migrants, principalement originaires de Syrie, ou encore d’Afghanistan, d’Iran, de Somalie ou d’Érythrée, vont donc quitter la jungle de Calais pour séjourner à Pierrefeu. Trente devraient arriver à la mi-novembre, trente autres dans les semaines qui suivent. Sabry Hani, sous-préfet chargé de mission, précise que le CAO de Pierrefeu accueillera des migrants par rotations, pour des durées de 3 à 5 mois. « Si les choses se passent bien, comme c’est le cas dans la plupart des 164 CAO de France une fois les premières inquiétudes dissipées, le centre de Pierrefeu est appelé à durer, en fonction aussi de la politique mise en oeuvre dans l’accueil des migrants.» Le CAO sera installé dans le bâtiment Le Provence de l’hôpital Henri-Guérin. Celuilà même qui, en novembre 2011, avait vu ses résidents évacués par canoë lors d’une forte crue. Depuis lors, ce bâtiment d’un étage tombait en décrépitude, dans l’impossibilité de recevoir du public, notamment en raison d’une chaufferie hors d’usage. Agissant dans le cadre d’une procédure accélérée, au terme d’une étude de faisabilité et tenant compte d’une cartographie des aléas hydrauliques, la préfecture diligente des travaux d’électricité, de chauffage et d’aménagement général. Les migrants seront évidemment libres de leurs mouvements dans l’hôpital et en dehors. Leur séjour sera encadré par deux éducateurs et une association de soutien aux migrants demandeurs d’asile. Les pensionnaires s’engageront à respecter le règlement de la structure. Un veilleur de nuit ou vigile est aussi prévu pour faire respecter l’ordre.
«J’ai des craintes pour la sécurité»
À Pierrefeu, la nouvelle a fait boule de neige. Et c’est l’inquiétude qui domine, des craintes de déstabilisation du climat social. « Pierrefeu n’est ni Toulon, ni La Seyne, ni Hyères (1), note Patrick Martinelli, qui ne cache pas sa frustration d’être placé devant le fait accompli. Nous sommes un village rural de 6 000 habitants, ici tout le monde se connaît. Dans cette cohabitation qui se prépare, je redoute un rejet de cette population de migrants. J’ai des craintes pour la sécurité des habitants comme des migrants eux-mêmes », exprime le maire. Pris de court, Patrick Martinelli n’a pas prévu d’aborder la question en réunion publique. Mais il se préparait à être interpellé par ses administrés dès ce weekend. «Humainement parlant, nous comprenons qu’il faille accueillir ces hommes dont certains ont fui la guerre ou l’enrôlement d’office, reprend-il. J’entends qu’il faille en finir avec les conditions d’accueil à Calais tout comme je saisis les difficultés que représente cet afflux de migrants pour la population de Calais.» Mais Patrick Martinelli regrette que la préfecture du Var ne l’ait pas consulté, en tant que représentant de la commune, dans la recherche d’un site d’accueil. « Ce n’est pas normal de procéder ainsi. Le bâtiment retenu n’est pas une structure adéquate. Les migrants seront bien obligés de traverser l’hôpital, vivre au contact des résidents,
ce qui créera une mixité qui n’est pas souhaitable selon moi», affirme-t-il. Sabry Hani rappelle que 80 % des migrants accueillis, victimes d’exactions et de faits de guerre, ont vocation à devenir demandeurs d’asile. «Soyons clairs, ce ne sont pas des sauvages, livret-il. Les accueillir dans des conditions confortables répond à un enjeu d’humanité». 1. Depuis un an, 120 personnes ont été accueillies dans ces trois CAO urbains. En France, 5 638 migrants ont été accueillis dans 164 CAO. 2. François Hollande a promis le démantèlement de la jungle de Calais avant le 31 décembre 2016. L’État cherche à créer entre 9000 et 12000 places en CAO dans le même laps de temps, dont 1175 en Région Paca.